De Glace et de Sang
#2

De la neige jusqu'aux genoux, l'elfe transi de froid se frayait péniblement un chemin vers le nord.
Israfel ne voyait que du blanc à perte de vue autour de lui. Le borée hurlait à ses oreilles et la seule chose qui lui permettait de ne pas s'égarer dans tout ce blanc était la masse sombre de la Corne de Melfred qui se dressait au nord-ouest. Après avoir une fois de plus contemplé la sinistre silhouette pour vérifier son cap, le mande-orage resserra sa cape de voyage autour de lui. La seule vue de cette montagne maudite suffisait à le faire frissonner, comme si la neige n'y suffisait pas déjà.
Le jeune noble fit une pause peu après. Exténué et tremblant de froid, il avait besoin de repos. Après avoir trouvé un bouquet d'arbres qui le protégerait partiellement du vent, Israfel fouilla la neige à la recherche de petit bois et entrepris de faire un feu. L'humidité du bois ayant rendu la tâche impossible avec un briquet traditionnel, le mande-orage dut se résoudre à user de sa pyrokinésie pour faire prendre les flammes. Un rapide coup d'œil dans sa besace lui apprit que ses rations commençaient à manquer. Étant un piètre chasseur, le voyage allait devenir intenable si il s'éternisait encore. L'elfe adressa quelques mots à Fryelund, priant pour ne pas s'être perdu dans cet enfer blanc, puis entama son frugal repas à base de viande séchée et de pain rassis. Israfel se reposa ensuite auprès du feu et en profita pour se remémorer le voyage qui l'avait mené jusque là.


Après d'interminables séances d'entraînement, Israfel s'était senti enfin prêt et s'était de nouveau lancé sur les routes du nord. Cette fois, il avait choisi de longer la côte vers le nord, espérant que la faune y serait plus clémente.
En chemin, il fit la connaissance d'une talienne nommée Valériane. La jeune femme l'avait intriguée car elle arborait une cape blanche marquée d'un blason bleu, la marque des Sentinelles d'Argent, son ancienne guilde. Il l'avait abordée pour prendre des nouvelles de ses anciens compagnons et les deux jeunes gens avaient rapidement sympathisé. La zélote souhaitant elle aussi longer la côte vers le nord, ils firent route ensemble, et furent rejoint en chemin par deux autres membres des Sentinelles, Evrard et Léonide.
Après avoir bourlingué ensemble, leurs chemins s'étaient finalement séparés aux frontières de l'Ingemann. Israfel n'avait alors plus qu'à prendre plein nord pour arriver à Cyrijäl. Depuis, il était seul, avançant tout droit dans un paysage d'une blancheur immaculée. Blanc. Blanc. Du blanc partout…


Le craquement d'une branche dans le feu tira l'elfe de sa torpeur. Il avait failli s'endormir, une erreur mortelle dans ce pays gelé où le froid attendait la moindre occasion pour vous prendre. Le jeune noble se secoua un peu avant d'éteindre le feu et de reprendre la route. Cyrijäl n'était plus très loin, il ne pouvait pas échouer maintenant.


Le soir commençait à tomber. De petits flocons tombaient doucement, ajoutant à l'épaisse couche de neige et de glace qui couvrait déjà le sol. Peu à peu, le doute commençait à prendre l'elfe. Il aurait du être en vue de la capitale septentrionale de l'empire depuis une heure déjà. Si il s'était vraiment égaré, il allait finir en congère avant peu.
C'est alors qu'il la vit. Au milieu de la neige, une rampe de pierre grimpait doucement vers une ville nichée à l'ombre de la montagne. Cyrijäl. Enfin.
La pente douce était flanquée d'une arche ouvragée et gardée par deux sentinelles. Les factionnaires avaient une attitude de défi et semblaient prêts à en découdre. Le fait qu'Israfel soit un elfe n'avait visiblement aucune espèce d'importance pour eux. Ici, la guerre faisait rage, et tout visiteur non-annoncé s'exposait à de lourdes sanctions. Il s'arrêta dont à distance respectable et lança aussi fort qu'il le pu pour couvrir le hurlement du vent :


« Je m'appelle Israfel Aedarion, fils d'Aldys Aedarion, Haut-Elfe d'Asteras. Je vous demande asile, ainsi qu'une audience avec l'ambassadrice Lahta Meletya. »

L'elfe émit un léger soupire une fois sa demande formulée. L'ironie de la situation ne lui échappait pas : alors qu'il avait quitté les Sentinelles d'Argent pour accomplir l'objectif qu'il s'était fixé, c'était finalement grâce à l'aide de trois d'entre eux qu'il était à Cyrijâl en ce jour. Et maintenant, alors qu'il avait souhaité échapper à l'ombre de son père, voilà qu'il faisait à nouveau usage de son nom en espérant qu'il lui octroie des faveurs. Chassez le naturel, il revient au galop… Il avait encore du travail à faire avant de s'émanciper autant qu'il le voudrait.

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