Ataraxie.
#1
Sans tort et sans reproche

L'affiche indiquait, sous l'illustration enluminée d'une armada surfaite : « Au second jour des pluies, dans le port d'Asteras, appareillera l'expédition de la Vasque-Soleil. Venez nombreux assister au départ de nos vaillants explorateurs, les saluer et les encourager dans... »
le reste était caché par un avis officiel titré « Liste des exécutions » qui énonçait
« Second jour des pluies, Bulkin Noirtunnel, condamné à la décapitation à la hache, pour avoir violé le Traité de Passivité.
Troisième jour des pluies, Terond Valcë, condamné à la pendaison pour larcins divers dont meurtre.
Cinquième jour des pluies, Lynn Othmehtenyë, condamnée au bûcher pour pratique illégale de la sorcellerie et prostitution
. »

Isilgath arrêta là sa lecture et s'apprêtait à entrer dans l'auberge lorsqu'il fut interpellé par un nobliau souriant, qui était lui en train d'en sortir, et avait visiblement bien fait marcher les affaires vu son état de gaîté. A y regarder de plus près, il ne devait pas être noble, mais était vêtu d'habits qui laissaient deviner une aisance récente et semblait plus instruit que la moyenne des clients de l'établissement. L'inconnu arborait un sourire de vieux copain d'enfance.

- Ca va être chouette, qu'est ce que tu en penses ?
- Le bûcher?
- La vasque ! Ils vont ramener plein de choses, ça fait un bail qu'il n'y a plus personne qui a eu le courage d'aller suffisamment loin pour qu'on ait du neuf !


Ne pas répondre, entrer dans l'établissement, boire un verre et oublier aurait été un choix simple et judicieux, mais Isilgath Abesaën se supportait pas qu'un inconnu le tutoie, et surtout, ne supportait pas la critique, même si celle-ci était présentement involontaire et que l'olibrius ne pensait pas à mal. Il objecta de manière aimable – ce qui n'était pas dans son habitude - à l'elfe éméché :

- Pour votre information, je revenais il y a à peine quelques jours d'une mission qui a fait route bien au delà des collines sanglantes, j'y ai vu des centaures et ...
- Ha ha ha ! Un « fabulataure » ! On va rire... Jamais réussi a digérer les centaures. Le porc, ça va, mais le steak, très peu pour moi.


Le rire moqueur ébranla les murs voisins. Mais pas le stoïcisme du narrateur qui confirma :
- J'y ai vu des centaures et j'ai...

A nouveau Isilgath fut interrompu par l'elfe qui pointa son doigt vers le ciel et le remua comme pour faire la leçon à un garçon indiscipliné. L'existence des centaures était encore un mythe très peu accepté dans la populace d'Asteras, qui avait trouvé ce sobriquet pour qualifier les premiers explorateurs a oser affirmer les avoir observés.

- Je ne crois pas une seconde qu'une telle abération puisse exister. C'est un mythe, une histoire inventée par un tavernier bourré à l'asteris. Ou alors si vraiment il y en a un, il a été cousu par un gros sortilège, après avoir pris un morceau de bourrique et un demi cadavre de nain. Je ne crois surtout pas qu'ils puissent se reproduire. Son petiot à la jumentaure, il téterait en bas ou en haut ? Je serais lui, je préférerai en haut !

Sa réflexion ne fit rire que lui. Mais il parvint à retrouver son sérieux pour écouter l'argument suivant.

- Ils sont une civilisation entière et organisée avec des mâles et ...
- Ca tient pas la route. Imagine, avec une bouche d'elfe, nourrir un corps de cheval. En plus ça mangerait quoi ? Moitié barbac pour la partie du haut, moitié herbe pour le bas ? Et une carotte quand il est gentil ?

A nouveau, le sérieux était parti au galop, surtout lorsqu'il poursuivit. La vinasse qu'il avait ingurgité semblant attiser sa verve naturelle, il ne laissa pas un seul moment de silence.

...remarque, ce serait utile ce genre de bestiole, il y aurait plein d'avantages.
Il peut se harnacher seul pour débarder, il peut faire son champ d'avoine lui même,
et en plus, en même temps qu'il tire sa charrue, il peut fumer son champ !

Il s'arrêta pour rire, seul, de sa propre blague, avant de poursuivre.
Je n'te parle même pas de leurs roucoulades... ils ont des lits dix places ? Ou ils dorment debout ? Ils font leur câlins comme les chevaux, l'un sur l'autre ?
Déjà qu'il paraît que les nains usent de chèvres pour se soulager, j'ose même pas imaginer l'utilisation que feraient les centaures d'une chaste ânesse.

Il prit l'air totalement sérieux et grave typique d'un professeur.
D'ailleurs techniquement, il n'y aurait pas de problème pour qu'ils couvrent une jument ! Ca donnerait quoi ? Un muletaure ?
A nouveau il éclata d'un grand rire.

