Une rencontre fortuite
#1
Afiralia a écrit :Afiralia galopait aussi vite que ses pattes fébriles lui permettaient, et ce afin d'échapper à ses poursuivants, en l'occurrence des Haut-Elfes écumant de haine, voulant venger la destruction de leur village dont les noirs panaches de fumée qui s'en élevaient indiquaient qu'il brûlait toujours.

La centaure était désemparée comme à son habitude dans pareille situation.
Elle avait certes d'elle-même décidé de se joindre à l'attaque, non pour aider les nains dans un premier temps, mais pour protéger les membres de sa guilde qui avaient acceptés de joindre leurs forces à celles des nains pour se venger des Haut-Elfes.
A cela s'ajoutait la rancune que la druidesse portait aux elfes depuis qu'elle avait entendu les insultes et moqueries qu'ils inventaient à leur propos, et qui ne manquaient pas de blesser son peuple, mais aussi et surtout la déesse.
Cependant, même animée par la colère, elle n'avait pas imaginé que la situation allait dégénérer à ce point, et que les nains (aidés malheureusement par le chef de sa guilde, Arteo) iraient jusque là.
Dépassée par les événements, elle avait néanmoins su garder son calme, soutenue par sa déesse, et avait pu sauver certaines vies et faciliter la fuite de ses alliés en immobilisant temporairement leurs ennemis.
Cependant l'amertume et la frustration l'habitaient, car elle n'avait pu protéger Arteo et Artmal, qui furent bien vite vaincus dès leur entrée dans Tilador Erdana, ville qu'elle ne pourra jamais découvrir car durant l'attaque, elle avait préféré se tenir à l'extérieur en toute prudence, et à présent, le village était en ruines et en cendres.
C'est donc l'esprit confus et désemparé que la druidesse galopait depuis quelques heures déjà, même si elle savait qu'à présent, elle ne risquait rien.
Essoufflée, elle finit néanmoins par ralentir l'allure, et passa à un pas rapide, perdue dans un flot incessant d'émotions.
La peur.
La haine.
La tristesse.
Elle ne comprenait plus ses émotions et ne savait pas ce qu'elle devait ressentir à cet instant précis.
De la fierté ? C'est ce qu'elle avait imaginé avant l'attaque, néanmoins elle ne s'en sentait aucune pour ce qu'elle avait fait.
Cependant, la pensée d'avoir lavé en partie l'affront qui avait été fait à Aletheria et que les Haut-Elfes avaient en première, commençaient les hostilités avec une escarmouche prétentieuse près de Fael'Kaldora lui redonna courage et confiance en soi.
Elle avait bien agit, même si le prix avait été dur à payer.
La fatigue s'emparait peu à peu d'elle, remplaçant l'excitation des combats.
Aussi pensait-elle aller à Naël'Kaldora en une seule traite et en ne faisant que de rares pauses pour arriver à destination le plus vite possible et pouvoir se reposer.
Mais le destin et Aletheria sans doute aussi, n'entendaient pas les choses de la même manière qu'elle.

Alors qu'elle passait près des marais abritant le village gobelin, lasse, Afiralia aperçu un mouvement dans la boue néfaste et putride.
Sursautant, pensant immédiatement à une embuscade tendu par les Haut-Elfes afin d'attraper et éliminer les fuyards, la centaure s'apprêta à incanter, et s'approcha doucement et discrètement de la source du bruit.
Ecartant quelques branches qui lui gênaient la vue, elle découvrit bien vite le (ou plutôt dans cette situation précise, la) responsable : une elfe sylvaine, étonnamment nue, et qui, pataugeant piteusement et misérablement dans les marais, semblait chercher quelque chose.
La crainte d'Afiralia fit place au mépris, et à un certain amusement pervers :
La nudité n'était pas gênante chez les centaures, car il est courant que les femmes se promènent la poitrine nue et recouverte d'aucun apparat, même s'il arrivait bien entendu que d'autres femmes comme elle porte des vêtements, le plus souvent pour améliorer leurs aptitudes magiques, ce qui était son cas.
Néanmoins, la centaure avait entendu dire que la nudité était plus que gênant chez les autres races, voir même parfois offensant.
Afiralia s'imagina donc avec un malin plaisir quelle torture cela devait être pour cette elfe d'avoir à patauger dans les marais et ce dans son plus simple appareil.
Mais pourquoi était-elle nue en fait ?
La druidesse l'ignorait et elle en avait à vrai dire que peu faire : elle était loin de porter les sylvains dans son cœur, et au vu de tous les différents qu'elle avait pu avoir avec eux récemment, elle n'allait sans doute pas bouger le petit doigt pour aider l'une d'entre eux, même si cette dernière semblait en détresse.
C'est pourquoi Afiralia se mit à faire demi-tour, dans la plus totale indifférence… Quand soudain, un détail lui revint à l'esprit.
La centaure revint ses pas pour observer de nouveau l'elfe, et surtout : ses cheveux.
Ils étaient roux.
La druidesse se figea soudain.
Une sylvaine.
Rousse.
Serait-ce elle ? Yava la Rousse ? Cette ignoble garce qui avait osé pénétrait dans Naël Kaldora afin de placarder sur le tableau en face du temple une ode dédiée à Aletheria… A ALETHERIA !
Un tel acte était pire qu'un crime. C'est un affront, un blasphème, une profanation ! Une offense faite à Altheria ! Une démonstration supplémentaire de la cupidité et de la malveillance des sylvains !
Après avoir détruit l'ode et toutes preuves s'y rapportant, Afiralia avait juré devant La Lune elle même qu'elle la vengerait en éliminant de ses propres mains celle qui avait l'impertinence de venir la narguer, et ce en territoire centaure même.
Et à présent, voici que la coupable était là, en face d'elle, désarmée et en mauvaises postures, loin de chez elle, et donc loin de quelconques amis et frères de race qui pourrait venir la soutenir.

La colère monta en elle, cependant la centaure s'obligea à rester calme et à réfléchir froidement.

Il n'existait sans doute pas une seule sylvaine rousse sur Ecridel, or elle ne pouvait pas tuer quelqu'un impunément et de façon hasardeuse.
Ce serait qui plus est, une offense à la déesse que de tuer ainsi gratuitement en son nom, et elle ne pouvait se permettre d'insulter Aletheria.

Elle devait tout d'abord s'assurer que cette elfe était bien celle qu'elle recherchait, afin de ne pas commettre d'erreur qui pourrait par la suite, lui être préjudiciable… Mais comment ?

Dans l'état où elle se trouvait, elle doutait pouvoir réussir à se contenir face à l'elfe.
De plus, les Haut-Elfes étaient toujours à sa poursuite…
De plus, elle avait prit l'habitude de discerner les Elfes Sylvains des Haut-Elfes par leurs vêtements, mais dans ce cas précis, la tâche était ardu, même si certains détails laissaient peu de place au doute.

Soudain elle eu une idée.
Inspirant profondément, elle se calma peu à peu, laissant la passibilité de la nature environnante l'envahir et la réconforter, une technique de méditation qu'elle avait apprise lors de son apprentissage de la magie druidique.

Puis, émettant silencieusement une dernière prière à Aletheria pour qu'elle lui prête sa force, recula de quelques pas… Puis bondit de sa cachette en trombe, comme poursuivit par le diable lui-même.. Ce qui était en quelque sorte, vraie.

Elle galopa quelques mètres, affolée, regardant derrière elle, porta de nouveau son regard devant elle… Puis s'arrêta in extremis à quelques mètres à peine de l'elfe, comme venant à peine de la voir et ignorant jusqu'à alors qu'elle se trouvait ici, ce qui était bien entendu faux.
Feignant la surprise, les sourcils froncés et le regard noir, Afiralia adopta une attitude menaçante, stimulant l'essoufflement, regarda l'elfe, bâton tendu vers elle comme un avertissement, visiblement déconcertée.
Elle tremblait, et ce qui était en vérité de la fureur passait tout aussi bien pour de la peur et de l'épuisement à cet instant précis, ce qui ne pouvait que rendre plus réaliste sa comédie.

