Concours de RP : tome 1
#1
Le tournoi vient à peine de débuter que voici venir une première animation : un concours de RP.

Un concours de RP durant le tournoi où l'on a justement mis celui-ci entre parenthèse... drôle d'idée. Mais il y a pourtant un but à cela : un lot très spécial.

En effet, le gagnant (et il n'y en aura qu'un seul) se verra accordé la faveur de "commander" un plan de 6*6 à sa guise (tant qu'on reste cohérent avec le jeu et sans chercher le déséquilibre). Votre propre maison, le siège de votre guilde, un lieu de réunion ou que sais-je... Il s'agit là de vous donner une occasion alléchante de personnaliser comme jamais le BG de votre futur personnage. Ce plan, en effet, sera implanté directement sur la proche manche.

Mais après ces réjouissances, revenons en au concours. Comme toute bonne compétition, il y a des règles à respecter et les voici :

Citation :- Le récit devra se dérouler dans l'univers d'Andoras.

- Sa longueur devra varier entre approximativement 2/3 de page A4 et 6 pages A4 (promis, j'ai autre chose à faire que de compter les lignes donc ne dramatisez pas si vous avez deux mots de trop ou trop peu).

- La date limite pour rendre les textes est le 11/12/2011 à 23h59', l'heure du forum où de la messagerie faisant foi.

- Le texte devra coller au thème "Mon lieu secret" qui parlera de ce que vous imaginez faire de la récompense en cas de victoire (piste : quelle est l'histoire de l'endroit? qui y vit? qui l'utilise? ou se trouve t-il? comment est-il décoré? une histoire qui s'y est passé peut être un fil conducteur au travers du texte...).

- Il ne s'agit pas d'un simple descriptif du plan mais bien d'un récit dont le lieu tient une place centrale.

- Les textes se devront d'être crédibles (il ne sera évidemment pas question de faire apparaître un volcan au milieu d'une capitale, à vous donc de comprendre les limites du mot "crédibles").

- Le plagiat est interdit.

- Le texte devra être un nouvel écrit inédit (on ne va pas récupérer un texte du prologue Big Grin).

- Vous pouvez rentrer vos productions, soit par MP à Alea Milëy, soit ici même, sur le forum (ce qui est par ailleurs recommandé car vous permettra de faire une meilleure mise en page).
En cas de question sur le règlement, n'hésitez pas à prendre contact avec Alea Milëy ou Almis Fildor par MP.

Le concours est lancé à partir de ... maintenant !

Que le meilleur gagne et voit son rêve se réaliser Smile.
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#2
Est-ce que le "plan-cadeau" correspondra forcément à ce qu'on a mis dans le RP ou est-ce qu'on pourra reformuler ses désirs le cas échéant?
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#3
mmmh... intéressant

Quels avantages (ou inconvénients) pour les joueurs sur le plan ? Est-ce que l'accès en sera limité pour les perso. d'autres guildes, par exemple ? Est-ce qu'il sera aménageable ou aménagé ?
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#4
Il sera comme vous l'avez décrit mais c'est évidemment approximatif. Le gagnant passera un entretien avec moi pour que l'on discute de ses souhaits de façon plus poussée.

Pour Melmoth, il sera "aménagé" mais selon vos désirs (et mes possibilités Big Grin). Quand à son accès, il ne sera pas limité (ça deviendrait une safe-zone, un peu trop facile...) mais à vous de le défendre si besoin en est smile.
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#5
Je trouve ce concours très intéressant, surtout pour la récompense originale qu'il propose !
C'est vraiment stimulant d'imposer un thème au concours salive
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#6
Si on est vraiment motivé, on peut faire plusieurs rps?
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#7
Ce n'est pas la quantité qui compte mais la qualité.

Si tu peux allier les deux pourquoi pas, mais un seul bien fait suffit.
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#8
Est-ce que le texte peut (doit ?) être fait en plusieurs parties ? Quand peut-il commencer dans l'histoire d'Andoras ? (peut-il se passer dans ... le passé récent ?)
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#9
Est ce que le personnage principal du RP doit être le perso actuel ou peut-il être un autre ? Celui qu'on pense créer après le tournoi, au hasard... Tongue
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#10
très bonne idée clap
je vais m'y mettre de ce pas Big Grin (au pire, ça pourra servir dans mes RPs)
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#11
Melmoth a écrit :Est-ce que le texte peut (doit ?) être fait en plusieurs parties ? Quand peut-il commencer dans l'histoire d'Andoras ? (peut-il se passer dans ... le passé récent ?)
Je pense que oui, mais c'est mieux que le Rp se situe dans le monde actuelle. Après, les flashbacks sont possibles !


Hiresh a écrit :Est ce que le personnage principal du RP doit être le perso actuel ou peut-il être un autre ? Celui qu'on pense créer après le tournoi, au hasard...
Si tu créées le Rp de ton futur perso, que te resteras-t-il pour le concours RP pour la prochaine manche ? Garde le pour la prochaine manche Wink
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#12
Citation :Almis : Il s'agit là de vous donner une occasion alléchante de personnaliser comme jamais le BG de votre futur personnage. Ce plan, en effet, sera implanté directement sur la proche manche.
Vous avez la réponse à votre question Smile
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#13
Aucune contrainte temporelle sur ce concours.

Pas de contrainte non plus pour le découpage mais il est quand même conseillé dans 99,5% des cas : un texte clair et facile à lire sera plus agréables aux juges qu'un gros bloc compacte.

Le personnage principal peut effectivement être votre futur. Mais comme le dit Galiena, il y aura d'autres concours durant la manche donc à vous de voir si vous aurez encore suffisamment d'inspiration à ce moment là.

En revanche, c'est limité à un texte par personne donc à vous de ne garder que le meilleur de vous même Smile.
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#14
Hum... Ma question était stupide... Ne m'en veuillez pas trop s'il vous plait, il est tard, tout ça, j'ai lu un peu trop vite et j'ai pas fait attention... Big Grin (non non, je ne cherche pas des excuses...)
Merci pour la réponse !
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#15
Le concours se termine dimanche et je n'ai toujours reçu aucun RP malgré le nombre d'intéressés.

N'oubliez pas d'envoyer vos productions au plus tard avant ce dimanche 11/12/2011, 23h59' !!!
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#16
Il aura au moins une contribution, je m'y engage.
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#17
j'y travaille...
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#18
Avec la semaine de partiels qui s'annonce... pas sûre de pouvoir terminer à temps Sad
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#19
ça devrait arriver demain, au pire dimanche dans la journée !
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#20
En me faisant remarqué une chose judicieuse (à savoir que la date de fin du concours coïncidant avec la fermeture du jeu pour la nouvelle manche, vous empêchant ainsi d'envoyer les textes dimanches), l'un de vous a eu bien raison.

En cette raison, le concours sera prolongé de 48h, le temps de rouvrir le jeu pour que vous puissiez envoyer vos oeuvres. La date de fin est donc désormais le mardi 13/12/2011 à 23h59'.

J'espère que ce délai supplémentaire sera de bonne augure pour votre inspiration...

Bonne chance à tous les participants attendus impatiemment Wink.
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#21
Merci !

Il y a d'ailleurs un autre avantage, il sera publié avec le nouveau "bon" perso de jeu, et pas celui temporaire du tournoi.
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#22
Content d'avoir été utile.
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#23
j'avais commencé à écrire mon RP en message privé avec moi-même vers le 25 novembre ... il a était supprimé pleure2
je ne l'avait pas archivé car la manche devait durer moins d'un mois regard_haut
je vais recommencer pour mardi Wink
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#24
Ma contribution :

Citation :La lumière de l'aurore filtre faiblement par la trappe du plafond qui constitue l'unique ouverture de la pièce vers l'extérieur. Le faisceau orangé parcourt lentement les murs humides de la hutte, s'attardant sur les diverses besaces remplies d'herbes rares, les amulettes en plumes, os et poils, puis descend sur la paillasse où je dors, réchauffe ma crinière et finit par m'éblouir à travers mes yeux fermés. Je me dresse sur mes sabots avec force baillements et étirements, avale en vitesse une purée de racines, puis étale mes affaires pour la journée sur la grande table qui occupe une bonne partie de l'unique pièce où je vis. Une vieille serpe pour récolter les fleurs rares que je pourrais trouver en chemin, un épais couteau en fer pour arracher les écorces précieuses, un poignard plus fin pour dépecer le petit gibier, et enfin ma vieille baguette en buis, que je m'étais confectionné il y a bien longtemps, avec l'aide de mon maître, qui voyait alors en moi un jeune talent plein d'avenir. J'empacte mes affaires dans une sacoche en cuir que j'accroche à ma croupe, et monte le court escalier en rondins de bois qui mène à la trappe. J'émerge à l'air libre à travers les énormes racines d'un chène de nombreuses fois centenaire, et qui me sert de toit depuis presque quarante ans. À l'époque, j'avais du faire un choix : la prison ou l'exil... Autant dire que je n'avais pas réfléchi bien longtemps avant de galoper au loin, laissant derrière moi mes amis, mes ennemis, ma femme et mon passé. Je trouvai rapidement, guidé par les éléments qui ont toujours été mes amis les plus fidèles, ce refuge à la fois calme et propice à la magie chamanique. La reclusion et la solitude, qui me semblèrent à l'époque impossibles à supporter, sont désormais la seule chose à laquelle j'aspire.