Son interlocuteur restait de marbre. Pas même l'ombre d'une lassitude. Il se contenta de répondre :

- Ils ont des huttes dans lesquelles ils vivent, tout comme nous dans nos maisons.
- Et on appelle ça une écurie ? Dans deux minutes tu vas me dire que tu en as vu un grimper à un arbre, à la seule force de ses bras.
Enfin sérieusement, si ça existe, faut que tu m'en amènes un. S'ils sont doué de parole, peut-être qu'il écoutera mieux que mon canasson quand je le monterai. D'ailleurs tant qu'à faire, ramène moi une femelle, au moins je saurais où mettre les mains !

Derechef, son rire roula dans la pénombre.

- Mmh... tu iras la chercher toi-même, bonne nuit.

Il n'y avait aucune marque d'agacement dans sa voix, il semblait en apparence très calme. Il s'apprêta à faire demi-tour et a rentrer chez lui, l'auberge et sa faune ne lui inspirant plus aucune attirance pour ce soir.

- Ouais, c'est ça, fabulataure de mes deux, tu es bien comme les autres, aucun argument, rien a montrer. D'abord je monte sur mes grands centaures et après je me défile dès que je ...

Toute la tension se relâcha en un seul coup, plus rapide qu'une flèche, et la paume de la main projeta l'appendice nasal de l'elfe au fond de son cerveau, ce qui l'empêcha d'articuler convenablement la fin de sa phrase.

- Je ne fuis JAMAIS.

Isilgath avait un gros défaut. Il était relativement colérique. Voire très. Son autre défaut était d'être une machine a tuer. Il n'avait pas réussi a retenir sa main, pourtant nue et sans arme. L'armée n'avait vu en cela que des qualités. Il avait été entraîné à cela, et il excellait si bien dans l'art du combat à main nue qu'il était devenu instructeur en ce domaine au centre d'entraînement militaire.
Elle appréciait aussi une autre de ses qualités : personne ne l'attendait. Orphelin et célibataire, tout ce qu'il connaissait de l'amour était ce qui lui avait été enseigné dans le quartier du port contre quelques pièces.

Et la valeur accordée à ces qualités lui fut une fois encore confirmée quand son supérieur lui dit après un long soupir :

- … Isil. Tu n'me feras pas croire que tu n'as pas fait exprès ou qu'il était trop fragile ou quoi ou caisse. Mais personne ne t'as vu, personne ne s'est plaint, personne n'a même réclamé le corps, alors on va fermer l'oeil pour celle fois. Personne ne va le pleurer de toute manière. Par contre il vaudrait mieux t'éloigner quelques temps. Ça tombe bien, j'ai une mission un peu... particulière...
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#2
Mission : impossible.

Depuis près de trois cent années, Isilgath était au service de l'armée, généralement en tant qu'instructeur à Asteras, parfois occupé en terre hostile par l'une ou l'autre des missions aussi discrètes que sans importance qu'on lui affectait, ainsi qu'à ses compagnons d'arme. Le plus souvent, elles étaient d'une simplicité extrême, aller, tuer, revenir, le dernier point étant optionnel. Puis, avant qu'ils ne gagnent la guerre, était venu le temps des missions contre les Holdars, connues pour être celles où l'on part et dont on ne revient point, et desquelles il était toujours revenu aussi, parfois victorieux, parfois défait, mais toujours vivant et sans avoir jamais fui son devoir. Mais cette fois, ils avaient affaire a un ennemi particulièrement subtil : une tribu d'orcs.

Dans l'imaginaire collectif des elfes, les orcs sont de gros paquets de muscles destinés à agiter un cimeterre, surmonté d'une boite creuse servant à émettre des cris : c'est parce qu'ils les confondent souvent avec les gobelins. La réalité du terrain était toute autre : fins stratèges, possédant des unités d'archers, de magiciens et des combattants hors pair, travaillant de concert dans une organisation digne d'une symphonie, voilà la définition d'une tribu orc. En tout les cas de celle à laquelle ils s'était heurtés. Isilgath n'était pas devin, mais il dû se rendre à l'évidence en regardant les boyaux de ceux qui avait été ses compagnons : sa mission avait échoué.

La masse d'arme qui s'abattit sur son casque de cuir – Isilgath n'était pas adepte du traditionnel casque elfique, trop lourd et trop voyant - lui confirma son intuition.

- Je ne sais rien.

Il s'était réveillé attaché, maintenu debout sur ce qui devait être un couple de poteaux obliques formant une croix, et s'évertuait calmement à répondre après chaque coup de poing ou de pied :

- Je ne sais rien.