Enfin, d'une voix hésitante mais aussi prudente, elle posa à l'individu se trouvant devant elle une question simple mais pour le moins pertinente au vu de la situation:
-Haut-Elfe ou Sylvaine ?

Ou plus généralement: "Ennemie ou amie" ?
Yava a écrit :Juste avant...

C'est la fraîcheur de la rosée qui la réveilla. La fraîcheur lui caressant les hanches la fit frissonner. Elle grommela quelque chose, puis ouvrit brutalement les yeux, sursautant. Sa crinière rousse, en pagaille sur ses épaules, ne la faisait que davantage ressemblait à une sauvageonne ou une nymphe perdue. Ses yeux d'émeraude observèrent rapidement son corps et elle se rendit compte des quelques blessures qu'elle avait sur elle, mais surtout de sa nudité. Sa poitrine ronde et ferme n'avait plus de tunique pour se cacher, et ses cuisses bombées se retrouvaient elles aussi à la vue de tous. Son bâton de buis avait également disparu, et son pendentif également.

Sa peau de lait était alors découpée par le soleil filtrant à travers la canopée de la foret : Halista elle-même devait regarder d'un œil dubitatif l'étrange accoutrement de la sauvage.

Une tâche plus claire attira son attention. Une lettre. Elle tendit la main et l'attira à elle pour la déchiffrer. Cette fois-ci, ce n'était pas un langage codé mais bel et bien une lettre, écrite avec des mots qu'elle comprenait, et venant du Korrigan lui-même. Elle grimaça à la fin de cette dernière. Alors ainsi, le petit fourbe avait piqué ses vêtements – et l'anneau des Holdars – pour la laisser nue sur la rosée ?
Quelle bonne âme, grommela Yava en se redressant.

Si la nudité lui importait peu – et fort heureusement elle n'avait pas reçu l'éducation de Mitriath sur les conventions et les bonnes manières – elle savait pertinemment que la Plaine de Karios était à l'heure actuelle habitée, et que nue, son espérance de vie était fort basse, voir quasi inexistante. Aussi, si les secondes étaient comptées, il faudrait qu'elle retrouve bien vite ses vêtements… ou ce serait à la mort de la trouver.

Le Korrigan lui disait de chercher dans la boue, mais de la boue, aux alentours du village abandonné, il n'y avait que ça, à commencer par les marécages du village gobelin. Elle fit la moue, se demandant si elle avait à s'éloigner autant du village pour retrouver ses vêtements.
Quelques longues secondes d'hésitation plus tard, elle prit la peine d'avancer jusqu'à Esk'tyki, bien décidée à retrouver ce qu'elle venait de perdre.

Elle passa deux jours sur la route, se cachant derrière les arbres et dans l'eau, affrontant un moustique qui laissa sur ses flancs la marque de son poison, avant de voir enfin la couleur du marécage boueux du village des gobelins bleus. Elle posa ses yeux sur le mélange de fange et de terre, avant d'y plonger. Un pied, puis un autre, elle s'enfonça jusqu'à la taille dans la terre crasseuse. Elle était passée ici, des mois auparavant, mais jamais elle ne se serait attendue à revenir ici pour y chercher ses vêtements.

Ses doigts raclèrent le marécage, ne sachant vraiment comment s'y prendre pour trouver son armure et son arme. Elle y plongea le buste une fois, si bien que sa peau, jadis laiteuse comme une pêche, à peine dorée par le soleil qui rarement traverse la forêt, fut marquée du noire de l'eau croupi et de la terre boueuse. Seul son visage restait blanc, et ses longues oreilles perçaient à travers sa chevelure encore humide, ayant traversée l'Erion quelques minutes avant.

Elle se crispa brutalement en entendant le bruit de sabot furieux sur le sol. Tous ses sens lui crièrent qu'elle avait eu raison d'avoir peur, qu'elle avait eu raison de se dire que sa durée de vie était minime à découvert, mais aucun ne lui chuchota de fuir. Elle se retourna, le visage stoïque, ses grands yeux d'émeraude ouverts et fixés sur la nouvelle inconnue qui s'avérait être un centaure – ou tout du moins une centauresse.

Elle semblait avoir peur, elle semblait aussi essoufflée.

Yava ne cilla pas.

On lui avait murmurait que les affrontements aux frontières étaient incessants depuis l'attaque des hauts-elfes, mais elle n'avait jamais eu vraiment en face d'elle la preuve. Peut-être que la centauresse fuyait un animal après tout.

« Haut-Elfe ou Sylvaine ? »

Dans le flot noir et boueux, Yava sembla réfléchir à sa réponse.

Quand elle avait quitté Mitriath, c'était à l'époque où on avait trainée, enchaînée, celle que l'on disait avoir attaqué un sylvain, et c'était une centauresse dont elle ne se souvenait plus le nom. Puis il y avait eu l'attaque sur les frontières, où les elfes sylvains et les centaures s'étaient mis dans le même camp afin de repousser le front haut-elfe.

Dans un cas comme dans un autre, les différents du passé la poussaient à rester méfiante.
En mauvaise posture, nue et sans défense, elle faisait une proie de choix pour un prédateur peu regardant.

Elle se racla la gorge. Ses yeux émeraude la fixaient, grands. Trop grands.
L'archidruide n'avait cependant pas peur. Pas encore.

« Je suis fille d'Halista, brüsein de mon état. »

Elle avait beau regardé la centauresse, elle ne se souvenait pas que Le Loup ait pu un jour lui racontait une histoire avec une femme aux cheveux couleur de terre sec et aux yeux noirs. D'ailleurs, elle ne se souvenait pas vraiment que Le Loup lui ait un jour parlé d'un autre centaure.

« Je… » Elle hésita, quelques secondes, à peine, avant de froncer légèrement les sourcils, comme si elle n'arrivait pas à se décider sur ce qu'elle voulait dire. « Vous êtes une biche. »

Ses yeux ne quittaient pas la centauresse, mais plus elle la regardait, plus elle doutait. Elle n'avait que rarement vu de centaure, mais jamais avec un corps de biche ou de cerf. Peut-être n'était-elle pas une centauresse d'ailleurs. Peut-être était-elle… autre chose ?
Afiralia a écrit :« Vous êtes une biche. »

Si Afiralia pouvait foudroyer d'un simple regard la sylvaine pour son impertinence, elle l'aurait sans hésiter fait.
A ces mots, son visage se durcit, sa mâchoire se crispa, et les jointures de ses doigts tenant son bâton blanchissaient à vue d'œil tant elle les serrait fort sous le coup de la colère.
Son regard, noir et tranchant comme le fil d'une épée transperça Yava, comme si elle sondait son âme même.

Elle n'appréciait jamais que l'on souligne sa différence physique avec les autres centaures, car cela lui rappelait qu'elle était différente, ainsi que de biens mauvais souvenirs.
Heureusement pour elle, ses frères et sœurs de race s'étaient habitués à cette particularité physique et ne faisait guère attention à elle à présent, et généralement les membres des autres races étaient trop aveugles ou ignorants sur son peuple pour constater qu'elle différait d'eux par cet aspect.

Cependant ce "détail" n'était pas passé inaperçu auprès de l'elfe, et elle avait mis que peu de temps à le relever.

D'une voix plus glaciale et sombre que la nuit, elle répondit à la sylvaine sur un ton irrité, en détachant bien chaque mot, luttant pour ne pas céder à la colère:
-Je ne suis pas... une biche.
Je suis et resterait une centaure, fille d'Aletheria, notre déesse céleste.
Je ne suis et ne serait rien d'autre que cela.
Est-ce clair ?


En ébullition, la centaure se demanda si elle ne devait pas punir sur le champ l'effrontée pour son arrogance... Mais elle s'abstint bien de le faire.
Cela serait gâcher les efforts dépensés jusque là pour stimuler sa fuite et entamer la discussion avec l'elfe.
De plus, même méprisante envers les sylvains, la druidesse n'appréciait jamais d'ôter elle-même une vie, ce qui s'expliquait sans doute par sa formation de druide, et ne le faisait qu'en cas d'obligation.