Je lève mon visage vers le ciel rosâtre de l'aube, et hume les parfums que je connais désormais si bien. La rosée se dépose sur mes lèvres, mes narines, mes paupières, le vent secoue doucement mes crins, tandis que la terre frémit sous mes sabots nus, me fait entendre sa sourde voix. Je trotte à travers la forêt pour relever mes pièges, reccueillir ces animaux qui m'offrent leur chair. En chemin, je passe près d'un vieil hêtre, dont j'arrache un petit morceau d'écorce, que je machouille tranquillement en continuant ma promenade. Maigre récolte ce matin : un unique lièvre malchanceux, qui me fera office de déjeuner. Je me rends sur la colline voisine, où j'étale les plantes que j'ai cueillies et entreprend d'allumer un feu. Tandis que je dépèce et vide le lièvre de ses entrailles avec mon scalpel, mon regard se perd dans les flammes dansantes, qui semblent particulièrement agitées aujourd'hui. Je perçois l'excitation et la peur, ainsi qu'un avertissement. Je pense alors à un voyageur ou braconnier imprudent qui se serait aventuré assez profondément dans la forêt pour croiser mon chemin, et décide d'aller patrouiller après mon repas.

Le lièvre était vieux et assez chétif, mais la purée d'orties qui l'accompagnait suffit à me repaître. Je commence ma patrouille en suivant le ruisseau au bas de la colline, dans lequel j'attrape au passage une truite fort apêtissante. Lorsque le ruisseau n'est plus qu'un fil d'eau ténu, je bifurque et m'engouffre dans les sous-bois, baguette à la main et prêt à déchainer les éléments sur le premier intrus. Cependant, après avoir inspecté un large cercle autour de mon abri, je ne trouve aucune trace d'un quelconque passage, et retorune donc seulement à moitié rassuré vers ma hutte. Sur la route, je découvre un jeune plant de gentianes aux vertus médicinales que je ramasse dans l'idée de le replanter près de chez moi. Enfin, alors que la lumière baisse et que la lune commence à devenir visible dans le ciel, j'arrive devant mon chène.

Je remarque d'emblée une excitation peu commune dans l'atmosphère, une sorte de surprise dans la terre, et un trouble certain dans l'humidité qui commence à se déposer sur mon poil. Devant l'entrée de ma hutte, des traces de pas presque imperceptibles me mettent sur le qui-vive, et j'entre prudemment dans mon refuge, paré à toute enventualité. Lorsque j'arrive finalement au bas de l'escalier de fortune, je remarque sur mon lit que ma couverture est en boule, alors que je me souviens très bien l'avoir étendue avant de partir. Finalement, le bruit d'une respiration faible et douce m'indique que quelqu'un est effectivement dans mon lit. Ne doutant pas que l'intrus est endormi, je balaie du regard la pièce, cherchant un quelconque paquetage, mais rien n'attire mon attention si ce n'est mon garde-manger à moitié ouvert. Cet étranger a pensé pouvoir se servir chez moi, il va apprendre à ses dépens que le gîte et le couvert ne font plus partie de mes mœurs. J'arrache violemment la couverture de mon lit, me préparant à punir l'imprudent, et découvre, en position fœtale, une jeune elfe, presque un enfant, entièrement nue, et serrant dans ses bras un morceau d'étoffe. Elle se réveille brusquement et me jette un regard apeuré, auquel je répond par un étonnement sans borne. Puis, la voyant tremblante et serrant de plus belle son paquet, je réalise que je dois être effectivement terrifiant, vêtu d'une simple peau d'ours, ma baguette menaçante à la main, et le visage recouvert d'une barbe et d'une chevelure crasseuse. Un simple échange de regard me fait comprendre qu'il me faut l'aider et non la châtier, que cet être est différent, et mérite ma pitié. J'abaisse donc ma garde et ramasse la couverture, puis me dirige vers elle afin de l'en couvrir. Tremblant de plus belle, elle se laisse faire sans un mot et sans desserer l'étreinte autour de son petit paquet, en me fixant d'un regard dans lequel je lit une méfiance et une peur sans borne, mais également un début de reconnaissance. Je tente de lui parler, mais seul un son rauque émane de ma gorge, et je réalise avec étonnement que je n'ai pas prononcé un mot de langage commun depuis des lustres. Je réussis cependant à lui demander d'où elle vient, mais sa seule réponse est son regard toujours fixé sur moi.

Nous restons plusieurs minutes, elle en tailleur, moi agenouillé, à nous fixer, presque sans ciller, et je comprends que ce canal de communication est le seul qu'elle utilisera, j'essaie donc de lui faire comprendre par un regard bienveillant que je vais l'aider. Son expression, cependant, ne varie pas d'un iota lorsque je lui souris, et j'ai l'impression qu'elle ne regarde pas mon visage, ou même mes yeux, mais sonde mon âme. Ne pouvant soutenir son regard plus longtemps, je laisse courir mes yeux sur son visage angélique, puis redescend le long de son cou, de ses fines épaules et de ses bras délicats. Je remarque alors qu'elle a laissé la couverture tomber au bas de son ventre, et qu'elle sert contre sa poitrine son baluchon. Mon regard s'égare alors sur ses seins, la courbure de ses hanches, qui sont les mêmes que ceux d'une jeune centaurine en fleur, et qui réveillent en moi un vieux désir que je pensais éteint après tant d'années de solitude. Je sens alors sur moi le poids de son regard, et relève les yeux vers les siens, comprenant qu'elle a tout de suite compris l'intégralité de mes pensées. J'approche tout de même une main de son visage, dans un geste que je veux rassurant, et la pose sur sa joue dans une caresse réconfortante. Son regard, toutefois, reste profondément concentré sur mon âme, prêt à détecter la première arrière-pensée. Alors que ma main descend de sa joue sur son menton, puis sur sa nuque, je sens une tension parcourir son échine, mais ce contact avec cette peau si douce, si pure, si fraîche, m'empêche de comprendre qu'elle est aux abois, et je m'approche d'elle, tandis que ma main continue de descendre, sur ses épaules. Alors que ma caresse atteint son aisselle, un éclair cinglant me déchire le flanc, et je croise dans son regard non plus la peur, mais juste une colère muette, et un air de reproche. Je baisse les yeux vers la source de ma douleur, et l'elfe lache alors le poignard qui est enfoncé dans ma hanche. Je saisis le manche noir, dont le contact est à la fois chaud et d'une froideur mortelle, et extirpe lentement la lame ensanglantée, du même noir intense. Le sang coule abondamment de ma blessure et je commence à tourner de l'oeil. La jeune elfe me regarde toujours calmement, et je lui fais comprendre d'un coup d'œil à quel point je regrette mon geste, l'étendue de ma honte et mon désir de regagner sa confiance. Puis je me dis qu'elle l'avait probablement déjà compris avant même que je puisse l'énoncer clairement dans mon esprit. Ma blessure saigne toujours, et j'entreprends alors de l'éponger avec un chiffon, puis de la nettoyer à l'aide des plantes que j'ai ramassé à peine une heure auparavant, et de bander la plaie avec un pansement en feuilles d'orties tressées. Je verse également un filet d'eau pure sur ma plaie en lui insufflant le pouvoir de guérir et soulager la douleur.

