En mémoire d'un père
#1
En souvenir d'un père


Je me souviens... de longs cheveux noirs et d'une haute stature.
Je me souviens d'un bras puissant et du chant d'une épée.
Je me souviens d'un regard fier et d'un sourire apaisant.
Je me souviens d'une présence calme et rassurante...
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Je me souviens des sanglots de ma mère blottie dans les bras d'une ombre.
Je me souviens de mon père embrassant le ventre rebondit de sa femme.
Je me souviens d'une étreinte.
Etreinte d'un homme que j'ai à peine connu, remplie de tendresse, d'amour et de peur.
Je me souviens d'une silhouette qui part vers le couchant.
Je ne me souviens pas l'avoir jamais revue....


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Je me souviens des cris d'alarme, je me souviens des cris de peur, je me souviens des cris de guerre. Du sifflement des flèches et du fracas des armes.
Je me souviens des pleurs de ma sœur, de l'étreinte de ma mère, de la noirceur de la cave et du bruit sourd des batailles.
Je me souviens de la peur et des larmes, de la mort et du sang, des ruines et des tombes.
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Je me souviens de nuits noires, peuplées de cauchemars sans la présence rassurante d'un père.
Je me souviens de nuits d'angoisse, où le sommeil me fuit, chassé par les sanglots de ma mère.
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Je me souviens de journées de labeur à retourner la terre, à fendre les bûches, à aiguiser l'acier, à remuer ciel et terre pour une simple pièce.
Je me souviens de la faim qui me tiraille le ventre, qui alourdit mes pas, qui me vide de mes forces.
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Je me souviens d'une question à laquelle seul répond le silence..... "Ou est papa?"...
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Je me souviens de ces rêves où il était là, revenu d'une contrée inconnue. Je me souviens du sourire de ma mère quand il la serrait contre lui, du rire de ma sœur quand il la portait dans ses bras, de cette allégresse quand il m ébouriffait les cheveux, posant sur moi un regard plein de fierté.

Je me souviens de ces réveils angoissés qui me ramènent désespéré à la douloureuse vérité. De se vide rempli durant quelques heures irréelles, qui s'ouvre comme un gouffre béant dans mon cœur.

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Je me souviens d'une longue marche à travers des bois enchanteurs, de l'exode sans fin d'un peuple qui a tant perdu, de la lassitude de mes pieds, de la douleur de mon dos, de la fatigue et de la peur.
Je me souviens du regard hagard de mes frères, du désespoir de leurs yeux, de la crainte sûr leurs visages, de l'incertitude de leurs pas.
Je me souviens du poids d'une épée, seule défense contre l'inconnu de la forêt, seule protection pour ma famille, celle qu'un père aurait du assurer.
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Je me souviens avoir haïe cet homme qui faisait pleurer ma mère, qui n'a jamais été là pour ma sœur. Cet homme que j'ai du remplacer durant toute ma vie. Cet homme qui nous a laissé derrière lui et dont l'absence a été si dure à surmonter.
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Mais je me souviens aussi d'une boîte.
Une boîte pleine de lettres, papiers rugueux où courraient de fins arabesques d'encre noire.
Je me souviens y avoir lu la peur face à ces géants bleus.
Je me souviens y avoir lu l'amour pour sa femme qu'il avait du laisser pour sa partie.
Je me souviens y avoir lu la douleur et l'inquiétude d'un père qui n'a jamais vu sa fille.
Je me souviens y avoir lu la tristesse d'un père qui n'apprendra rien à son fils, mais aussi la fierté de savoir quel brave homme il était devenu.
Je me souviens y avoir lu la colère d'un homme retenu loin de sa famille.
Je me souviens y avoir lu l'impuissance et la honte de celui qui ne peut protéger ceux qui lui sont le plus cher.


Je me souviens avoir pleuré toutes les larmes de mon corps en lisant ces lettres.
Lettres d'un mari arraché à sa femme, d'un père enlevé à ses enfants, d'homme à qui on a pris sa fierté.
Lettres d'un homme mort loin des siens, pour protéger les hautes instances responsables de sa souffrance de son cœur meurtri.


Je me souviens de la haine, de la colère et de la rage, contre mes "frères" qui m'ont volé mon père, responsables de sa souffrance et de son absence. De ces êtres égoïstes qui nous ont tant pris avant de nous abandonner.
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A travers ces lettres, je me souviens avoir aimé mon père, l'avoir respecté. Pendant des années j'ai rejeté la voie des armes pour ne pas finir comme lui. Aujourd'hui je sais qu'il pensait nous protéger. Aujourd'hui je me sens fier d'avoir été à sa hauteur. Aujourd'hui je sais qu'il était une victime. Aujourd'hui je me demande qui de nous deux a le plus souffert.

Maintenant que ma sœur s'est trouvé un bon mari, ma mère peut subvenir seule à ses besoins. Et je peux enfin te suivre sur la voie du devoir, le cœur léger, exempt du moindre doute, protéger cette forêt qui nous abrite. Pour que jamais plus aucun enfant n'ait à grandir sans son père. Pour que jamais plus aucune femme n'ai à regardé partir son mari.

Père, si tu vis en moi comme ton sang coule dans mes veines, je te rendrais ta fierté.

Car ce soir un hurlement a déchiré la nuit. Ce soir toute la forêt vibre sur la même nôte, du murmure des arbres au chant de la Loreline, du souffle de l'herbe au craquement de l'écorce.
Car ce soir je suis devant l'hôtel d'Halista, et je ne suis pas seul....


-Alereth....

Moi Nashi, mage de Mitriath, vous demande humblement de me laisser marcher à vos côtés pour protéger la forêt de Pelethor.

Laissez-moi rejoindre les Loups d'Halista et je jure de défendre le peuple des forêts, nos fils et nos filles, nos femmes et nos mères envers et contre tout.

Laissez ma magie aiguiser vos crocs.

Sur ces mots, je m'agenouille devant Alereth.

-Soit. Les Loups ont été affaiblis par tant d'épreuves par le passé que nous allons avoir du pain sur la planche. Et j'ai affreusement besoin de seconds compétents.
Peut-être un jour, le deviendras-tu.
Mais pour le moment, je t'accepte.


En finissant sa phrase, Alereth tend sa main vers moi.

-Allons, relève-toi. Je n'ai aucunement besoin de combattant à genoux.

Saisissant la main qui m'est offerte, je me relève, fait face à Alereth et le regarde dans les yeux.

-Si je m'en montre digne ce sera un honneur pour moi d'être votre second.

Je pose ma main droite sur mon cœur et incline légèrement la tête

-Ma magie est votre.

.....
...
..
.

Car ce soir je suis un Loup.
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