Bien entendu, si par la suite, il s'avérait que cette jeune elfe était bien celle qu'elle recherchait, et elle n'hésitera alors pas un seul instant, et abattra son courroux sur l'impétueuse.

Mais patience, patience... Elle savait que, même si la jeune femme qui était devant elle se révélait ne pas être « Yava la Rousse », elle trouverait bien un jour cette dernière car c'était la volonté d'Aletheria. Et alors, quand ce jour arrivera, elle punira sans pitié ni remords la coupable pour son acte infâme.

Mais pour l'instant, elle devait dissimuler ses véritables intentions, et continuer de jouer la comédie.

Afin d‘éviter d'être trahie par ses émotions, Afiralia tourna la tête pour regarder derrière elle, comme pour surveiller ses arrières... Ce qui était vrai, car quelques instants plus tôt, elle avait aperçu un de ses camarades de l'Irih Aletheria traverser la plaine couvert de blessures. Les Haut-Elfes n'étaient pas loin.

Elle ne devait pas rester ici... Cependant, elle refusait de partir tant qu'elle n'aurait pas confirmer l'identité de la femme rousse.
Si ce qu'elle supposait s'avérer vrai, alors elle n'aura sans doute pas de meilleure occasion que celle-ci.

Se retournant vers Yava, calmée, elle dit d'une voix neutre:

-J'ignore ce que vous faites ici, mais vous ne devriez pas trop traîner dans ces lieux: les Haut-Elfes sont en chemin et ont soif de sang, et ils n'hésiteront pas à massacrer et tuer tout ce qu'ils trouveront sur leur chemin... Comme à leur ignoble habitude.
Il est donc dangereux de rester ici, surtout pour une personne seule et sans équipement ni protections.

Sé sé.



Se redressant, la centaure fit mine de continuer son chemin... Avant de s'arrêter.
Elle ne comptait pas, bien entendu, partir maintenant, cependant une question la taraudait, et cela ne faisait pas partie de sa comédie. N'ayant rien à perdre à la poser, la centaure se tourna une nouvelle fois vers l'elfe, l'examina quelques instants d'un regard presque inquisiteur, puis demanda, à la fois consternée et intriguée:

Pourquoi êtes-vous nue ? Je croyais que les membres de votre peuple portaient constamment des vêtements… Ai-je tort ?
Yava a écrit :Au regard que la centauresse venait de lui jeter, elle avait vu juste. Elle était bien une biche, et visiblement, ce n'était pas une très bonne chose pour la centauresse. Peut-être était là la marque de la laideur, quand bien même Yava trouvait bien plus élégant et joli les jambes graciles d'une biche aux poteaux implacables d'un canasson tel que Le Loup, mais peut-être que cela venait du fait que sa formation de druide la conduisait davantage à vénérer la biche et le cerf aux équidés, moins vigoureux mais plus endurant sans doute.

La rousse ne cilla pas quand la centauresse lui parla. Si elle avait suscité en elle la colère, elle ne l'avait pas fait volontairement, et c'était bien pour cela qu'elle n'irait pas s'excuser de quoi que ce soit. Son regard d'émeraude resta figé sur le visage couleur de terre, droit.

Elle ne répondit pas, et pensa un instant que la centauresse s'en irait sans davantage de bavardage, mais à la place de cela, elle continua de parler. La rousse était restée dans la boue, à tenter de rattraper des vêtements qui visiblement n'étaient pas ici. Sans doute le Korrigan les lui avait cachés plus loin. Elle fit une moue, alors qu'Afiralia reprenait la discussion. Yava leva sur elle ses yeux d'émeraude, silencieuse, un instant.

« J'ose croire qu'il n'y a pas d'hommes et de femmes qui ont si peu d'honneur pour tuer une personne pataugeant dans la boue sans armes et sans vêtements… » Elle marqua une pause, avant de sourire, d'un sourire de renard. « Mais venant de hauts-elfes, ça ne m'étonnerait pas, en effet. Merci du conseil. »

Les yeux verts de l'elfe suivirent les premiers pas de la centaure. Elle s'en allait, enfin.
La rousse tourna le dos et agita ses doigts dans la boue, commençant à regagner la rive. Elle sortit de la boue nauséabonde et regarda pas dessus son épaule. Elle était nue, mais elle n'avait pas honte. Non pas parce que son corps, finement musclé, haut et aux courbes sulfureuses, n'avait rien à envier à qui que ce soit, mais davantage car elle n'avait pas été habitué à voir la nudité comme choquante. Pour avoir vécue en ermite une centaine d'années, elle ne comptait plus les fois où, suite à une transformation en biche trop rapide, elle avait craquelé ses haillons.

Yava eut un sourire, amusée.

« Les gens de mon peuple ont gardé l'héritage des anciens, et portent des robes et des armures c'est bien vrai. Moi-même j'en avais une, d'armure, avant de rencontrer un sale petit gredin… » Elle détourna les yeux, regardant au loin le village, ou tout du moins ce qu'elle croyait être la direction du village. « Un petit Korrigan a dérobé mes habits cette nuit. Je les cherche depuis l'aube, sans succès. Il m'a dit les avoir laisser dans la boue, mais je crois, hélas, qu'il ne parlait pas des marécages… »

Elle se regarda et soupira.

« De l'eau claire me fera le plus grand bien. Si je ne les trouve pas, je quitterais la plaine avant d'apercevoir des hauts-elfes. »

Elle regarda la centauresse, et eut un sourire, calme. Elle s'apprêtait à partir pour le fleuve.

« J'espère que vous regagnerez la forêt avant moi, et ce, sauve. »

La discussion était finie pour elle. Elle tourna le dos, fit quelques pas et entra dans l'eau froide de la rivière, pour se nettoyer de la crasse du marécage où finalement elle n'avait rien trouvé.

Le ciel s'assombrissait, la nuit venait à tomber. Elle venait de perdre une journée entière…
Et au loin se dessinait déjà une troisième présence, qu'elle pouvait sentir sans la voir pourtant.
Afiralia a écrit :Afiralia enrageait.

L'elfe lui filait entre les mains, et elle n'avait pas encore réussi à lui soutirer de nom.

Et pour ne rien arranger, une Haut-Elfe débarqua de la route menant de Tilador à Nim Duin et se mit à attaquer ses frères sans autre forme de procès.

La centaure lança sur la Haut-Elfe quelques malédictions afin de la rendre plus vulnérables, puis l'attaqua avec la magie de La Lune, et même si elle réussit à la toucher, le bouclier de mana de la mage Haut-Elfe absorba une grande partie du sort, minimisant ainsi les dégâts.

Cependant Arteo et d'autres centaures arrivèrent pour assaillir à leur tour l'elfe, qui ne tarda pas à tomber sous leurs assauts combinés.

La centaure jeta un bref regard au corps inanimé et inconscient allongé sur l'herbe, mal à l'aise, puis reporta son regard sur la sylvaine... Qui n'était plus là.

La druidesse commença à paniquer et à s'insulter de tous les noms, punition pour avoir laisser pareille occasion... Quand des bruits de clapotis et d'eau lui parvinrent.
Regardant au loin, elle vit -non sans soulagement- l'elfe au teint blanc et aux cheveux de feu faire une toilette dans la rivière.

Certains s'attarderaient devant ce tableau enchanteur, pouvant penser qu'ils observaient devant eux une véritable et splendide nymphe sortie des eaux, et étant rongés par le dilemme suivant: oser l'aborder ou rester un observateur caché et silencieux ?

Afiralia elle, ne voyait pas les choses ainsi, et devait faire face à un tout autre dilemme: devait-elle insister auprès de l'elfe au risque de devenir suspecte, ou bien la tuer même en étant en proie au doute, en priant pour que le hasard lui soit favorable ?

Elle réfléchissait, réfléchissait, mais jamais elle n'arriva à se décider.
Furieuse face à son incapacité à réfléchir intelligemment et calmement dans pareilles situation, elle décidé d'en terminer avec cette torture inutile qu'elle s'infligeait à elle-même, et laissa sa colère prendre le dessus.