Confiant dans mes talents de soigneurs et dans le pouvoir des plantes et de l'eau, je me retourne alors vers l'elfe, qui est toujours dans la même position, en tailleur sur mon lit, la couverture lui couvrant les jambes et le bas du ventre. Cependant, son étoffe est ouverte à côté d'elle, et je constate qu'en plus du poignard en pierre noire, elle contient également une pierre grande comme la paume de la main, et dont la couleur est indéfinissable, changeant à chaque instant du noir au blanc, du violet au rouge. Ses mains sont posées sur ses cuisses, et elle révèle maintenant sans crainte la nudité de son torse. Je lui tend son poignard afin qu'elle le reprenne, mais elle ne bouge pas et je comprends qu'elle me l'offre. Je le range sur une étagère à côté d'autres couteaux, et perçois alors dans son regard un brin de malice, peut-être même de moquerie. Notre conversation silencieuse continue encore plusieurs minutes, puis d'un coup elle rompt le contact et s'allonge dans mon lit en se recouvrant de la couverture. Je comprends que je vais devoir dormir par terre, et m'allonge sur le tapis de mousse, en grognant lorsque mes muscles déchirés se contractent sous l'effort. Malgré le bizarre de la situation, et les mille pensées qui tournoient dans mon esprit libéré du regard de l'elfe, je m'endors rapidement.

Au milieu de la nuit, une vive douleur me réveille soudainement, et je distingue à la clarté de la lune la silhouette de l'elfe, accroupie à mon côté, ses yeux bleus brillants dans l'obscurité. Elle me fait comprendre d'un regard que je peux dormir dans le lit. Je m'exécute et elle entreprend de refaire mon pansement, qui est imbibé de sang noir. Je réalise alors que ma blessure est toujours ouverte, et que le sang s'écoule lentement. Inquiet de voir mon sortilège et mes baumes s'avérer inefficaces, je m'endors néanmoins, mon infirmière lovée à mon côté.

Le soleil est déjà haut dans le ciel lorsque j'émerge, et je trouve mon invitée habillée d'une robe confectionnée avec son étoffe, en train de préparer de la nourriture qu'elle a trouvé dans le garde-manger. Je tente de me lever, mais la douleur à la hanche est trop violente. Un coup d'oeil m'indique que la plaie a désormais une tente noirâtre peu engageante, même si le saignement semble s'être arrêté. Aux grands maux les grands remèdes, j'attrape mon gros couteau et le chauffe au rouge en murmurant une incantation dans la langue du feu. Je remarque que l'elfe s'est interrompue et me regarde maintenant d'un air intéressé. J'applique alors la lame incandescente sur ma plaie, en tentant de retenir mes cris de douleur. Une fois la plaie cautérisée, j'utilise une épingle de buis, dans laquelle j'enfile une ficelle en écorce de chêne, que je trempe dans un bol d'eau en lui appliquant un enchantement de soin. Alors que je murmure l'incantation dans la langue de l'eau, j'entends un écho presque imperceptible : l'elfe répète mes mots avec une voix cristalline et à peine audible, comme le chuchotement d'un ruisseau. Je recouds alors la plaie, dans l'espoir que le fil enchanté sera plus efficace que mes précédents remèdes.

Je me lève alors, malgré les protestations de mon corps, et me met à l'étude du poignard avec lequel elle m'a frappé. Celui-ci est fait d'un seul bloc, taillé dans une pierre que je ne connais pas, lisse et éfilée comme un rasoir sur la lame, et rugueuse sur le manche. En approchant le poignard de mon oeil, je remarque qu'il est entièrement recouvert d'inscriptions que je ne parviens pas à déchiffrer. Je poursuis l'étude en le soumettant aux éléments : je le plante dans la terre, celle-ci noircit localement, et je peux sentir sa protestation ; je le trempe dans l'eau, et l'eau se trouble, devient épaisse et sale ; je l'expose au vent, et le sifflement de l'air sur la pierre devient strident comme une plainte ; je la jette dans le feu, enfin, et les craquements des buches deviennent des rugissements de colère et de peur, tandis que les flammes entament une danse funèbre. L'elfe m'a vu faire avec fascination en semblant avoir compris tout ce que je faisais, et les conclusions que j'en tire. Nous échangeons un regard : elle a compris ; elle le savait bien avant que je me livre à toutes mes expériences, elle le savait probablement au moment où elle m'a poignardé. Cette étrange lame était une arme mortelle, empoisonnée par des runes et des enchantements qui me surpassent, et que les éléments eux-même ne peuvent pas combattre. Je vais donc probablement mourir. Je reste stoïque devant cette révélation : ma vie a sans doute été plus longue qu'elle n'aurait dû l'être, et quelque chose me dit que mon savoir ne s'éteindra pas avec moi.

La nuit tombée, je sors seul, et soumet le poignard à un dernier examen. Je l'élève dans la lumière de la lune, et celle-ci me lance un appel, à moi, porteur et victime du poignard. Les reflets neigeux qui apparaissent sur la surface de la pierre m'enjoignent à rejoindre l'astre, et à lui rapporter ce qu'il a perdu. Je pense alors à la pierre, ainsi qu'à la jeune fille. Je rendrai le poignard, je rendrai la pierre de lune, mais la fille restera ;je partirai à sa place.

Les jours suivent, des jours d'agonie pour moi, et d'apprentissage pour ma nouvelle élève. J'ai l'impression de ne faire que réveiller un savoir qu'elle possède déjà, tellement elle semble familière avec les quatres éléments, et semble en maîtriser les langues. Je lui fais explorer la forêt, lui montre quelles plantes sont comestibles, lesquelles peuvent vous sauver la vie ou au contraire, être fatales. Je lui apprend à commander aux éléments, mais aussi à les écouter, à leur parler et à se faire accepter d'eux. Elle devient bientôt plus habile que la plupart des chamans le seront jamais, et son potentiel me semble infini. Au bout de deux semaines, je n'ai déjà plus rien à lui apprendre, et lorsque je me repose, elle se promène dans la forêt à la recherche de nouvelles plantes, de nouveaux ruisseaux auxquels elle ne se serait pas encore présentée, d'une colline qu'elle n'aurait pas encore escaladée. Mon armoire se remplit bientôt d'ingrédients nouveaux, découverts par mon apprentie, déjà supérieure au maître.

Je meurs une nuit de pleine lune, et nous nous rendons pour l'occasion dans une clairière que j'affectionne particulièrement. Je m'allonge à bout de force sur un gros rocher plat au centre de la clairière, et la jeune elfe s'adosse à mon ventre. Le poison de ma hanche s'est propagé jusqu'à ma poitrine, et je ne ressens presque plus de douleur. Là, je lui raconte l'histoire de ma vie, dans un mélange des langages des quatre éléments. Je lui narre mon enfance, mon affinité de toujours pour le chamanisme, la manière dont un chaman respecté m'avait découvert et accepté en tant qu'élève. Elle écoute le récit de mon ascension rapide : jeune chaman, puis rapidement un des chamans les plus influents du peuple centaure, et enfin, apothéose de ma gloire, ma nomination en tant que Chaman du roi alors que je n'avais même pas trente ans, une première dans notre histoire.

Et puis, je lui raconte ma chute, ma stupidité et ma vanité. Au sommet de ma gloire, deuxième centaure du royaume, si ce n'est le premier, j'avais épousé la nièce du roi, j'étais un modèle de réussite pour tous les jeunes centaures. Mais un jour, un chaman de campagne, relativement connu pour avoir beaucoup voyagé dans le pays centaure et ailleurs, décida de me donner une leçon d'humilité. Il me défia à une joute chamanique, qui consiste à s'affronter sur les quatre éléments à la suite. Je n'avais jamais perdu une telle joute, et ce n'était pas alors que j'avais atteint l'apogée de mes pouvoirs que j'allais perdre la face. J'acceptai donc le défi sans hésiter, et la sanction fut féroce. Lorsqu'il fallu dompter l'air, l'ouragan que je créai fut dispersé en deux temps trois mouvements par son mur d'air, qu'il escalada ensuite avec aisance jusqu'à la cime des arbres alors que je ne lévitai qu'à quelques mètres du sol. La terre, que je pensais être mon domaine de prédilection, ne m'apporta pas plus de réussite : je réussis à faire trembler toute la vallée où avait lieu la joute, exceptée la parcelle de terre où mon rival se tenait tranquillement. Puis le sol se déroba sous mes pieds quand le séisme de mon adversaire se joignit au mien, tandis que lui se tenait solidement debout sur son rocher. L'épreuve de l'eau fut dans le même ton : je détournai un ruisseau et l'envoyai sous forme d'une tornade aquatique sur mon adversaire, qui absorba toute l'énergie et la redirigea sur moi sous la forme d'une lance d'eau, que je ne pus esquiver que partiellement, et finis trempé des pieds à la tête. Je déchainai alors ma colère dans l'épreuve du feu, créant une énorme explosion qui engendra un incendie terrifiant, attisé par un vent de ma création. L'incendie allait ravager toute notre arène, et j'avais en plus enfreint les règles en utilisant l'air pour attiser mon feu, mon adversaire inonda donc la vallée pour éteindre le brasier. À l'issu du combat, il vint me voir et m'expliqua pourquoi j'avais perdu chaque épreuve, sans me tenir rigueur de mon écart pendant la dernière joute. Ensuite, comme c'était la coutume, il pouvait me demander quelque chose que je possédais afin que je lui donne. Vue la victoire écrasante qu'il m'avait infligée, il aurait pu me demander mon titre de Chaman du roi, ou au moins ma maison. Il n'en fit rien, et me demanda simplement le manteau que je portai, car le sien était abimé après plusieurs mois de voyage. L'humiliation fut complète lorsque je dû rentrer torse nu chez moi, après avoir subi une écrasante défaite.