Son bourreau, un orc d'une grande taille dont la musculature saillante contrastait fortement avec le prisonnier elfe, connaissait la langue commune et œuvrait seul. Son fort accent orc était pour Isilgath le supplice le moins supportable. La petite cour emmurée était vide, à l'exception d'une table très fruste, parsemée de quelques objets métalliques destinés à la question, d'une plante en pot et d'un sablier. A côté de la table se trouvait aussi un brasero rougeoyant, lui aussi garni d'outils non destinés à la réparation. L'orc en saisi un afin de passer à quelque chose de plus sérieux. Outre la douleur infligée, utiliser une lame brûlante avait l'avantage de cautériser directement la plaie et donc de garder la victime en vie.

Mais les quelques tentatives au fer débouchant sur la même inlassable rengaine, quoique récitée sur un ton un peu plus crispé, le bourreau n'insista pas plus avant et quitta la cour. Il revint si rapidement accompagné de ce qui devait être un chaman, qu'il était presque évident que cela était prévu d'avance. Ils échangèrent quelques propos dans leur langue puis le nouveau venu commença a disposer autour de la croix des encensoirs auxquels il mit le feu.
Lorsqu'il inhala la fumée qu'ils dégageaient, Isigath eut un sentiment d'intense excitation qui lui remontait le long des reins.

Tout devint trouble, et devant lui apparurent des formes qui se mirent à danser... Des ombres confuses, des nuages vaporeux qui peu à peu se condensaient. Des visages féminins, des nymphes ou peut-être des elfes a la voix suave et aux mains expertes qui lui posèrent mille questions dans une langue qu'il ne connaissait pas, et dans laquelle il répondit. Et comme elles avaient éclos, elles s'évanouirent peu à peu.
Son dernier souvenir fut vaguement celui d'une elfe au visage indiscernable qui lui disait :« tu es moi ».

Lorsqu'il reprit enfin ses esprits, il ne restait plus dans la cour que le bourreau, absorbé dans la contemplation de son poignard qui chauffait dans les braises du brasero. Tiré de ses pensées certainement machiavéliques, il déclara au supplicié :

- Nous n'avons plus besoin de toi, mais j'ai préféré attendre ton réveil pour te tuer. J'aime savoir a qui je prend la vie. J'aime les noms. Quel est le tien, elfe ?

L'orc n'avait pas perdu son accent désagréable.

- Isilgath Abesaën... Et toi ?
- Pfuuu ! c'est la première fois qu'un elfe me retourne la question. Puis après un instant d'hésitation et un regard vers le mur derrière Isigath, là où devait certainement se trouver la porte de l'enceinte, il poursuivit :
- Absoreck. Absoreck Durshak. Chez vous ça doit vouloir dire le contraire de miséricordieux. Mais ce n'est pas mon nom de naissance. C'est une longue histoire qui m'a fait mériter ce nom...
- J'ai tout mon temps dit le supplicié, créant chez l'orc un sourire qui découvrit ses canines.

Feignant que de lui avoir raconté son histoire avait fait d'eux deux bons amis, l'orc finit par annoncer :

- Je te propose un jeu, je ne le fais pas avec tous les prisonniers condamnés a mort, mais autant te dire qu'aucun n'a de toute manière jamais gagné. Je te détache, et je te laisse ce sablier d'avance avant de te poursuivre. Il montra le mur qui faisait face à l'elfe. La brèche là-bas dans le mur donne sur le charnier, et... sur l'extérieur. Si tu y arrives avant que je ne te tue, je te laisse regagner ta contrée.

Cela semblait trop beau. Même après la séance de torture, il ne fallait pas a Isilgath plus de quelques secondes pour traverser la petite cour et l'ouverture, propre et carrée, devait bien faire cinq pieds de large. Une fois dans la forêt, il avait toutes ses chances.

- Je n'y crois pas un instant, tu ne tiendras jamais parole.

L'orc prit un air vexé.

- Si si, je tiens parole, mais il y a un détail dont je ne te t'ai pas parlé... tu as un handicap.

Et il trancha consciencieusement de son poignard rougeoyant les ligaments des mains et des pieds du prisonnier, avant de trancher ses liens.

- Alors, tu acceptes le défi ? Allez, rampe ! ordonna t-il à l'elfe qui s'était affalé de tout son long.

Il n'eût pour réponse qu'un murmure.
- Quoi ?
L'elfe murmura encore. L'orc énervé de ne pas comprendre, ou plutôt fâché d'avoir une réponse, alla jusqu'à lui et le retourna d'un coup de pied.
- Quoi ?
A nouveau les lèvres remuèrent, mais plus aucun son ne sortit. Le bourreau se mit a quatre pattes au dessus du blessé et répéta « quoi ? », son oreille a quelques centimètre du visage de l'elfe. Pas de réponse. Lui crachant ses postillons sur le front, il déclara « Hé bien tu as perdu, Isilgath ».
Mais l'orc ne put se relever, Isigath avait jeté son torse en avant d'un coup de rein et mordu à la gorge son persécuteur.

Il serra et ne lâcha point, bien que l'orc, dans un dernier réflexe lui donna un coup bénin de son poignard pour le faire lâcher prise. Le sang avait un goût infect, mais c'était le cadet de ses problèmes.