Incantant à voix basse, elle commença à invoquer la puissance de la Lune afin de l'abattre définitivement sur la sylvaine en train de prendre innocemment son bain... Puis s'arrêta net dans son geste et se tut.

Elle avait l'impression d'avoir entendu la sylvaine parler... S'adressait-elle à elle ? L'avait-elle découvert ?
La panique commença à s'emparer de son esprit, mais très vite, elle s'obligea au calme: non, elle ne lui parlait pas, car elle ne parlait pas le commun, mais une langue qu'Afiralia connaissait néanmoins, sans qu'elle arriva à savoir ce dont il en retournait, fouillant dans ses souvenirs en vain.

Puis elle vit la blessure de l'elfe à la hanche qu'elle avait remarqué auparavant, se refermer et cicatriser lentement sous ses yeux.
Elle connaissait cette magie.
La magie des druides.

Afiralia se mordit la lèvre.
Elle avait en face d'elle une druide, sans doute même une archidruide, comme elle.
Et cela ne manquait pas de compliquer de façon non négligente son affaire.
Même si les relations centaures et sylvaines étaient tendues, la communauté druidique elle, constitué d'autant de sylvains que de centaures, faisait fi des conflits et restait soudée, ce qui s'expliquait par le fait que le druidisme avait été appris aux centaures par les sylvains, chose qu'elle avait toujours eu du mal à accepter, mais contre laquelle elle était impuissante et ne pouvait rien faire.

Si elle tuait l'elfe maintenant, l'accident aurait de grandes chances de parvenir aux autres archidruides, et elle pourrait être punie, voir pire, être bannie de la communauté et déchue de ses droits et de son titre.

Et elle ne pouvait pas gâcher volontairement tous les efforts qu'elle avait dépensé jusque là pour devenir ce qu'elle était aujourd'hui, et il y avait une autre raison, beaucoup plus importante: si elle ne restait pas parmi les druides, elle ne pourra jamais retrouver sa forme d'origine.
Mais malheureusement, elle ne pouvait pas non plus offenser la déesse en laissant l'effrontée qui l'avait blessé continuer à vivre.

Que devait-elle faire ? Mais que devait-elle faire ?

Elle devait punir l'elfe, c'était une chose sûre et certaine sur laquelle elle ne reviendrait pas.
Mais elle devait pour cela délaisser la méthode brute, c'est-à-dire la tuer elle-même, et favoriser la ruse.

Mais comment ?
Comment ruser pour entraîner la sylvaine à sa perte ?

Elle n'allait quand même pas devenir son amie pour-
L'esprit de la druidesse s'illumina, tandis que tout un plan se construisait peu à peu dans son esprit.
Oui… En s'y prenant ainsi, elle pourrait réussir à atteindre son objectif.
Mais cela lui demandera des sacrifices… D'importants sacrifices d'elle-même.

Cependant, pour le bonheur de sa déesse, elle était prête à tout.
A tout.
Même mourir.

Un sourire se dessina peu à peu sur le visage de la centaure, qu'on ne pourrait qualifier de bienveillant ou au contraire de totalement malveillant.

S'approchant doucement de l'elfe, sans gestes brusques, elle proposa, d'une voix douce et rassurante :
-Vous voir ainsi dans une pareille situation me fait de la peine.
Laissez-moi vous aider à retrouver vos vêtements et à en terminer avec la mauvaise farce de ce korrigan moqueur.
Après tout, ne devons nous pas nous prêter mutuellement main forte, en tant que consœurs ?


Pour appuyer ses propos, elle se mit à fredonner une petite mélodie.
Un corbeau apparu soudain dans le ciel et se dirigea vers elle, pour se poser enfin sur le bras que la druidesse lui tendait.
Tandis qu'elle caressait avec délicatesse la tête de l'oiseau et lui murmurait quelques mots dans la langue des druides, elle plongea son regard dans les yeux émeraude de son interlocutrice.
Yava a écrit :Il venait de se passer quelque chose derrière elle, mais la rousse ne cilla pas. Elle n'avait pas envie de porter attention à autres choses qu'à ses habits. Elle avait été distraite de nombreuses fois ces derniers temps, et ce n'était certainement pas pour l'être encore et finir plus que nue – ce qui aurait été difficile, il fallait l'avouer. Au moins le Korrigan lui avait laissé une petite besace avec le fruit de ses dernières cueillettes.

Elle entra dans l'eau froide, et passa la même eau claire sur son corps. Ses doigts semblaient caresser, mais c'était davantage l'eau qui avait cet effet. Elle frissonna sous la nouvelle fraîcheur, les joues s'empourprant à peine, alors que l'eau tout autour d'elle devint un peu plus crasseuse. Elle murmura quelques mots d'une langue que peu connurent, et lentement la plaie infligée par le moustique se referma à une vitesse surnaturelle.
Au moins, même nue, elle restait encore divinement dangereuse.

Ses grands yeux d'émeraude se rouvrirent pour se poser sur la centauresse au corps de biche. Elle resta silencieuse, quand bien même le corbeau l'aurait fait sourire en temps normal. Entre archidruide – parce qu'elle était sûre que la centauresse l'était, ou était en voie de le devenir – il y avait cette façon de ne pas parler, ces silences respectueux et plein de sens.

« Oh, c'est très gentil de votre part… » Un petit sourire naquit sur le visage de renard de la rousse. « Le Korrigan m'a volée quand j'étais endormie près du village où Nagoth est passé. Je pense qu'ils ne sont pas très loin. Il m'a juste dit qu'ils baignaient dans la boue… J'avais bien pensé au marécage, mais ils n'y sont pas. Je pense passer l'Erion et retourner au village. Je regarderais dans les écuries, et dans la ferme… »

Elle jeta un dernier regard à Afiralia et s'éloigna.
Elle n'avait pas besoin de noms pour se fier à la centauresse. On aurait pu la croire naïve, mais Yava avait tendance à croire que la méchanceté était inscrite sur le visage, et quand elle regardait la jeune centaure, elle ne ressentait aucune amertume, rien. Peut-être une certaine méfiance, mais elle avait toujours été méfiante, sauvageonne à sa façon. Sa propre guilde ne semblait pas au courant de qui elle était vraiment, de son histoire non plus.

Elle reprit son chemin, silencieuse. Ses yeux d'émeraude cherchaient un coin derrière les buissons, mais une armure aussi belle que la sienne aurait pu disparaître sur le sol même, tant il se confondait avec les feuilles.

Elle marcha quelques temps, sans regarder derrière elle, avant de croiser un autre sylvain. Le jeune Olibrius, qu'elle avait déjà croisé dans la grotte où ils avaient, eux et ainsi que d'autres sylvains, abattus le Cadavre Végétale, un ancien haut-elfe déchu dans la folie des plantes, sans doute. C'est tout du moins ce qu'elle pensait.

« Ne me regardez pas ainsi, je sais. » Elle eut un petit rire. Ses joues s'empourpraient à peine, non pas de gêne, mais elle comprenait bien qu'elle ne laissait pas grand monde indifférent, tout du moins pas ceux de son espèce, et reprit : « Un Korrigan m'a volé il y a peu, je n'ai plus rien… »
« Hum… Heu… Prenez ma cape en attendant. »


Un petit sourire plein de merci s'étira sur le visage de porcelaine de la syvlaine qui enfila sur ses épaules la cape, la ceinturant autour de son buste afin d'en faire une sorte de robe étrange. Elle le regarda, avec un petit sourire timide.

« C'est gentil de votre part Olibrius.
Mais… Que faîtes-vous dans la région ? »


Quand elle avait quitté des yeux les autres sylvains, c'était à Mitriath.
Sous la cape du sylvain, sa peau tranchait, trop claire. Sa tignasse de feu encadrait un visage fin et radieux. Elle n'avait pas honte. Pas le moins du monde.
Olibrius a écrit :Olibrius contenu sa surprise de voir une elfe dévêtue seule, ou presque dans cet endroit dangereux, croisée de mouvements de troupes.
Je me promène dans ce bois. Et je chasse le nain, à l'occasion.