Je me rappelai alors un diadème qu'il portait au front et qu'il enleva à la fin de l'affrontement, et en déduit directement que c'était ce bijou qui lui conférait un pouvoir supérieur au mien, et que si je me l'appropriai, je serai forcément le chaman le plus puissant du monde connu. N'écoutant que ma colère et ma vanité, je me rendis le soir même dans la clairière où il avait planté sa tente, et le provoquai en duel à mort. Cette pratique était bien sûr interdite par la loi, et le gagnant serait donc coupable de meurtre. Il tenta donc de me calmer et de me raisonner, mais la fureur obscurcit mon jugement. Je fis appel à la magie lunaire, qui avait toujours été la plus puissante en moi, même si je répugnai à l'utiliser car je préférai la réalité de la nature aux mystère des astres. J'invoquai toute la puissance de la déesse Aletheria, qui m'offrit ce soir-là avec plus d'énergie que jamais. Mon adversaire fut terassé dès ma première attaque, sa peau durcie par ses incantations défensives de la terre fut fissurée par mon attaque, et il mourut presque instantanément. Je pus alors récupérer sa coiffe. Lorsque je l'enfilai afin d'en goûter le pouvoir, cependant, je réalisai que l'objet était un simple ornement, sans pouvoir magique, un bibelot inutile en somme. Accablé par le regret devant ma soif de vengeance et de pouvoir, je restai plusieurs heures en contemplation devant le crime que j'avais commis, puis pris la fuite vers une contrée où l'esprit du chaman que j'avais assassiné me laisserait en paix.

Lorsque je termine mon récit, mon apprentie m'observe avec un regard que je ne lui avait encore jamais décelé ; un mélange de pitié, de respect et d'affection. Sous le coup de ce regard, je l'embrasse, et elle me rend ce baiser, qu'elle sait être un adieu. Lorsque nos lèvres se séparent, je lis dans ces yeux un trouble. Elle veut essayer de lutter contre le destin, essayer de sauver le condamné à mort que je suis. Et derrière cette intention, il y a un désir plus profond, celui d'apprendre les arcanes lunaires, habituellement réservées aux centaures, et dont elle a perçu la puissance dans mon récit. Elle se redresse brusquement, et cours au milieu de la clairière pour appeler la rivière la plus proche à venir sauver ma vie. Elle se tourne également vers la lune et implore son aide, mais c'est moi que la déesse-lune écoute à cet instant, et j'appelle son feu ; je lui rend ce qu'elle a égaré, le poignard dans la main droite, la pierre dans la main gauche. Je m'offre à la déesse à la place de l'enfant égaré, à qui je veux donner une chance de laisser son empreinte sur le monde. Quand le faisceau blanc me frappe de plein fouet, je sais que je rejoins les autres chamans de mon peuple, et que je peux m'asseoir à leur côté sans honte désormais.
****

Citation :Bon sang, j'aurais pu le sauver ! J'aurais dû le sauver ! Maintenant, la pierre sur laquelle il reposait ne porte aucune trace de son passage. Je laisse toute ma colère et ma frustration se déchaîner, dans une langue que je ne connais pas mais que mon maître a inconsciemment utilisée pour me raconter l'histoire de son crime et de son exil. Et la lune me répond, par un terrible éclair qui vient frapper à nouveau la pierre, mais qui cette fois-ci porte en lui toute ma fureur, et toute la fureur d'Aletheria, qui vient d'être dupée par mon maître.

Un cratère béant s'ouvre désormais au milieu de la clairière, et je me sens faible pour la première fois de ma vie. Je tente de me rappeler l'incantation qui a produit ce résultat, mais les mots refusent de se former dans mon esprit troublé. M'approchant du cratère, je découvre en son centre une petite pierre ronde, pas plus grande que la paume de la main, dont la couleur est difficile à cerner, tant elle change à chaque instant. Je décide de garder cette pierre comme souvenir, sachant qui l'a envoyée là.

Je retourne dans la hutte dans laquelle je suis venue au monde, enfant de la lune égarée, et confectionne un piedestal pour la pierre de lune, que je dispose au dessus de la grande table. Je jette un regard circulaire dans ce qui est désormais ma maison et j'ai l'étrange impression de découvrir un nouveau lieu : je devrai désormais remplir le garde-manger à côté de la table, je serai désormais seule dans l'énorme lit au fond de la pièce, les outils éparpillés sur la table et sur les étagères qui recouvrent tous les murs sont désormais les miens, et l'armoire remplie d'herbes rares, médicaments ou poisons, est désormais à ma seule disposition.

Déboussolée par cette nouvelle situation, je m'assoie sur le lit, pleure quelques instants l'être disparu, puis m'endors. Le lendemain, je suis réveillé par la lumière de l'aurore qui filtre par la trappe et qui vient m'éblouir à travers mes yeux fermés.
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#25
Ta fiole, on peut peut-être faire quelque chose pour te le retrouver. Je te le transmets par mp si j'y parviens.
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#26
Citation :Nous n'étions pas encore deux à cette époque...
La phrase s'évanouit dans le silence angoissant du sinistre lieu.
Rogral prit un livre sur l'étagère, ils se rappelèrent de tout.

La première chose qu'il avait aperçu, en entrant dans ce sombre refuge, était la statue à deux têtes de son ancêtre Gladar Le Cerbère.
Dans les mains de pierre, un livre couvert d'une rune gravée dans le sang retenait alors son attention.
Il y avait pourtant d'autres objets étonnants dans cette pièce.
La lumière ténue émanait de petites sphères bleutées, sans doute confectionnées à partir de poudre de mana par un grand arcaniste.

Après avoir fermé la porte, il avait pris le premier Ouvrage de la division mentale, et avait commencer à le lire.
Comme bon nombre de ceux de sa famille, il apprit à malaxer sa personnalité en sortant vainqueur de cette première épreuve.
Une semaine passée à lire et à s'épuiser mentalement comme physiquement ...
Une semaine passée à boire et à manger la nourriture rituelle de la grande malle en mithril ...
Une semaine passée à dormir dans le petit lit de chêne sans jamais sortir de cette geôle douillette ...

Il reposa le livre et regarda la statue droit dans ses quatre yeux.
A présent, il avait déjà lu les autres livres et avait deux personnalités différentes :Lograr et Gralor.
Ils remirent leur équipement et se dirigèrent vers la porte.
Tous ceux qui avaient tenté de lire le tome final avaient été retrouvés morts.
Nous ne sommes pas encore prêts, nous reviendrons ...
Edit : orthographe ^^
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#27
Bon, comme promit, voilà ma participation !

Citation :La jeune elfe escalada prestement le grand chêne abritant la demeure familiale, pour l'heure presque vide, et s'engouffra à l'intérieur, sans même faire mine de ralentir, se précipitant vers l'un de ses frères.
Celui ci avait à peine remarqué son entrée en trombe, tout préoccupé qu'il était par la tignasse rouge qu'il ne parvenait pas à dompter, malgré ses efforts continuels.