Quand enfin l'orc ne bougea plus, l'elfe se dégagea, recrachant ce qui devait être l'équivalent d'une pomme d'adam et dit, la bouche dégoulinant d'un sang brun qui n'était pas le sien : Absoreck... Absoreck.

Souvent, il s'était vanté d'être sans cœur, sans pitié, mais en cet orc il avait trouvé son maître.

- Absoreck... Tu as eu tort de me confier ton histoire... Maintenant c'est la mienne...

Puis de la griserie d'avoir réussi l'impossible en tuant son bourreau, il revint peu à peu à l'accablante réalité.

...si je vis.

Mutilé. Impotent. C'était ce qui pouvait lui arriver de pire. Pire que la mort. Il aurait voulut mourir. Mais se donner lui-même cette mort c'était fuir... Il lui vint pour la première fois de sa longue vie l'envie de pleurer. Mais il ne céda pas. Ses membres avaient été tranchés avec une précision chirurgicale au fer rouge, mais le dernier coup de couteau avait été donné avec une lame trop froide, c'était la seule blessure qui n'avait pas été cautérisée, et qui convoquerait cette mort libératrice qu'il désirait maintenant.

Au moins sur une chose l'orc n'avait pas menti : c'était bien une sortie qui donnait directement sur un charnier, puis sur la forêt. Ils ne devaient guère faire de prisonniers.

Il rampa, usant coudes et genoux, laissant sporadiquement derrière lui une fine macule pourpre... Il rampa. Et pas un instant la mort ne voulut de lui.


[Image: hr.png]

[Image: absoreck_calvaire.png]
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#3
La théorie par la pratique.

Nul ne sait par quel miracle, mais c'étaient les elfes qui avaient retrouvé Isilgath Abesaën, et non les orcs. Il ne se souvenait plus de grand chose, a part d'avoir rampé quelques mètres, ou peut-être quelques milliers de mètres, de s'être réveillé dans un lit du corps de garde de Tilador, puis d'avoir été rapatrié en urgence à l'hôpital militaire d'Asteras.

On l'avait cru fou, lorsqu'il avait annoncé son nom. Mais comme il persistait, l'administration plia.
Il se faisait appeler Absoreck. Personne n'y voyait d'inconvénient, car de toute façon il prenait à bien peu de monde l'envie de l'appeler. Il ignorait purement et simplement ceux qui le nommaient par son ancien nom.

Son officier lui avait récité la page standard destinée aux grands méritants, lui avait remis une médaille métallique pour service rendu à la défense elfique, et il avait réintégré son poste d'instructeur de combat. La différence était qu'il enseignait maintenant la théorie pure, assis sur un fauteuil roulant. Mais il n'avait rien perdu de son caractère acariâtre et revêche, au contraire, il était encore plus exigeant avec ses élèves et plus grognard lorsque les résultats n'étaient pas à la hauteur de ce qu'il jugeait acceptable.

Le soleil ne parvenait pas encore à dompter la brume matinale, que déjà les nouvelles recrues étaient alignées dans la cour du centre d'entraînement. A vrai dire, il n'y avait généralement pas de encore de soleil et le coq sommeillait. Ou il l'aurait volontiers fait, si l'instructeur ne hurlait pas si fort.

- Je suis Absoreck, votre instructeur. Je vous rassure, vous n'aurez pas à retenir mon nom, car vous me donnerez du chef. Je suis ici pour vous enseigner le dépassement de soi.

Le discours d'accueil était toujours le même, à quelques variantes près. Il y avait quelques temps, l'un des nouveaux avait souri de ce tableau antithétique d'un infirme parlant de dépassement de soi, depuis, plus jamais le mannequin n'avait entraperçu la commissure d'une lèvre orientée vers le ciel.

Mais ce jour là, il s'en trouvait un qui ne devait pas avoir eu vent de ce mémorable coup de tête donné en projection depuis une chaise roulante, car il avait tourné la sienne pour regarder le vol d'une chauve-souris pendant que l'instructeur terminait son monologue.

Sur le coup, il n'en fut quitte que pour des tympans malmenés, mais il avait été repéré, et Absoreck avait la rancune tenace. Les représailles ne se firent pas attendre lorsqu'il abdiqua devant l'obstacle dénommé « le saut des gougnafiers». En soi, ce n'était pas très compliqué, s'agissant simplement d'une tradition consistant à sauter entre deux promontoires séparés d'une longueur de six coudées par dessus les armes, armures et autres effets déposés en tas par les anciens aspirants combattants qui avaient quitté le centre sans leur ruban bleu. Mais lors de l'entrée en fonction d'Isilgath, la hauteur des saillies était subitement passée de deux a huit coudées, et le tas ne faisait guère plus office que de décoration, ou éventuellement de mauvais matelas pour les rares maladroits qui avait garni quelques jours l'infirmerie. Jamais auparavant, quelqu'un avait refusé de tenter le saut, et il se trouvait pour son malheur qu'il s'agissait à nouveau de l'insouciant du matin.