En réalité, il chassait bien plus qu'il ne se promenait.

Comment comptez-vous vous y prendre pour récupérer vos effets ?
Yava a écrit :Un sourire comme toute réponse, la rousse lui aurait bien répondu qu'elle les cherchait depuis deux jours, cela lui semblait évident comme réponse. Elle releva une mèche de cheveux derrière son oreille, calme.

« Je me rendais au village abandonné.
Je pense que le petit gredin a laissé mes affaires dans une des bâtisses, ou dans l'écurie en ruine. J'espère les retrouver au plus vite, on m'a parlé des mouvements des hauts-elfes dans la plaine... »


Elle jeta un regard derrière elle, se rappelant alors qu'Afiralia n'était pas loin.
Cependant elle avait disparu de son champs de vision. Il lui fallu froncer les sourcils et forçait sur sa vue pour pouvoir apercevoir son teint mât, plus loin.
Olibrius a écrit :Olibrius ne paraissait pas insensible au charme de Yava. Quand il ne fixait pas le sol avec une attention toute particulière, ses yeux se perdaient dans sa chevelure rousse. Tentant de se ressaisir, il reprit :

Comment vous êtes-vous attiré les foudres d'un korrigan ?
En tout cas, nous sommes pour le moment en sécurité, je n'ai pas vu d'haut elfe venir ici depuis longtemps.
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#2
Afiralia soutint sans ciller le regard de l'elfe, puis continua de la fixer même quand cette dernière commença à s'éloigner. Après quelques secondes de réflexion –et à contre-cœur- elle décida de suivre l'elfe, traversant avec précaution la rivière après avoir libéré l'oiseau perché sur son bras et avoir admiré durant quelques instants son vol majestueux.

La façon de se comporter de l'elfe lui déplaisait au plus haut point : hautaine et fière, comme la plupart des elfes sylvains qu'elle avait pu rencontrer jusque là, une attitude qu'elle méprisait mais qu'elle allait malheureusement devoir supporter si elle voulait que son plan fonctionne.

Le fait que la sylvaine privilégiait le silence aux paroles pompeuses lui convenait donc à merveille.

Elle n'était pas par nature déjà une grande bavarde, se tenant au contraire le plus souvent à l'écart des discussions et des débats, préférant les actes aux mots, solitaire et introvertie, même si elle tendait à rompre avec cet isolement en ayant rejoins l'Irih Altheria.

Cependant tant qu'elle pouvait garder le silence et rester à l'écart de toute agitation, elle le faisait sans hésiter.
C'était une des raisons qui l'avaient décidé à emprunter la voie du druidisme, et c'est pourquoi elle était heureuse de ne pas être obligée de tenir la discussion avec la sylvaine.

Cependant, elle devait encore supporter sa vue et ses manières.
Et cela s'avéra plus compliqué pour la centaure.

En effet, alors qu'elle se débarrassait d'un moustique un peu trop nuisible, un autre sylvain apparu à l'orée des bois et s'approcha de la rousse, visiblement gêné par la nudité de la jeune femme, qui semblait se satisfaire de la confusion que ses atouts provoquaient chez le mâle.
A l'écart, la centaure observait la scène, prise soudain d'un haut-le-cœur. Tout ceci, ce manège et cette comédie, lui donnait la nausée.
Ecœurée, elle détourna le regard afin que son dégoût ne la trahisse pas, mais s'approcha néanmoins du couple tout en restant bien entendu à une distance respectable afin d'entendre leurs échanges, qui portaient à présent sur le korrigan responsable de la disparition des vêtements de la sylvaine.
La druidesse était très intéressée de connaître la manière dont l'elfe s'était prise pour énerver à ce point le petit être.

Elle avait certes déjà entendu dire que les korrigans faisaient régulièrement des farces aux voyageurs, mais jamais elle n'avait entendu parler de parler de situation aussi… extrême.

Aussi elle restasilencieuse et garda l'oreille tendue afin de connaître les détails de l'histoire. Qui sait, peut-être pourrait-elle tourner à son avantage le mécontentement du korrigan…
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#3
La sylvaine eut un petit sourire, pincé.
Avait-elle le droit de dire de quelle façon elle avait rencontré ce Korrigan et par quelle mégarde elle avait du suivre le chemin traverssant les palissades du Royaume d'Andoras ? Allait-elle devoir raconter comment elle avait fuit le danger, et comment six skilithes avaient pisté sa trace jusqu'à temps qu'elle ne rejoigne sa forêt natale ?
Elle observa Olibrius, et sembla en conclure quelque chose : on ne la croirait pas.

Avec son air fière, cet air qu'ont les lionnes qui reviennent de chasse, la rousse jeta un regard à la centauresse qui traînait derrière eux. Si elle était aussi druide qu'elle, elle était de moindre confiance que Olibrius. Le regard émeraude de la druidesse s'attardait sur les courbes de la biche, sans faire vraiment attention, elle réfléchissait davantage à ses habits, puis finalement détourna le regard et reprit la conversation avec Olibrius.

« J'ai croisé le Korrigan en ramassant des fleurs de gentianes, près des palissades.
Je devais retrouver un petit anneau magique, mais au retour, j'ai été chassé par deux bandits et un crocodile. Il a cru que je fuyais avec son butin, alors... il a fait de mes habits le sien. »


C'était la seule explication sincère qu'elle pouvait donner.
Yava n'avait pas l'âme mauvaise. C'était certes une guerrière, une battante, de ce genre de tête dure qui ne se brise pas au premier coup de pioche, mais elle n'avait rien d'une furie meurtrière. Elle n'avait jamais tué d'êtres vivants, qu'ils fussent nains ou elfes comme centaures. Elle respectait la vie, et semblait croire que tout le monde avait une place ici bas. Même si parfois, elle doutait.

« Je me dépêche jusqu'au village.
Je te rendrais ta cape sitôt fait. A moins que tu veuilles la récupérer dès maintenant? »


Elle était calme.
Elle n'avait pas besoin d'être nue pour être fière. Elle l'était naturellement. D'une fierté de chêne, implacable et droit. C'était cette fierté qui s'incarnait en elle, cette fierté de gardien de la forêt. Elle était droite dans ses bottes, et rien qu'à marcher au milieu de la plaine, la crinière en arrière, ça se voyait.
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#4
La centaure marchait au milieu des vastes plaines de Karios, suivant la sylvaine qui se dandinait fièrement en face d'elle, réfléchissant toujours à un moyen d'apprendre son nom sans réveiller ses soupçons, et songeant également à sa mésaventure avec le korrigan.
Elle ne croyait pas l'histoire de l'elfe à propos du petit être.
Non pas parce que celle-ci comportait des incohérences, mais parce que pour la druidesse, les sylvains mentaient par nature, et ignoraient ce qu'était la sincérité et l'honnêteté.

Aussi était-elle persuadée, à tort ou à raison, que l'elfe dissimulait quelque chose... Mais quoi ?
Elle se devait de le découvrir sans éveiller l'attention et la méfiance de la sylvaine.

En attendant, elle décida de suivre cette dernière jusqu'au village abandonné afin de l'aider à retrouver ses vêtements et ce afin de gagner sa confiance.
Déambulant à travers les ruines, mal à l'aise, et se rappelant de son aventure dans les sous-sols du village où le mage renégat Nahgoth complotait jadis avec les forces démoniaques, la centaure chercha du regard les habits de l'elfe, pressée de quitter ces lieux sinistres et de regagner sa précieuse forêt au plus vite.