« -Encore avec tes cheveux, p'tit frère ?
-Grmph... »


Grognement contrarié. Lyss éclata de rire. Son cadet – bien qu'elle en eut encore deux autres plus jeunes – était le seul de la famille à arborer une tignasse aussi flamboyante qu'indomptable là où elle et leurs deux cadets avaient au moins la discrétion d'avoir de longues mèches sombres et lisses.
Indomptable, tel était bien le mot. Et l'elfe se serait bien passé d'un tel ornement capillaire, d'autant plus que ce n'était pas le genre de couleur à s'accorder avec les tons verts et bruns de la forêt de Pelethor... A moins de porter une capuche, pour la discrétion, il pouvait repasser... Il se concentra de nouveau sur ses mèches rebelles. En plus d'être rouges, elles avaient aussi la bizarrerie de blanchir au niveau de la nuque, le forçant à les porter long pour masquer cette hétérogénéité capillaire.
Il détestait ses cheveux, et sa sœur le savait bien. Et pourtant ça la faisait toujours rire, de le voir s'acharner ainsi sur sa coiffure. Elle le trouvait attendrissant. Et puis elle, elle les aimait bien, ses cheveux de feu.
Elle s'assit à ses côtés en les lui ébouriffant, sans tenir compte de ses protestations.

« -Fait pas cette tête, de toute façon t'y arrives jamais ! Les parents sont partis ?
-Oui, avec nos deux petits frères, ils les emmènent voir notre tante... Ils l'ont dit hier. mais tu n'écoutais pas, comme à ton habitude.
-Les pauvres !
(Elle feignit de ne pas avoir entendu la pique.) Elle va encore les gaver de friandises...
-Comme elle le fait toujours...
(Il fit mine d'examiner sa grande sœur d'un œil expert) Et visiblement, ça ne t'as pas trop mal réussit ! »

Elle accueillit la boutade d'un éclat de rire mi amusé mi scandalisé, lui assénant par la même occasion un coup de poing bien mérité sur l'épaule.

« -Et alors, soeurette ? Tu me veux quoi, cette fois ? Lui demanda-t-il lorsqu'il eut finit de rire, frottant son épaule encore endolorie. Il était plutôt de faible constitution, un peu fragile quoi que pas mauviette pour autant.
-Bah, je voulais qu'on aille faire un tour, pour une fois qu'on est un peu tout seuls sans les parents ou les petits frères, ça nous ferait pas de mal, nan ?
-Sans doute...
-Et arrête avec tes ch'veux !! »


Il lui répondit par un second grognement contrarié alors qu'ils se levaient et sortaient.

L'après midi débutait à peine lorsqu'ils passèrent à côté des dernières habitations de Mitriath, signalant la sortie de la ville et l'entrée dans la forêt proprement dite. Ils marchèrent un bout de temps, discutant de tout et de rien, croisant parfois des patrouilles, des mercenaires et des voyageurs, et plus rarement, quelques autres citadins occupés à flâner, tout comme eux.

Le crépuscule était proche lorsqu'ils décidèrent de rebrousser chemin. Ils avaient épuisé à peu près tout leurs sujets de conversation et restaient silencieux, appréciant la fraîcheur du soir. Soudain, ils s'arrêtèrent tout les deux, le regard fixé sur un point devant eux, sur la gauche de la route. Le rouquin fit un pas silencieux en avant, intimant à sa sœur de faire de même. Le mouvement qu'il avait vu avait cessé. L'animal devait être encore là, s'il avait fuit, ils auraient entendu sa cavalcade dans les fourrés... Lyss le suivait de près, aussi silencieuse que lui. Ils avancèrent de quelques mètres dans la pénombre avant d'apercevoir l'animal. Un renard, qui les regardait fixement, tenant une de ses patte au dessus du sol, babines retroussées. Lyss lui murmura quelques mots à l'oreille, le renard était blessé, sans quoi il aurait déjà fuit.
Tout deux s'immobilisèrent. L'animal les regarda encore quelques instants et, voyant qu'aucun des deux elfes ne bougeait, commença à reculer en boitillant. Une fois qu'il se fut assez éloigné, il se retourna et clopina le plus vite possible loin d'eux.

Lyss emboîta le pas à son frère lorsqu'il se lança à la poursuite de l'animal. Tout deux se faisaient le plus discret possible. Néanmoins, l'ouïe fine du renard lui permettait de percevoir leur présence et son allure ne faiblissait pas. Même s'il menait bon train, sa blessure ne lui permit pas de semer les elfes qui le traquaient.
Toujours silencieux, ils s'arrêtèrent de nouveau quand le renard disparut derrière un promontoire rocheux au dessus duquel poussait un grand orme. Ils le contournèrent et, plus ou moins cachés derrière une grosse souche, aperçurent une sorte de cavité, une petite grotte formée en partie par les rochers maintenus en place par les racines de l'arbre. Un gros buisson au port tombant laissait pendre ses longues branches souples devant l'entrée, la masquant en grande partie pour tout observateur qui ne serait pas assez attentif... C'est là que le renard – ou plutôt la renarde – avait établit son terrier.
Sentant la présence des deux elfes, elle n'osait y rentrer et ses petits, attirés par la présence de leur mère, pointaient timidement leur museau hors du trou creusé dans la terre, près de l'entrée de la petite grotte.

« -Ho, c'est trop mignon ! » murmura Lyss à son frère.
-Leur mère est blessée, elle ne peut plus chasser... Ils ne survivront probablement pas...
-Je sais... Tu penses à la même chose que moi ?
-Il faut croire que oui. Reste là, je reviens ! »


L'elfe aux cheveux flamboyants se leva et s'éloigna du terrier pendant que la renarde le fixait de ses prunelles jaunes.
Il hâta le pas et se mit presque à courir. Il rejoignit la ville rapidement, l'endroit étant situé assez près des premières habitations. Quand il entra chez lui, ses parents et les deux petits frères étaient déjà revenus. Il éluda les réprimandes maternelles, lui lâchant qu'il avait à faire avec Lyss et se saisit discrètement d'un beau morceau de viande fumée volé dans le garde manger familial, qu'il cacha dans un sac avant de repartir avec le tout, sac et viande, plantant là le reste de la famille.
Il rejoignit Lyss le plus vite possible. La nuit était presque tombée mais la renarde était toujours là. L'elfe s'avança vers elle et s'arrêta à distance respectable. Il s'accroupit sur le sol. Lyss le rejoignit et fit de même alors qu'il tendait le morceau de viande à l'animal.
Étonnée mais néanmoins alléchée par le fumet, la renarde hésita tout d'abord. Puis, tiraillée par la faim, elle finit par s'approcher en clopinant et, d'un claquement de gueule, arracha la nourriture des mains de l'elfe. Elle recula et se glissa dans le terrier, sans doute pour manger et allaiter ses petits.
Lyss et son frère se regardèrent, affichant un sourire complice.
En rentrant chez eux, toute la famille les assaillit de questions. Où étaient-ils ? Que faisaient-ils ? Pourquoi être rentrés si tard ? Ils leur suffit de se concerter d'un regard pour savoir qu'ils ne diraient pas la vérité. Aussi mentirent-ils de leur mieux, prétextant qu'ils avaient passé la journée à entraîner Lyss à la magie et que son frère était rentré pour récupérer un livre qu'elle avait oublié.
Bien que leur mère se montra encore un peu sceptique, leur père et leurs deux cadets gobèrent l'histoire d'un bout à l'autre.

Le lendemain soir, ils retournèrent au terrier sous les pierres. La renarde n'était pas encore là. Ils l'attendirent jusqu'à la nuit tombée, mais elle ne vint pas. Inquiets, ils revinrent le lendemain, dès la fin d'après midi. Elle se montra au crépuscule, toujours boitillante. Rassurés, ils recommencèrent la même opération que deux jours plus tôt, offrant à l'animal un repas de viande, mais aussi de petits fruits qu'ils avaient récoltés en chemin.
Plusieurs soirs de suite, ils retrouvèrent la renarde. Au début, elle se montrait méfiante mais, au fil des soirs, elle s'habituait à leur présence et ne les remarquait presque plus. Au dixième jours, les deux elfes furent heureux de constater qu'elle attendait même leur venue. Sa patte allait également de mieux en mieux, et ils avaient bon espoir de voir la renarde reprendre la chasse très bientôt.
Leurs allées et venues semblaient bien étranges aux yeux de leur famille, mais nul n'osait trop les questionner. Leur mère avait également remarqué les disparitions de nourriture, mais Lyss prétendit avoir parfois une petite fringale nocturne depuis quelques temps, expliquant ces disparitions. Son frère confirma ses dires, faisant même mine de penser qu'elle avait prit du poids... Piégée, la pauvre Lyss ne put rien dire pour contredire son frère sous peine de dévoiler le mensonge... « j'me vengerai ! » lui dit-elle en aparté avant qu'il se mette à rire.