Le hurlement des invectives qui durent s'entendre jusqu'au port d'Asteras ainsi que les menaces les plus ignobles finirent par le convaincre de sauter, mais il ne réussi pas à se rattraper correctement de l'autre côté : seul son nez agrippa le promontoire visé, ce qui ne fut pas suffisant pour s'accrocher.

Le médecin légiste ne sut dire si la mort avait été provoquée par le bris de la nuque lors de son rattrapage nasal ou par l'empalement sur le casque elfique malencontreusement resté debout qui avait été son point de chute sur le tas, mais en tous les cas, la nouvelle de la mort d'un jeune élève lié à l'acharnement vengeur de l'instructeur ne tarda pas à s'étendre dans tout le campus et au-delà.

Convoqué la journée même, Absoreck se retrouva une nouvelle fois devant son supérieur, qui était d'ailleurs resté le même depuis toutes ces années – longévité de bureaucrate, comme aurait dit Absoreck – et qui ne manqua pas de faire référence à la très ancienne malheureuse histoire de l'instructeur.

- La dernière fois j'ai passé l'éponge, mais là je ne peux plus te couvrir Habs'.
- Je n'l'ai même pas touché cette fois-ci, et en plus cette fois-ci c'est vrai, c'que j'dis !
- Oui mais cette fois c'est le fils d'un prélat, et j'ai déjà reçu ton ordre de mise a pied signé du généralissime lui-même, et l'instruction de décerner le ruban bleu a titre posthume au p'tio.
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#4
Magie, magie, c'est la cuisine d'aujourd'hui.


- Bah... on a droit a dix pour cent de pertes, non ?

La réponse avait fait sourire intérieurement le supérieur, mais n'arrangea en rien les affaires d'Absoreck.

Il avait été démis de ses fonctions en tant que chargé de missions, avait été mis a pied du poste d'instructeur de combat, et s'était vu retirer sa médaille de méritant.
Comme solde de tout compte, on lui donna cinq cent pièces d'or en main propre et on lui assura qu'une pension militaire minime mais régulière lui serait versée sur un compte à son nom à la banque d'Asteras. Il reçut un sac comportant cinq bandages, une potion de vie et une potion de mana - il se demandait bien ce qu'il pourrait faire de cette dernière –. Quelques menues victuailles vinrent compléter ce paquetage, puis on le lâcha poliment devant la porte de l'enceinte militaire.

Pour y avoir roulé sa bosse depuis si longtemps, il connaissait Asteras comme sa poche. Et pourtant. C'était terrible. Il était totalement perdu. Plus de trois cent années a exécuter les ordres sans discuter, et soudain... rien à faire, pas de comptes à rendre, pas d'ordre de mission. Il tournailla longuement au hasard des ruelles et finit par parquer son véhicule à côté d' un banc de granit dans un parc, observant longuement la course des escargots sur la pierre, puis il se mit a jeter quelques morceaux de ses tranches de pain aux pigeons. Du pain et du jambon... Un repas de roi. Les patates au lard, servies avec une assiduité exemplaire par la cantinière trois fois par jour, même lorsque les Holdars étaient sous les murs, n'allaient certainement pas lui manquer longtemps. Les outres d'eau de son paquetage d'adieu par contre faisaient pâle figure face à la gnôle qui s'échangeait dans le camp.

Il allait rapidement s'en apercevoir, ce qui n'allait pas lui manquer non plus était l'infirmerie du centre militaire. Voulant corriger un garnement qui lui avait manqué de respect en chassant ses pigeons, il fit une malencontreuse chute de sa chaise roulante et s'ouvrit pour une énième fois l'intégralité des cicatrices des ses membres anciennement tranchés. Jusqu'ici, à chaque colère qui le faisait sortir de ses gonds, ou plutôt de sa chaise, et qui ouvrait ses mauvais souvenirs, on l'amenait au médecin du centre. Mais maintenant qu'il était un banal civil, le brancard prit une autre direction.

Absoreck fut abasourdi par la différence de traitement entre ce qu'il avait vécu à l'hôpital militaire et ce qu'il voyait devant lui au Temple d'Asteras. Il n'y avait ici aucun fou furieux armé de scalpels qui préconisait une saignée par jour pour mieux souder ses ligaments. Les prêtres et prêtresses ne voyaient que peu de difficultés dans le fait d'user de quelque magie afin de lui rétablir les chairs.
Pendant que le religieux qui l'avait pris en charge officiait, il se voyait déjà de retour aux séances d'entraînement, courant de mannequin en mannequin, maniant l'épée devant une foule d'élèves impressionnés, retournant en mission dans les terres inexplorées et faisant la tête au carré au notable qui l'avait fait radier.