Cependant, du moins à première vu, il ne semblait ne rien avoir qui ressemblait à des frasques elfiques, aussi s'approchant de la sylvaine, elle dit, reprenant la parole après une longue période de silence:

-Êtes-vous sûre que vos vêtements se trouvent ici ?
Si le korrigan qui vous a dépouillé souhaitait récupérer l'anneau que vous lui deviez, il a sans doute prit et gardé avec lui vos affaires en même temps que son dû.
Si vous savez où le trouver, pourquoi n'allez-vous pas directement le voir pour lui demander de vous rendre vos affaires ?
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#5
La route ne fut pas longue. Deux fois le soleil se coucha, avant que Yava et la centaure n'arrivent à l'orée du village.
Ce dernier n'était plus que des ruines, des morceaux de pierre tenant comme par magie. La rousse approcha, prudente. Elle n'aimait pas cet endroit. Il ne lui faisait pas peur, mais elle se sentait pas à l'aise. Ici, Halista avait abandonné le combat. Même les fleurs ne poussaient pas sur le sol qui ressemblait davantage à un tas de cendre qu'à un parterre. Les mauvaises herbes, aussi, avaient abandonné l'espoir de s'épanouir.

Elle regarda autour d'elle, cherchant aux pieds des bâtiments ou dans les charpentes apparentes des anciens bâtiments détruits quelque chose, un endroit, un lambeau de tissu même lui aurait suffit, mais rien. Il n'y avait strictement rien. Elle soupira.

La lassitude la guettait, mais quelque part, elle savait : Halista ne l'abandonnerait pas, pas ce soir.

Elle releva le nez quand la centaure reprit leur discussion.
Depuis Karios, elle l'avait suivi en silence, comme si elle l'observait. Yava n'avait rien dit. Elle n'aimait pas parler en générale, et le fait que la centaure ne lui demande rien, quelque part, l'arrangeait. Avec un nom comme le sien, on avait vite fait d'apprendre à se taire sur ses origines, et surtout sur sa famille.

« Je ne pense pas. Il n'avait l'air que de s'intéresser à l'anneau... comme... comme s'il en était obsédé. »

La rousse marqua une pause, fronça doucement les sourcils.

« Il a parlé de boue. De me rouler dans la... »

La lumière sembla éclairer son esprit.
Se rouler dans la boue ! Quel autre animal que le porc pouvait se vautrer dans la crasse et en être fier ?

La rousse s'éloigna et se rapprocha vivement de la petite ferme, avec un sourire heureux. Elle en était sûr, c'était là-bas qu'elle les trouverait. Elle passa la porte sortie de ses gonds. Ses yeux glissèrent sur la scène. L'intérieur était détruit, le bois éclaté et rompu tenait sans doute par magie - mais quelle magie, ça...

Elle fit une petite grimace et avança entre les ruines, faisant attention de ne pas se prendre les pieds dans les détritus sur le sol. Elle s'approcha de grands bacs, qui avaient jadis été sans doute des enclos à cochons. Elle passa agilement par dessus la barrière, la cape claquant sur ses mollets quand ses pieds retombèrent sur le sol, dans un petit choc sec.

Elle se pencha, et plongea sans gêne, et sans honte, ses doigts dans la crasse.
Elle chercha de longues minutes, silencieuse, concentrée.
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#6
Paysan haut-elfe a écrit :Yava fouillait depuis maintenant de longues minutes cette fange porcine. L'odeur était des plus désagréables mais elle ne sourcillait presque pas, ne montrant quasiment aucun signe de dégoût à ceux qui l'entourait.

Désespérant de ne rien trouver, elle s'apprêta à repartir, pleine de frustration devant ce nouvel échec lorsque qu'un paysan haut-elfe sorti de la bâtisse en ruine qui servait d'habitation aux fermiers de cet endroit. Le village n'avait finalement pas l'air si abandonné qu'on ne pouvait le penser dans un premier temps...

Son regard lorgnait vicieusement sur la sylvaine. Ils n'étaient peut-être pas de la même race mais d'assez proches cousins que pour que le corps si peu vêtu de la rousse ne le laisse indifférent. La cape cachait certes une bonne partie de sa nudité mais ses formes se laissaient sans peine deviner à travers le fin tissu.

La voyant, bras recouverts de boue et d'excréments porcins, et dégageant maintenant une impressionnante odeur de décomposition et de matières fécales, il ne prit aucun soin pour cacher le rictus qui lui venait aux lèvres. Puis il éclata complètement de rire mais gardant toujours son regard sur elle, espérant apercevoir un peu plus de chair pour se rincer l'œil.

- He ben m'a p'tite dame, vous semblez dans une bien drôle de situation à fouiller mes étables avec une telle ardeur. Ca fait un moment que j'vous r'gardais par ma fenêtre en me d'mandant c'que vous foutiez à retourner la fange comme ça. Z'avez perdu quelque chose? Vos vêtements peut-être même au vu de votre... "costume"? Ca tomberait plutôt bien vu c'que j'ai moi-même trouvé la d'dans hier.

Laissant planer un peu de mystère avec une forte envie que cette conversation avec cette magnifique créature des bois ne s'achève, il préféra se taire et laisser son interlocutrice demander elle-même "mais quoi donc?". Son rictus se transforma alors en un sourire édenté, un peu effrayant et dégageant une désagréable impression. Certainement encore plus désagréable que la puanteur qui imprégnait le nez de Yava...
La rousse sembla sentir comme un léger frisson. Non pas celui du dégoût, mais celui de l'appréhension. Elle avait la désagréable sensation qu'en plus d'être épiée, ce n'était pas non plus pour de bonnes attentions. Elle fronça doucement les sourcils mais se détendit en voyant qu'il ne s'agissait que d'un paysan. Ses lèvres se pincèrent et elle le toisa comme il la regardant, sans rougir sous son regard.

Comme déjà dit, elle n'avait pas à rougir de quoi que ce soit, et surtout pas des pensées d'un paysan édenté. Elle ne le quitta pas du regard. Comme un animal, elle avait appris à ne jamais tourner le dos à un autre qu'elle, pas avant qu'il ne gagne sa confiance, et le paysan ne l'aurait sans doute jamais.

« Vous les avez trouvés? Mes vêtements? Mon bâton? » Elle marqua une pause, dubitative.
Est-ce qu'elle devait, ou non, croire un haut-elfe ? Il avait tout l'air d'un haut-elfe. Jusqu'au sourire.
« Si ces vêtements sont bien les miens, pourrais-je les avoir...? »

Elle était à un bon pas de lui. Elle ne voulait pas paraître pressée, mais la cape de ce bon Olibrius ne la protégeait pas du froid et des ronces sur le sol. Retrouver le confort de son armure et de ses bottes, voilà ce qu'elle voulait.
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#7
Paysan vicieux a écrit :- P'têt ben qu'oui, p'têt ben qu'non... Ca r'ssemblait à quoi c'que vous'vez perdu mam'selle?

Le fermier s'amusait de voir la petite rouquine soutenir son regard : il n'en avait cure.

Il avait toutes les cartes en main et ce n'est pas l'ire de ses yeux qui l'empêcherait de chercher le moindre petit morceau de chair dépassant de la cape.

Son sourire s'agrandit encore, révélant de plus en plus de trous remplaçant des dents supposées.
Elle fronça les sourcils, remontée.
Alors ça, c'était la meilleure! En plus de tomber sur un horrible édenté, il était aussi bête que ses pieds crasseux de hob... nains. Elle remonta une mèche, un peu revêche.

« Des vêtements ça ressemblent à des vêtements. Du tissu.
Une armure, une arme, des bottes. Que sais-je! Des vêtements nom d'Halista! »


Elle rouvrit ses yeux vert d'émeraude sur le paysan.
Celui-ci ne l'avait pas lâché d'un pouce, de son regard gluant. Ça avait quelque chose de visqueux, de dérangeant. Elle se racla la gorge.

« Je vous dérange sinon?
Vous voulez pas non plus une longue-vue? »


Elle posa ses mains sur ses hanches, un sourcil haut.
Non mais franchement...

Paysan vicieux a écrit :Son sourire disparu. Il abaissa de manière menaçante sa fourche vers la rouquine et dit :

- P'têt que si t'enl'vais ta cape, j'pourrais m'souv'nir si ceux qu'j'ai trouvé sont à ta taille, gamine...

Cet ignoble individu semblait, en plus de toutes ses autres tares, dangereux.