Du côté du terrier, les deux elfes étaient presque entièrement intégrés à la famille des renards. La mère ne les craignait plus vraiment et les laissait presque la caresser, quand aux petits, lorsqu'ils commencèrent à sortir du terrier et à jouer entre eux, ils s'avancèrent derechef vers les deux étrangers lorsqu'ils les virent arriver, ils les flairèrent en tournant autour... D'un jappement, leur mère aurait pu les rappeler, mais elle n'en fit rien, se contentant de surveiller très attentivement les réactions des uns et des autres. Lyss était aux anges alors que son frère taquinait l'un des renardeau de la main. Par jeu, l'animal lui mordilla les doigts. Voyant leur frère agir, les petits décidèrent de l'imiter et se jetèrent sur le bras de l'elfe, qui éclata de rire sous les morsures des petites dents, pas assez acérées pour lui faire grand mal.

« -C'est quand même marrant qu'ils nous acceptent comme ça. » S'étonna un jour Lyss en caressant un renardeau qui paressait au soleil, allongé sur une pierre. Ils grandissaient plutôt bien. Leur mère avait reprit la chasse et il n'était pas si rare qu'elle laisse les deux elfes seuls avec ses petits sans en éprouver de grande crainte.
« -Oui. Mais c'est parce que leur mère veut bien. On l'a aidée, elle nous fait confiance. »

Tout les jours ils se retrouvaient au terrier, qu'il pleuve, qu'il vente ou qu'il neige. Parfois séparément mais ensemble le plus souvent. La petite caverne de pierre s'était révélée plus spacieuse que prévue et en cas de mauvais temps leur fournissait un bon abri où ils pouvaient rester paisiblement jouer avec les renardeaux. Quelques fois ils faillirent accidentellement vendre la mèche concernant leur secret. Leur plus grande peur, ils la vécurent le jour où ils durent se terrer au fond de la petite grotte, cachée par les lianes du gros buisson, pour ne pas être repéré par un chasseur qui passait, traquant une proie. Leur cœur manqua un battement lorsqu'il passa tout près du terrier dans lequel les petits étaient terrés, mais trop préoccupé par sa traque, il passa son chemin sans rien voir.
Après cet épisode, ils se méfièrent de plus en plus vis à vis de leur cachette secrète. Ils différaient leurs départs, partant à quelques heures d'intervalles et s'assuraient toujours de ne pas être suivis, multipliant parfois les détours d'une façon un peu trop zélée...
Si quelqu'un savait pourquoi ils venaient là, une âme malveillante aurait pu vouloir s'en prendre aux renardeaux. Et puis ils avaient conscience qu'ils étaient des animaux sauvages. Jamais ils ne devaient dépendre d'eux ou d'autres elfes, ils se le jurèrent.

Parfois, ils se disputaient, comme tout frères et sœurs, et toujours, leur lieu de réconciliation était l'arbre aux renards, comme ils l'avaient surnommé. C'est là aussi qu'ils parlaient seuls à seuls de toutes les secrets qu'ils avaient besoin de confier, sous le regard vigilant de la renarde, perchée sur le promontoire rocheux. les secrets de jeunes elfes que leurs parents ne devaient surtout pas savoir... Et Halista seule savait à quel point la vie sentimentale d'un jeune elfe pouvait être mouvementée...
L'automne venu, les renardeaux quittèrent le terrier, maintenant assez grand pour vivre par eux même, mais leur mère continuait à venir voir les deux jeunes elfes.
Maintenant qu'elle n'avait plus de petits à protéger, elle se montrait bien plus curieuse vis à vis d'eux, et même parfois elle jouait avec eux comme elle le faisait avec ses propres enfants. Lorsque la neige recouvrait la forêt de son épais manteau blanc, ils leur arrivaient de passer la soirée dans la petite grotte, tout les trois. La renarde reniflait leurs fourrures censées les préserver du froid d'un air circonspect et les deux elfes la regardaient faire en riant. Une fois, alors qu'elle s'approchait de lui le museau bas, le rouquin ébouriffa subitement les poils de l'animal qui recula vivement, surprit.

« -Hé bien, quoi ? Moi aussi je vais voir si tes poils te tiennent chaud, ne me regarde pas comme ça ! »

Lyss éclata de rire, bien vite imitée par son frère tandis que la renarde, rassurée par leur gaieté, reprit son examen minutieux.
L'hiver était-il plus court cette année là ou bien le semblait-il seulement, tant il était égayé par leur amitié avec l'animal, les deux jeunes elfes n'auraient su le dire. Toujours est il que bien vite le printemps revint, et avec lui, une nouvelle portée de renardeaux.

Un soir, Lyss rejoignit son frère, déjà en train de jouer avec eux. Elle avait prit du retard, elle s'était arrêtée pour cueillir des fruits sauvages dans l'intention de les partager avec son frère, mais aussi avec la renarde, qui s'était avérée être une grande gourmande...
Ainsi, elle le trouva là, assis par terre, en train de taquiner trois petites boules de poils rousses. Tout concentré qu'il était, il ne l'avait pas entendue arriver. Ses cheveux avaient bien poussés depuis le temps, il faut dire qu'il s'en souciait moins, depuis qu'ils avaient rencontré la renarde. On voyait même quelques mèches blanches qui livraient bataille aux mèches rouges sur son dos. Elle resta quelques secondes immobiles, un étrange sourire flottant sur son visage.
Son frère sursauta lorsqu'elle se signala enfin...

« -Alors ? Ça va, les renards ?
-Hé, tu m'as fait peur, Lyss ! Bien sûr qu'ils vont bien, ça se voit, non ? (un éclair roux lui bondit sur le bras, qu'il chassa d'une féroce chatouille sur le ventre.)
-Hum... Ça valait aussi pour toi... !
-Quoi ? (il se retourna complètement vers elle, incrédule, alors que deux boules de poils revenait à la charge.) Qu'est ce que tu veux dire ?

Lyss lui répondit par un sourire taquin en s'asseyant à ses côtés. La renarde descendit de son promontoire habituel, intéressée par les fruits qu'amenait la jeune elfe.

« -Renard... Ça te va bien, comme surnom...
-Mais... N... Non ! »


Son sourire s'agrandit encore face aux protestations mal aisées de son frère.
Comme elle le faisait si souvent, elle ébouriffa la crinière rousse et blanche, si semblable à celle des jeunes renards.
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#28
A mon tour.

Citation :Pour certains, c'est un endroit dont on ne parle qu'avec apréhension.
Son nom n'évoque alors qu'une gêne sournoise, une peur sourde qui remonte du fond de l'âme avec lenteur, qui fait froid dans le dos et des noeuds dans le ventre, sans qu'on ne sache réellement dire pourquoi.
Pour d'autres c'est un havre de paix.
Là on y trouve la sécurité, le calme, des soins et des remèdes, longs et fastidieux mais plus efficaces que toute autre médecine.

Tout le monde en a déjà entendu parler, peu s'y sont rendus, aucun n'en est jamais revenu sans y avoir été invité.
Pourtant ce n'est paraît-il qu'un repaire de vauriens, de bandits de grand chemin, de voleurs et d'assassins.
Les initiés savent qu'ici la Liberté trouve son dernier rempart.
Tout le monde aura reconnu la cache des Ombres, parfois appelé Le repaire.

Curieusement, il semblerait qu'elle soit partout et nulle part en même temps, dans chaque ville, village, hameau ou ferme, dans chaque colline, montagne, grotte ou plaine, chaque forêt, chaque désert, et même au fond des lacs et des mers...
La Légende dit que partout les Ombres peuvent trouver refuge parmi les leurs et échapper ainsi aux yeux du monde.
Ceux qui liront ces mots devront bien entendu oublier la vérité.
En réalité, le repaire est tout cela, jamais situé plus de quelques lunes au même endroit, presque toujours différent...
Presque.