Mais il déchanta bien vite une fois l'opération terminée, quand le prêtre lui annonça :

- Attention tout de même, vous ne retrouverez plus votre aisance d'antan, mais vous pourrez faire une utilisation ordinaire de vos membres, suffisante pour marcher par exemple, peut-être en boitant un peu, mais amplement suffisant en tous les cas pour remplir vos paperasseries administratives et chercher votre pension à la banque.

Tout à chacun aurait été plus que ravi d'apprendre que ses blessures handicapantes à vie n'étaient presque plus visibles ni gênantes, et que les seules séquelles seraient une légère claudication et une difficulté a faire des mouvements rapides, mais c'était Absoreck. Il répondit, dans une rage sourde :

- Mais je ne peux... je ne veux pas me contenter du commun des immortels ! Il faut absolument que je retrouve la dextérité hors de pair que j'avais antan, que je puisse grimper des murailles, creuser des tunnels, assassiner qui je veux quand je veux...

Le Saint Elfe lui répondit d'un air agacé qu'il faisait de la magie, pas des miracles, et que s'il était si fort, il n'avait qu'à apprendre la magie lui-même et faire de l'auto-médication.

Absoreck s'en fut en claudiquant et en maugréant, ne laissant derrière lui qu'une chaise roulante en guise d'obole. Avant de sortir de la grande salle, il marqua un instant d'arrêt devant un vitrail majestueux, troublé et oublieux l'espace d'une seconde de sa colère, mais trop remonté contre ces bons à rien d'ecclésiastiques, il reprit rapidement sa route et sortit du Temple en maudissant la divinité des lieux.
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#5
L'ecole de magie, c'est comme les toilettes, on s'assoie puis on attend.

Absoreck ne s'était jamais intéressé aux arcanes, pas même à la magie commune de l'air pratiquée par tout à chacun chez ceux de sa race.

« Si c'est votre première venue, veillez vous inscrire au registre »
Il eût un instant d'hésitation, se demandant quelle était l'utilité de s'inscrire alors qu'il voulait juste apprendre la magie, mais se dit que pour faire bonne impression, il allait se plier aux règles du lieu.
Après tout, au centre d'entraînement aussi il demandait à ce qu'on suive les règles. Si elles étaient judicieuses. Et pas trop contraignantes.

Levant la tête, saisissant une feuille et rajustant ses lunettes, l'agent chargé des inscriptions commença a questionner :
- Nom ?
- Absoreck.
- Vous avez des antécédents orcs ?
Demanda-t-il avec un large sourire.
- J't'en pose des questions, raclure d'troufignon d'rat d'égout ?
Le regard que lui porta l'aspirant-magicien découragea le préposé de toute autre remarque.
- Prénom ?
- Pas de prénom.

Tout en écrivant sur son registre, l'archiviste répéta a haute voix
- Pas... de... prénom...

Feuille, plume, tête et encrier volèrent. Absoreck pu enfin entrer dans la salle principale de l'école de magie. Tout ces livres ne lui inspiraient rien de bon. Rien de tel que la pratique pour pratiquer, tel était son credo.
Observant avec une méfiance et un scepticisme non dissimulé les quelques élèves encadrés par de nombreux professeurs qui semblaient tous sortis du même moule, son regard se porta sur un parchemin accroché au mur.

[Image: citationAE.png]

Il n'avait pas terminée la lecture de la courte citation que déjà un professeur de magie remarqua ce nouveau venu qui semblait hésitant et un peu perdu, et alla lui mettre le grappin dessus.

- Ahem... Venntaï, vous êtes nouveau ? Vous avez procédé à votre inscription ?
- Oui, oui, ne vous inquiétez pas, je suis bien imprimé dans les tablettes de votre archiviste.


Avec un grand sourire, l'érudit montra deux sièges près d'une bibliothèque.

- Bienvenue à la prestigieuse école de magie d'Asteras dans ce cas. Venez vous asseoir. Nous en avons pour un moment.

Le professeur lui présenta assez peu succinctement les différentes voies qui s'enseignaient ici, mais lui dit que de toute manière tout le monde devait commencer par l'aéromantie, passage obligé de tout Haut-Elfe qui voulait maîtriser les arcanes.

Au fur et à mesure des explications, Absoreck commençait a perdre patience.

- On commence quand la pratique ? Vous m'avez dit que tout est dans les bouquins. Je peux emprunter celui-ci ?
Il allait sortir un livre de l'étagère, mais le professeur l'arrêta.

- Ahem, je suis désolé, suite a des réductions budgétaires, les livres de magie ne sont plus disponibles gratuitement dans les écoles, il faut vous adresser à la vendeuse de livres, là bas.

Absoreck resta un instant pantois, puis s'en alla voir la vendeuse en marmonnant :
- Tiens... on aurait pu y penser au centre d'entraînement... location de l'étoile du matin : cinq pièces d'or. Vous avez endommagé le mannequin d'entraînement ? vingt pièces. Une flèche cassée ? trois pièces. On aurait pu financer une nouvelle armée avec ça...