Yava tombait décidément de Charybde en Scylla.
L'œil de la rouquine brilla d'une sinistre lueur.
Si on s'approchait davantage de sa pupille d'émeraude, on aurait pu y voir parfaitement la flamme qui jadis avait habité les yeux de son père lorsqu'il avait posé les mains sur le Grimoire des Kel'Therym, et qui plus tard avait ravagé le corps de sa mère, penchée sur l'Erion, le cœur arraché.

Son avancée près de Nagoth, le simple fait d'avoir tenu de la médénite entre ses doigts, et le fait d'avoir trouvé, au détour d'un sentier, les pages d'un grimoire nain, tout ça avait échauffé en elle quelque chose qui, longtemps, avait été endormi.
Quelque chose de terrible.

A ses pieds, la cendre sembla fleurir.
Sembla. Les quelques fleurs qui poussèrent fanèrent sitôt la terre noire dépassée.

« Tu as visiblement la mémoire courte... »

Un petit ricanement inhumain remonta le long de sa gorge.
Elle leva sa main, délicate. La cape dansa, dévoilant une hanche, blanche et fine.

Le paysan ne pu pas la regarder plus longtemps cependant.

La druidesse l'attaqua. Des racines sortirent du sol, des racines mortes et calcinées. Les premières n'eurent aucun effet, quand d'autres frappèrent le paysan aux chevilles.

La druidesse cilla. Ses sorts n'avaient pas tous l'effet escompté.
Cette magie est étrange... Qu'importe.
Un petit rictus remonta sur ses lèvres.

Yava ne semblait plus vraiment être Yava.

« ... veux-tu que je te la rafraîchisse? »
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#8
Paysan pervers a écrit :Le paysan avait la magie dans le sang car il tenait ses origines d'une lignée de mages, même si lui même ne savait s'en servir. Cela lui permit d'empêcher les sorts de la rousse de le frapper de plein fouet. Mais lorsqu'une centaure sortie de nul part lui envoya une nouvelle salve, il ne pu résister plus longtemps.

La quadrupède l'avait maudit d'un sortilège qu'il ne connaissait pas alors qu'il s'apprêtait à riposter d'un coup de fourche bien placé dans l'estomac de la sylvaine. A peine le flux magique avait-il touché le fermier que celui-ci senti sa peau se rider, ses os devenir poreux, ses articulations douloureuses... Il avait vieilli de plusieurs centaines d'années elfiques en quelques secondes.

Regardant ses mains désormais plissées comme de vieux parchemins, ses yeux s'agrandirent de stupeur... et de terreur !

- Mais... Mais... Qu'est-c'que vous m'avez fait?!? Mon si beau visage ! Diablesses ! Sorcières !!!

Des larmes de peur se formèrent aux coins de ses yeux.

- J'vous rendrai vos vêtements mais par Fryelund, rendez moi mon visage ! Tenez, voici tout c'que j'ai r'trouvé, j'n'ai rien gardé. J'vous en supplie, demain aura lieu l'bal des fermières et des cochons, j'ne peux point y aller comme ça. Toutes les filles m'attendent alors faites moi r'venir à ma beauté naturelle, j'vous en prie !
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#9
Ne supportant la vision de l'elfe pataugeant dans la fange (ou bien ne supportant pas l'elfe tout court), la centaure décida de s'éloigner pour sortir de ce village à première vue désert.

Mais alors qu'elle ruminait silencieusement sur la stupidité sylvaine, elle ne vit pas le trou devant elle et chuta... Sans trop de dégâts heureusement.

Se redressant avec difficultés tout pestant contre sa maladresse et son inattention, et espérant que l'elfe était trop occupée à chercher dans la boue pour l'avoir vu, la druidesse sonda la pénombre qui l'entourait à présent.
Elle reconnaissait ces lieux : elle se trouvait dans les souterrains du village, où se trouvait, un peu plus loin et profond, la forge du sorcier maléfique Nagoth.
Il était hors de question d'y retourner, sans compter que la salle avait été condamnée par les nains.
Aussi regarda-t-elle la sortie avec appréhension.
Remonter ne serait pas aisé, surtout avec sa constitution… Mais elle ne souhaitait pas laisser une occasion à la sylvaine de lui filer entre les mains.
De plus, lui parvenait d'en haut des voix… Elle reconnu celle de la sylvaine, mais ne parvint pas à identifier l'autre, une voix masculine et tendancieuse.
La centaure ignorait de qui il s'agissait, mais une chose était sûre même si elle n‘arrivait pas à comprendre ce qui se disait : le ton montait et devenait agressif.
Afiralia se dépêcha donc de sortir du mieux qu'elle pu, glissant contre les parois, pour sortir à l'air libre. Non pas qu'elle se souciait de la sécurité de la sylvaine, mais elle voulait que sa mort soit de son fait afin qu'Aletheria soit véritablement vengé.

Après de multiples efforts acharnés et échecs répétés, la centaure parvint à sortir, essoufflée, dans une position plus que pitoyable et gênante… Mais heureusement elle était assez loin du lieu de la discussion pour qu'on la surprenne.
Ce remettant sur ses quatre sabots, la centaure trotta jusqu'au centre du village… Pour voir la sylvaine peinant face à un paysan Haut-Elfe qui la menaçait d'une fourche rouillée.
Visiblement, ce dernier possédait les affaires de la rousse mais ne souhaitait pas lui rendre.

La centaure resta quelques secondes silencieuses et à l'écart, se demandant si elle devait intervenir, et si oui dans quel sens… Devait-elle aider la sylvaine ou bien prêter main forte au paysan pour qu'il tue l'effrontée qui avait osée vexer sa déesse ?
Après un bref instant de réflexion, elle arriva à la conclusion que personne n'arriverait à croire qu'un paysan puisse venir à bout d'un archidruide sans aide, aussi décida-t-elle de suivre son plan initial, c'est-à-dire : s'attirer la sympathie de la sylvaine.
Afiralia sortit de sa cachette et s'avança, incantant dans sa langue natale.
Immédiatement la peau du Haut-Elfe se flétrit, ses cheveux grisonnèrent, son dos se voûta… L'elfe vieillissait à vue d'œil.

Elle accéléra le processus avec un sort supplémentaire. L'elfe était à présent sur le sol, vieillard impuissant, gémissant et implorant sa pitié.

Sans une once de remord, la centaure s'approcha du misérable, le saisis par la gorge d'une main ferme et le souleva jusqu'à sa hauteur. Elle n'était certes pas guerrière et n'avait ainsi jamais eu à développer sa force physique, cependant les centaures possédaient une force naturelle importante. De plus, le paysan n'était plus qu'un bout de chair séché, aussi léger et friable que du parchemin.

Resserrant son emprise sur la gorge du malheureux tout en le transperçant de son regard noir, elle dit d'une voix glaciale :
-Rendez à cette elfe ses affaires, avant que je vous fasse subir un sort pire que la mort.
Sur ces mots, elle jeta sans douceur l'individu sur le sol.

Le haut-elfe, terrorisé, s'exécuta, et rendit à la sylvaine ses affaires… Qui sans un mot, après avoir récupéré ses biens, exécuta l'homme sans un mot.

La centaure resta figée, choquée par une telle réaction : certes elle avait malmené le paysan, mais jamais elle n'avait souhaité sa mort.
Elle n'avais pas entendu le début de la conversation, mais de ce qu'elle avait pu saisir et voir, l'individu quoi que détestable, n'avait commis aucun crime, du moins pas à sa connaissance.

Aussi, bouleversée, balbutia-t-elle à la rousse vengeuse :
Il vous a rendu vos vêtements… Alors pourquoi l'avoir tué ?
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#10
Ce corps est étrange.
Je me sens... légère.


Les yeux d'émeraude de la jeune fille se posèrent sur l'homme qui vieillissait à vue d'œil. D'un paysan peu ragoûtant, il était passé à la vieille carcasse des hommes presque morts. Elle ne cilla pas. Elle n'avait jamais vu cette magie à l'œuvre avant aujourd'hui, mais elle avait cette impression de déjà vue. Quelque chose n'allait pas, mais elle ne savait pas encore quoi.