Son histoire remonte à l'aube des temps, quand la grande cité des Hauts Elfes fût construite, aux racines même du Conclave sur les terres d'Andoras.
A cette époque reculée, un rôdeur nommé Melmoth fit un pacte avec les Dieux, car le dernier monde sur lequel il avait mis le pied était encore trop turbulent pour permettre de s'y développer.
Dans un tourbillon de lumière, de bruit et de mana, il fût emporté de ses lointaines terres pour se retrouver sur les jeunes royaumes d'Andoras.
Il découvre ici un monde nouveau, encore jeune là aussi mais déjà apaisé.
Il rencontre aussi un peuple puissant mais dispersé, ses frères Elfes, et un peuple primaire mais fraternel, les Nains.
Les terres sont encore vierges et sauvages, et tout reste à faire.
Un bel avenir en perspective pour les Ombres.
L'heure était venue...
Ou presque.


Avide de connaissances et d'expérience, le curieux rôde de nombreuses années aux marches du royaume, affronte des Nains devenus progressivement des ennemis par leurs paroles et leurs actes, cotoie de grands Elfes tel le Général Kerita, et fait régulièrement allégeance aux Dieux.
Puis vient l'âge sombre, la magie puissante au-delà des capacités des plus grands mages que cette terre ait jamais porté.
Le monde bascule dans le chaos.
Les peuples sont éparpillés, les villes désertées, les campagnes vidées.
Alors le Messager se retire à l'abri des regards, cherchant un refuge pour les siens.
Et très vite il est pourchassé, car il est bien plus facile de se battre contre ses amis que contre ses ennemis...
Alors le rôdeur devenu paria se déplace (ou plutôt s'enfuit) au gré des bonnes et mauvaises aventures.

Bientôt il s'établit dans les bas-fonds de la grande cité des Elfes.
Là, au bout d'une ruelle étroite, ou les pavés se joignent aux murs pour accompagner une eau croupie qui serpente lentement parmi les effluves nauséabondes, un trou étroit et bas dans un mur à demi écroulé, dissimulé derrière des buissons rabougris et piquants, un passage permet d'accéder à une cour pavée qui semble à l'abandon.
Elle est entourée de colonnades où la lumière ne passe jamais, à l'image des cloîtres païens.
Au centre d'une des arches figure un porche plus noir que la nuit, qu'aucune lumière ne peut pénétrer.
Ici se trouve une porte de bois sombre dont chacun imagine aisément le nom.
Si on y regarde attentivement, on peut voir rôder dans les parages des ombres discrètes et furtives, capuches rabattues, insaisissables.
Légèrement décalée au seuil de cette entrée figure une stèle de pierre.
Dessus est gravée une dague blanche de la pointe de laquelle s'écoule une goutte rouge.


Lorsque les bons mots sont glissés aux Gardiens par la lucarne, une dague acérée pointée dans la nuque par le veilleur à la capuche, la porte s'ouvre sans bruit sur le silence et la poussière d'un grand hall meublé d'un simple tabouret de bois.
Pour ces visiteurs, des portes s'ouvrent ou se ferment dans les murs, là où il ne semblait y avoir rien que la pierre, suivant les humeurs des Gardiens et les droits de chacun.

Pour qui franchit sans encombre cette première salle, leur choix peut se porter sur un salon discret, ou ils pourront discuter avec le Conclave d'intérêts communs,
Ou alors partager la table des Ombres et leurs repas simples mais nourissants, souvent réhaussés de vins goûteux et riches, un luxe que peu peuvent se permettre en toutes circonstances,
Ou alors se faire guider dans la grande bibliothèque au mille ouvrages, certains même oubliés de tous ou n'existant plus à la surface d'Ecridel
Ils peuvent aussi bien choisir de rôder parmi les âmes reposant en paix dans les cryptes insondables, où de multiples objets reposent après les faits d'arme des initiés, certains juste très anciens, d'autre juste très puissants.


Seul les quartiers des initiés ne peuvent être foulés par quiconque n'est pas une Ombre.
Lorsque les bottes des volontaires se portent sur la stèle, point n'est besoin de mots chuchotés aux oreilles des Gardiens pour que la porte ne s'ouvre, sans non plus que la lame froide et acérée ne laisse une petite entaille minuscule à la naissance du cou.
Mais alors le hall n'est pas disposé de même, car il comporte juste derrière l'entrée une alcôve disposée devant une table ronde de bois poli.
Autour de la table, cinq chaises de bois sculptées à haut dossier sont disposées autour, chacune disposée devant une bougie allumée... pour l'instant.
Dans chaque fauteuil figure une silhouette encapuchonnée.
Il faut alors que les réponses aux interrogations des Gardiens ne finissent pas par brûler leurs doigts dans la cire, car lorsque la lumière s'enfuira dans la nuit...

Ceux pour qui la lumière préserve leur ombre, il y a des réserves, des cuisines, des dortoirs... tous les lieux communs des citadelles et des grandes cités sont alors mis à disposition des adeptes.
Mais aussi des coffres, des armureries et des salles d'arme, et enfin la salle du Conseil et la chambre de la voix.
Ces dernières salles ne sont toutefois accessibles qu'avec des laisser-passer, protégées par de puissants sortilèges, des toiles tissées par de puissants mages qui y ont souvent laissé la vie.
Tous ces endroits sont en général assez grands et bien fournis, mais faiblement ornés et meublés, à la manière sobre du Conclave.

Bien entendu, ces lieux n'ont pas été crée en un jour, ni même en un an, mais plutôt en milliers de cycles, un Messager prenant la place d'un autre, ce dernier devenant le scribe de la compagnie avant de se retirer dans les cryptes et d'y trouver le repos éternel.


Comme dans la Légende et les contes de rue, un tel endroit se trouve tantôt ici, tantôt là, passant d'une cité à une autre, d'une grotte à une autre, d'une forêt à une autre.
Alors la ruelle est un petit Ru aux eaux froides, la cour une petite combe au pied d'une cascade joyeuse, l'arche un passage sous les eaux ruisselantes...
Ou bien le ruisseau est un bosquet touffu, la combe une clairière presque inaccessible, le passage sous la cascade est un tronc puissant creusé par les temps...
Ou bien encore le bosquet n'est qu'une crevasse sans fond, la clairière un terrier invisible creusé dans ses flancs, le tronc une cheminée inaccessible...

Partout où on le croit établi, et à chaque cycle de quelques lunes, le Conclave disparaît dans la nuit pour rejoindre une autre cache parfaitement dissimulée.

Ainsi va la légende des Ombres et de sa demeure insaisissable.


Bien entendu, tout cela n'est que le fruit de l'imagination fertile d'un barde, trop bien remercié en boissons ennivrantes pour ses habiles discours.
Tout cela n'est que ragot, bavardages, rumeurs...

Demain, tout sera oublié.
edit : mise en forme idem aux autres conteurs
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#29
La barre est haute !
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#30
Citation :An 497 de l'Ere Antique

Une jeune prêtresse aux cheveux clairs et aux yeux marrons chantonne une prière à Fryelund. Elle porte une simple tunique blanche qu'une fine ceinture de perles serre au niveau de la taille et trace des sillons dans la terre avec son grand bâton aux multiples ornements. Un enfant des rues l'interpelle.

« Bah tu fais quoi dis? »
« Une maison » lui répond-t-elle avec un clin d'oeil. Le garçon lui, n'a pas l'air de trouver ça drôle.
« N'importe quoi ! Une maison y'a des murs, puis des fenêtres et une porte. Toi c'est juste du gribouillis. »
La prêtresse soupire, il n'apprendra donc jamais. « Il faut que tu utilises ton imagination Ciglir. Regarde, là j'ai dessiné les murs, là c'est l'entrée, là on mettrait une table et là... » Elle trace trois longs traits puis un gros carré. « ...il y aurait trois marches menant à une grande chaise pour le chef de maisonnée. Ferme les yeux, imagine puis ouvre les. Tu le vois ? » Il s'exécute.
« Ooooh, oui !» Ciglir s'émerveille alors que rien n'a réellement changé devant lui «C'est de la magie alors?»
Elle le regarde avec étonnement, puis sourit. « Oui, c'est un petit peu comme de la magie. »
Citation :An 752 de l'Ere Antique

Gauche, droite, gauche....Rien à l'horizon.
Grincement de porte, l'elfe retire sa capuche en pénétrant dans la grange miteuse installée juste à l'est d'Asteras. Miteuse ? Oui, mais de l'extérieur seulement. Le lieu est confortablement meublé et les grands miroirs semblent décupler son espace. Des fenêtres sont encastrées dans le toit devant lesquelles sont accrochés de fins tissus bleus laissant filtrer la lumière. D'imposants chandeliers sont placés aux quatre coin de la pièce ainsi que sur la grande table du milieu. Ils sont recouverts de dizaines et de dizaines de hautes bougies rouges à peine consumées.