Il prit un guide du débutant – le moins cher qu'elle avait en stock -, et retourna s'asseoir en face du professeur.

Celui-ci, tout en continuant son baratin sur les tenants et les aboutissants de la circulation du mana dans les tréfonds d'Ecridel ainsi que sur les différentes voies que pouvait emprunter les élèves doués, fit à la demande d'un Absoreck de plus en plus impatient une démonstration pratique de bourrasque qui alla soulever les rideaux dans un ballet harmonieux, avant de continuer son exposé en expliquant les pouvoirs de la magie pure des mages.

Enfin, après un nouveau laïus interminable, il passa du mage au grand mage, insinuant qu'il y aurait ensuite encore un chapitre sur les archimages.
- La voie du grand mage est ce qu'il vous faut je pense, peut-être même voudrez-vous aller plus loin et expérimenter la puissance intrinsèque du mana en devenant archimage...
Absoreck avait perdu le fil de la discussion, ses paupières commençaient à cligner et ses pensées étaient retournées a ce vitrail coloré. C'était comme s'il était devant lui et qu'il lui parlait.
…mais sois sûr que de goûter à la quiddité des éléments te fera découvrir les secrets qui te rendront ta célérité et ta vigueur d'antan.

La voix était devenue un peu trop féminine pour le vieillard qu'il avait en face de lui. Absoreck, étonné, sortit de sa somnolence et se concentra à nouveau sur son interlocuteur.

- Vous disiez ?
- Ahem... euh, rien ?! J'avais fini. Vous rêvassiez ou somnoliez, alors j'attendais. J'ai tout mon temps vous savez, je suis immortel. Comme vous d'ailleurs, et comme tous les elfes. Mais même si l'on a tout son temps, il mieux vaut commencer tôt la pratique de la magie car...

Et le voilà qui était reparti dans un exposé sur les risques et les bénéfices de l'apprentissage des arcanes relativement à l'âge du disciple.
Absoreck, qui finissait de perdre patience, l'interrompit :
- Oui 'fin bref, allons droit au but, parce que là, sauf vo't respect, vous m'saoulez. Moi, ce qui m'intéresse, c'est d'apprendre votre sort de soin le plus puissant. Quelque chose qui puisse souder un ligament pour l'éternité, parce que justement j'aimerais rester immortel encore longtemps, mais pas grabataire comme vous.

Le professeur le regarda par dessus ses lunettes d'un air navré, en tortillant sa barbe de sa main droite.

- Ahem... Je suis désolé, mais nous n'en connaissons pas le moindre, dans aucune des voies passées, présentes et à venir. Aucun Haut-Elfe en dehors des prêtres ne connaît le secret de cette technique.
- QUOI ? Vous connaissez pas un seul sort de soin ?? Ca fait chais pas combien de milliers d'années qu'vous étudiez et enseignez la magie, et tout ce que vous savez faire c'est faire bouger les rideaux ? Vous êtes une bande de bitos, encore pire qu'les bizuts du camps. Vraiment plus rien qui m'étonne ici, surtout pas qu'on ait perdu la guerre. 'm faites perdre mon temps.


Et il s'apprêta a prendre congé.

Le professeur de magie lui dit d'une voix posée qu'il était préférable de rester maître de soi quand on désirait maîtriser les arcanes.
- JE SUIS MAITRE DE MOI ! hurla Absoreck en réponse, faisant presque voler les rideaux.

Et d'un pas aussi pressé que lui permettait son handicap, fulminant intérieurement comme extérieurement, il retourna au Temple. Il ne s'imaginait pas un instant que sur son chemin, quelqu'un oserait l'interpeller, et encore moins un militaire.
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#6
C'est le mimi c'est le rara, c'est le...

- Chef ! Heu... Instructeur Abesaën ? Hum... Monsieur Isilgath Abesaën ?... Monsieur !... Heu... dites ? Hu ?
Comme le jeune garde ne semblait pas prêt à lui lâcher la grappe, il finit par s'arrêter et se retourner.
- Qu'es-tu lui veux ? Pour ton info, je ne suis plus instructeur, et il insista lourdement sur le plus, tu peux m'appeler Isilgath... ou, pote tant que tu y es... de t'façon y'a plus d'respect dans l'armée.
- Je suis désolé, monsieur, on m'a chargé de vous porter une nouvelle tragique : le généralissime Delawyn Ma'hoir est décédé, et son office funèbre aura lieu dans quelques jours. On m'a ...
- Tragique ? J'dirais plutôt qu'c'est une bonne nouvelle, vu la débandade dans laquelle il a conduit notre armée. Faut pas s'étonner, quand on limoge des instructeurs de valeur, que la guerre soit perdue d'avance... Et qui va le remplacer ?
- Heu... je ne sais, monsieur, mais...
- Pff quelle importance, même toi tu f'rais l'affaire. Ok, j'y s'rais, pt'êt. Rien que pour le plaisir de le voir partir avant moi.