L'homme eut la plus naturelle des réactions et paniqua.
Tu peux bien supplier ou prier, ça ne te rendra rien.
Et surtout pas ta sale figure de rat.


La rousse l'observa et eut un sourire en coin, mauvaise, comme il lui tendait, les bras tremblants, ses vêtements. La centaure attrapa le pauvre paysan par le col de sa chemise et le souleva sans mal pour mieux le menacer encore. La sylvaine détacha de ses épaules la cape du jeune Olibrius.

Elle passa sur elle une fine chemise de lin, sur laquelle elle enfila son armure des tertres. Elle sentit aussitôt la magie d'Halista grandir, et il lui semblait que l'herbe sous ses pieds lui parlait de nouveau. Elle eut un sourire satisfait, et remit autour de ses poignets son bracelet d'or. Elle remit sur sa tête un diadème de sagesse. Sa tignasse rouge feu ressortait particulièrement derrière le métal qui formait le diadème.
Quand elle attrapa le bâton de buis qui lui servait d'appuis et d'arme à la fois, les pierres bleutées de son bracelet se mirent à briller. Elle retrouvait enfin sa force perdue, et cette fierté toute guerrière.

Ses yeux glissèrent sur le paysan qui retombait sur le sol, misérable.
Il tremblait, en pleurs.
Il faisait pitié.

Faisait.

« Tu ne verras pas demain.
D'ailleurs, tu ne verras plus jamais rien. »


La druidesse fixait d'un œil sombre et sinistre le haut-elfe. Il avait beau être vieux et vulnérable, l'honneur s'arrêtait à celui de l'adversaire. Si ce dernier n'en avait pas, alors elle n'en aurait pas en retour. Elle leva la main, et sans même le toucher, les feuilles s'envolèrent et vinrent lacérer profondément la peau. Ici et là des épines de roses semblèrent elles aussi en vouloir au pauvre paysan qui tomba sur le sol. Le courroux de la nature, la rancœur d'Halista s'insinua plus loin dans le sol sous la seule volonté de la rousse : les racines sortirent du sol et s'enroulèrent autour du corps du paysan.
Il était déjà à l'agonie. Il était presque mort. Un seul coup suffirait à le tuer.
Un seul.

« Au bal de demain, c'est un cochon avec un masque d'homme qui aurait du s'y rendre.
Mais les fermières devront se trouver un autre mâle, parce que les cochons, moi, je les égorge. »


Une flèche surnaturelle fila dans les airs et se planta brutalement dans la gorge du paysan.
Son corps se tendit, il commença à convulser. Ses yeux se remplirent de larmes. Sans doute aurait-il voulu parler. Ou respirer. Mais ni l'un ni l'autre n'était possible. Il ouvrit la bouche, pour rendre dans un gargouillis dégueulasse son dernier souffle, et l'âme de porc vivant dans son corps s'échappa.

De là où elle se tenait, elle sentait parfaitement l'âcre odeur, mélange d'urine et d'excréments, qui se dégageait du cadavre.
C'était beaucoup trop rapide.

Elle reposa ses yeux sur la centaure. Ses yeux d'émeraude brillaient.

« Il vous a rendu vos vêtements… Alors pourquoi l'avoir tué ? »

Un long silence s'en suivi. La sylvaine ne semblait pas comprendre. Elle-même ignorait pourquoi elle l'avait tuée.
Par pure vengeance? Par pure folie? Une idée venait d'apparaître, quelque chose d'impensable cependant.
Et si... et si ça avait été... par plaisir?

Elle ravala sa salive, difficilement.

« Il m'a menacé d'une fourche. Pour que je me déshabille devant lui.
Heureusement tu étais là. Mais combien d'autres femmes se seraient faites prendre dans son piège ? »


Elle soupira, regardant le corps. Il avait eut une mort douloureuse oui, mais rapide. C'était au moins ça.

« Un tel individus est un danger. Il devait mourir. »

Aucune pitié. Aucune.
Elle repoussa sur ses épaules sa chevelure rousse et remit sur son dos son sac.
Maintenant... Il lui restait tant de chose à faire.

« J'ai une cape à rendre, ensuite je partirais vers Mitriath.
Nos routes se séparent ici, il me semble.
Ce fut un honneur et un plaisir. »


La rousse, fière, droite dans ses bottes, affichait un petit sourire calme.
Mais quelque part à l'intérieur, quelque chose avait changé.
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#11
Afiralia ne savait que penser des paroles de l'elfe.

Son discours était rempli d'incohérences et de propos absurdes aux oreilles de la centaure.
Ainsi elle avait tué cet homme parce qu'il voulait simplement la voir nue alors que depuis plusieurs jours elle se dandinait, fière comme une poule et sans gène, se délectant de la confusion qu'elle semait dans l'esprit des mâles de son peuple, leur faisant bien profiter de la vue et leur permettant de se rincer l'œil… Et là, elle tuait sans remord celui qui était rentré dans son petit jeu pervers.

La mort du paysan lui faisait en soi peu d'effets, mais le comportement de la sylvaine en revanche, accentuait le mépris et la haine qu'elle avait pour cette race.

Décidément les elfes sylvains étaient des êtres définitivement et profondément pervers et dangereux, qui n'hésitaient pas à tuer pour leur plaisir.
Par cela, ils étaient pareils voir pire que les Haut-Elfes.

Mais ce n'était pas le moment pour démontrer une fois de plus la vanité et la cruauté de ce maudit peuple.

La sylvaine s'apprêtait à partir, et elle était impuissante, car elle n'avait aucun arguments valables pour la faire rester.
Elle n'avait de choix que de la laisser partir et d'espérer la revoir un jour... Afin de mettre fin à ces jours.

Mais avant cela, elle devait savoir une chose.

Répondant à l'elfe, feignant à peine la déception, elle dit:

-J'espère que nos chemins se recroiseront bientôt.
En fait, nous ne nous sommes jamais présentés... Je me nomme Afiralia.
Et vous ?
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#12
La rousse regardait la centauresse.
Quelque chose clochait, mais étrangement, elle n'arrivait pas à y réfléchir. Quelque chose en elle guidait ses doigts, qui parcouraient sa ceinture, comme si elle avait voulu la resserrer. Ses yeux d'émeraude, eux, étaient fixes, observant et détaillant ce corps de biche. Afiralia, donc. Afiralia était belle. Belle mais dangereuse. Ça se sentait.

Un petit sourire glissa sur ses lèvres fines.

« Il y a des choses qu'il vaut mieux ignorer... »

Yava recula d'un pas. Sa chevelure ondulée. Une mèche de cheveux noire avait fait son apparition entre ses boucles hirsutes. Elle jaugea de nouveau la centaure, avant de reprendre :

« Mais vous m'avez aidée, et en cela je vous dois bien quelque chose en retour.
Yavannamírë Kel'Therym est mon nom. »


Celui qui sait ton nom a une arme contre toi.
C'est ce que disait son père. Elle le savait, mais pour une fois, elle ferait confiance.

Elle eut un dernier sourire, la salua et se détourna complètement de la centauresse.
Après avoir fermé les yeux, son corps entier se crispa pour se détendre. Ses membres s'allongèrent, craquèrent, et son corps entier se transforma pour prendre l'apparence d'une biche magnifique, haute sur ses jambes et pleine de grâce. Ses yeux d'émeraude pétillaient, et on y reconnaissait vaguement l'elfe sylvaine qu'il y avait à l'intérieur de ce corps animal. Sa tête était ornée de deux jolies oreilles couleur de flamme, sauf une petite partie. Un bout de son oreille était noir à présent, frappant sa robe presque unie d'une nouveauté qu'elle-même n'avait pas vu.

Un dernier regard à la centaure en guise d'au revoir, et la biche frappa de ses sabots le sol pour partir en quatre, puis cinq bonds puissants et longs, disparaissant dans la forêt, à la recherche d'Olibrius.
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