« Alors, quelles nouvelles ? » demande un Ciglir décapuchonné. Deux de ses compères se tiennent debout autour de la table, ils débattent devant une énorme carte.
« Dans le sud tout va bien, nos terres y sont fertiles et fructueuses. A noter qu'on ne déplore aucun soucis pour le transport jusqu'à la capitale, ça fait deux cents ans qu'on a pas croisé d'être doté d'intelligence dans la région. »
« Et c'est pas avec toi que ça va changer Ciglir ! ».
« Ouais ouais, drôle. Je crois pas que tu vas me manquer toi.»
« On se calme. »
Un quatrième larron est posé sur une grosse chaise en chêne au fond de la pièce qui surplombe le reste de la salle de trois marches de hauteur.
« Nous sommes une famille maintenant, souvenez-vous en et arrêter de vous comporter comme des gosses des rues, ce temps est révolu depuis bien longtemps. Avec tout l'argent qu'on va se faire en occupant les terres du sud, nous achèteront notre noblesse. »
« Et de la piquette ! » Ajoute Ciglir. L'autre le regarde sombrement avant de se fendre d'un demi sourire.
« Oui, et de la piquette » lui répond-il.

Ciglir était un clown mais un clown futé et plein de ressources : c'est lui qui avait eu l'idée de former une confrérie avec les autres enfants des quartiers pauvres, c'est lui qui avait entrepris la construction de ce lieu de réunion. L'elfe assis sur le trône avait apporté du muscle et de l'organisation aux folles idées de son jeune ami. Une guilde de crève-la-faim se ferait mal voir des hautes autorités d'Asteras. Une famille noble, par contre...

« Au fait » reprend Ciglir « vous saviez que Brengen-le-Barde a vu de la roche enfanter des nains à l'est du fleuve. On devrait aller voir. »
« Des nains, c'est cela...Et des dragons aussi je suppose ? Ne me dis pas que tu crois à ces comptes pour enfants ? De toute façon toi tu pars au sud.»

Ciglir pose son sac sur la table et en sort un tout petit parchemin peint reposant dans un cadre de bois qu'il cloue au mur à côté de la porte d'entrée. Le sifflement d'un de ses compagnons lui perce les oreilles.
« Fiouuu, jolie la donzelle. C'est qui ? »
« Une vieille amie, elle est morte hier. »
« Erf, je n'aime pas trop me faire reluquer par un mort. »
« Ne sais-tu pas que les morts nous regardent toujours ? »
« Si tu le dis. Enfin, tant que ça ne devient pas une habitude... »


Le temps passe et les visages s'estompent.
Citation :An 2503 de l'Ere Antique

L'ensemble de la famille s'était rassemblée dans la grande salle. Les fins rideaux bleus avaient été remplacés par de lourd tentures noires qui ne laissaient passer aucune lumière et toutes les bougies avaient été allumées. Dehors il faisait nuit noire et chacun avait bien pris soin de ne pas être suivi avant de pénétrer dans ce lieu chargé d'histoire, certains avaient fait le voyage depuis plus de neuf cent lieues au sud.

Les membres les plus éminents de leur noble famille avaient pris place à table devant le petit escalier qui menait au trône, celui-ci était vide. Cephulyr, petit-fils de Ciglir ne s'y asseyerait qu'à la fin de la cérémonie des portraits, après avoir rendu hommage à son père et aux autres braves tombés devant les démons.
Un jeune guerrier qui voulait accrocher la peinture du visage d'un nain de Fondelame qui lui aurait sauvé la vie durant la bataille fut jeté dehors sous les insultes et les coups de pieds.

Ils mangèrent et prièrent en silence. Et pleurèrent aussi. Unis sous le toit de bois et ce lien si puissant qu'est celui de la famille.
Citation :An 59 de l'Ere du Déclin

« Non ! Je vous l'interdis vous m'entendez, JE VOUS L'INTERDIS » Un grand elfe en armure fulmine devant son trône. Il jure, il crie, et ceux assis à la table devant lui baissent les yeux.
« La guerre est finie, nous avons perdus. Nous n'avons pas d'autre choix.» supplie l'un d'entre eux.
« Nous avons le choix de nous BATTRE ! » lui crache-t-il à la figure. « Nous battre pour nos terres, pour nos enfants. Ces Haldors ont eu de la chance jusqu'à maintenant. Si nous tenons bon nous pouvons encore renverser le cours de cette guerre. »
« Mais la forêt nous appelle et... »
« C'est votre PEUR qui vous appelle. Que ferez-vous une fois dans votre précieuse forêt ? Vous vivrez nus sous une feuille de vigne et logerez dans des arbres ? Libre, oui, mais de cette liberté insousciante qu'ont les enfants. Un jour vous devrez faire face à vos responsabilités et ce jour là il sera trop tard. Pour votre bien, je vous interdis de suivre ce fou de Pelethor. »

« ARRRRREEEETEUUUUH ! » entend-on crier. Deux fillettes se chamaillent derrière le trône, l'une semble vouloir empêcher l'autre de lire un gros ouvrage et la tapote de son épée de bois.
« SILENCE ! » Elles se taisent instantanément. Celle à l'épée s'assied par terre et croise les bras d'un air boudeur.
« Regardez mes nièces, allez leur dire qu'elles doivent tout quitter pour aller manger du serpent cru et vivre dans les bois comme des animaux. » Il se laisse tomber sur la grosse chaise de bois, las.
« Demain, » dit-il d'une voix lasse « partez avec nos armées pour le sud. Je vous en prie, par l'acier et la mana. Et pour la victoire ».
Citation :An 74 de l'Ere du Déclin

La petite fille à l'épée de bois est devenue adulte et le temps à su briser ses rêves comme il a brisé ses pères.

Comme à chaque fois qu'elle se sentait d'humeur de nain, Daenariel s'était réfugiée dans la vieille grange familiale. Une jambe posée au dessus de l'accoudoir, elle est nonchalamment assise sur la grande chaise de ses ancêtres. Elle sirote un énième verre de rouge -celui de trop, probablement- tout en contemplant ce qu'avait un jour imaginée une autre fille aux yeux marrons.

Miroirs fendus, bougies consumées, rideaux délavés, la salle familiale n'est plus que l'ombre de ce qu'elle était jadis. Au mur, des dizaines de portraits couverts de poussière semblent la regarder avec pitié. Des visages oubliés pour la plupart, elle ne saurait en nommer la majorité. Et puis il y a les sept qu'elle avait vu son oncle découper dans un accès de rage avant d'embarquer tous les adultes de sa famille à aller combattre les Haldors et ne jamais revenir.

« Vous êtes tous...morts... » lache-t-elle d'une voix que la boisson et la fatigue ont rendu rauque et hésitante. « Que ce soit paisiblement dans vos lits, en héros à la guerre ou comme des rats en fuyant l'ennemi. Vos actes vous ont tous emmenés dans la tombe »
Elle lance son verre qui explose contre le dernier tableau, celui de son frère, Anarion, le vin rouge imprégnant le tissu qui retranscrivait si bien son noble teint blanc. Il était mort récemment, bouffé par un insecte géant dans une caverne au fin fond de nulle part car il s'était mis en tête que pour faire ses preuves il devait "se tester" contre une abomination. Quel abruti !
« Et moi seule vis pour en payer les conséquences.»

Elle se lève de son trône de regrets, titube jusqu'à l'entrée et regarde d'un œil torve ce portrait si vieux et si petit. L'a-t-elle seulement déjà vu, ce visage ? Il lui semble que non. Pourtant elle se sent mieux à le regarder. Pas longtemps, juste quelques secondes. Après quoi elle détourne le regard et ferme la porte à clé avant de s'étaler par terre. Personne ne la verrait dans cet état.

Aujourd'hui elle se laisserait emporter par le sommeil. Peut-être même vomirait-elle au milieu de la nuit. Quoiqu'il en soit, demain, elle mettrait ses plus beaux habits pour se rendre à l'école de magie. Car elle n'est pas tout à fait seule. Elle a une sœur, oui, une mage respectée et si elle arrivait à la convaincre d'autres se joindraient bientôt à sa cause.

Et les traîtres saigneront.
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