Hormis un mendiant un peu conglutinant qui l'avait poursuivi sur quelques toises en se lamentant la main tendue, il arriva au Temple sans autre enquiquineur, et prit immédiatement a partie le prêtre qui l'avait soigné.

- Apprenez-moi la magie des soins ! J'ai suivi vot' conseil, je suis allé à l'école de magie, et on m'a dit qu'il n'y avait qu'au Temple où l'on connaissait ça. Vous vous payez ma tête, ça vous amuse de faire cavaler un infirme, c'est ça ?
- Mais... ça ne s'enseigne pas, c'est un secret gardé jalousement par les membres de l'ordre et qui nous permet de recevoir nos oboles. Il faut bien financer notre Temple, surtout en cette période où le gouvernement ne met plus trop la main à la poche. Aucun prêtre ne vous transmettra ce savoir. Vous devez rentrer dans les ordres. Et même dans ce cas, ce que vous apprendrez ne vous servira pas plus, nous avons fait tout ce qui était en notre pouvoir, vous ne trouverez nulle part ce que vous cherchez.


Une rage folle s'empara d'Absoreck. Une angoisse indescriptible qui le plia en deux et lui liquéfia les entrailles. Soudain la notion d'immortalité devenait synonyme de supplice. La vie un labyrinthe sans fin ni issue. Il prit du temps pour retrouver son souffle. Pour revenir à la réalité. Pour se relever.

A peine remis de ce déversement de bile, il gifla violemment le prêtre, repoussa tout aussi vivement une prêtresse qui venait à son secours, frappa du pied dans un énorme cierge qui trônait là, s'empara d'un coffret d'encens qu'il allait jeter vers le mur... contre un vitrail.... contre le vitrail... il se figea dans sa course.

Comme ébloui, il s'était arrêté net. Il posa doucement l'encensoir sans détourner la tête de la mosaïque, comme s'il avait soudain peur qu'elle disparaisse s'il la quittait des yeux.

Il se passa un instant interminable, le temps suspendu, personne n'osait bouger, ni même ramasser les reliques qu'avait renversé le fou furieux, spectateur d'un phénomène imaginaire que lui seul semblait pouvoir visualiser, ou peut-être trop profondément plongé dans ses pensées pour remarquer que son vêtement commençait à être atteint par la flamme du cierge renversé.

La prêtresse qu'il avait envoyé valser finit tout de même par s'approcher craintivement à porté d'éventuels coups pour ramasser le cierge et tapoter sur le bas de sa tenue. Sans tourner la tête, il lui demanda ce que représentait la verrière. Elle lui répondit un peu surprise, après un moment d'hésitation :

- C'est un… il s'agit d'un vitrail représentant Sainte Gwendolwenn, qui enfanta sans connaître de mâle et donna la vie alors qu'elle était morte.

Après un silence elle continua son récit d'une voix plus assurée.

Elle a voyagé aux quatre coins d'Ecridel. Elle s'est consacrée à la protection des pauvres et des nécessiteux, à l'éveil de la culture et à la diffusion du savoir, à la promotion de la paix et du respect, à l'étude de la magie et des éléments. J'ai atteint en cet art une précellence telle que si tu y parvenais, si tu trouvais en toi la volonté d'étudier l'élémentalisme, tu pourrais retrouver toutes tes aptitudes et bien plus encore.

Il se tourna vers la prêtresse. Elle avait disparu. Depuis longtemps semblait-il, car elle n'était plus visible dans toute la salle, et pourtant il venait d'entendre une voix féminine lui adresser ces paroles.

Il fit à nouveau face au vitrail. Une douce quiétude l'envahit. Et subitement, une euphorie indescriptible qui le plia en deux et inonda son ventre d'une chaleur éthérée. Comme l'angoisse qu'il avait ressenti plus tôt, mais plus agréable encore qu'une jouissance.

- Ce qui t'angoisse ne sera pas.

Il lui vint pour la seconde fois de sa longue vie l'envie de pleurer. Et il céda. Il pleura, dans une explosion de béatitude, un état de grâce irréel et absolu, qui s'acheva dans une éphémère ataraxie.

Etait-ce la providence ? Un ange gardien ? Un délire ?

- Nan. Chuis un guerrier. Un mercenaire. Un tueur. J'veux pas d'une intello pacifiste pour ange gardien ! Et j'retournerai pas à l'école.

Le temps de l'ataraxie était passé. Appuyé sur ses poings, il observa ses poignets qui saignaient. Ce n'était pas bien grave, il était au Temple. Il se releva puis s'énerva, hurla qu'on vienne le soigner au plus vite car il avait à faire. Personne. Il prit une grande respiration, et pour achever le travail ébauché à deux reprises par sa glande biliaire, il se rendit aux toilettes, laissant sporadiquement derrière lui une fine macule pourpre...

[Image: hr.png]

[Image: vitrail4elements.jpg]
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