Jozz & Fînn

[Jozz]

Elle s'éveilla.

Où?

Du sang coulait le long de sa tempe; sa joue baignait dedans.
Elle se redressa péniblement et reconnut l'intérieur de sa maison.

Soudain, son sang se glaça et elle hurla:

Fînn !! Fîîîîînnnn !!!!!!!!!!!!!

Mais son regard avait déjà balayé l'intégralité de l'unique pièce de l'habitat, et il n'y avait d'autre présence qu'elle.
Son coeur commençait à battre la chamade, et elle se sentit suffoquer.

La jeune naine se précipita alors vers la porte, qui était grande ouverte; mais dehors elle ne fut pas plus heureuse.

Elle tomba alors à genoux, dans la neige, et fit ce serment, entre deux sanglots:

Vous me le paierez, par Thuri! Que Grungar m'en soit témoin: vous me le paierez!

[Jozz]

Ils ne se donnent même plus la peine de me recevoir!
grogna-t-elle.

Cela faisait deux semaines qu'elle faisait quotidiennement le trajet jusqu'à Karad Zirkonnen, pour demander de lancer une expédition contre les Elfes des Neiges.

Pourtant, on en était toujours au même point. Et Fînn qui pouvait être mort...

Dans ses yeux verts se lisait la rage. Elle haïssait ces créatures qui, du jour au lendemain, lui avaient pris son plus précieux cadeau de la vie, et de surcroît, elle commençait à entretenir un mauvais ressentiment envers ses congénères, du fait qu'aucun ne daigne s'occuper d'elle et de Fînn.

Elle soupira:
Fînn, tiens bon, je t'en supplie!

[Jozz]

La jeune naine se savait être l'objet d'une attention particulière dans cette taverne; ce qui n'a rien d'anormal en soi, dans un établissement en plein territoire agar.
Elle commanda une pinte, dont le goût lui déplut.

Rien ne vaut une vraie bière naine!
se dit-elle.

Du coin de l'oeil elle avait identifié ce qu'elle cherchait.
Elle déploya sa longue chevelure brune, pour se détendre, puis les rattacha en queue de cheval.
Ensuite, elle commanda une hydromel, pour se donner du courage. Elle en but la moitié, y trouvant davantage de plaisir qu'avec la bière. Après quoi elle s'avança vers le fond de la pièce et se glissa discrètement à une table.

Jozz observa longuement l'agarim qui se tenait face à elle, et dont l'apparence était plutôt mystérieuse. Il n'avait pas bougé et semblait amusé de la tournure des événements.


Bonjour. Désolé pour cette intrusion. Je me nomme Jozz.
Vous êtes Hemdl, je présume?


Que lui veut-on?


Je suis à la recherche de toutes les informations possibles sur les Elfes des Neiges; et je viens de loin, comme vous vous en doutez, pour vous rencontrer.

L'homme tira longuement sur sa pipe, en silence. Il s'avança alors et parla à voix basse:


Et qu'est-ce qui vous fait croire que je voudrais vous aider?

Jozz soupira. C'était un point délicat auquel elle s'attendait avec quelque désappointement.


Mon mari, Fînn, a été enlevé par les Elfes des Neiges.
Nous sommes fermiers, alors malheureusement je n'ai pas grand chose à vous offrir. Tout au plus quelques piécettes.
Je dois le retrouver. Comprenez vous ?

[Jozz]

Comment cela s'est-il passé?


Cela remonte à l'hiver dernier. Il avait neigé durant la journée, nous étions dans notre petite ferme, et la nuit venait d'arriver. J'étais penchée à laver des habits, quand j'ai reçu un coup sur la nuque. J'ai perdu connaissance et lorsque j'ai repris mes esprits, la porte était grande ouverte, et Fînn avait disparu.

Hemdl se rembrumit et demanda d'une voix perplexe:

Ainsi donc, vous n'avez pas vu votre aggresseur. Qu'est-ce qui vous fait croire que les Elfes des Neiges sont derrière tout ça? Il y a de nombreux brigands dans ces contrées, par exemple...


Cher Monsieur, je lis très bien dans vos yeux, ce que vous vous dîtes: le gosse en avait marre de sa mégère, il lui a mis un coup et s'en est allé. Mais je vous assure qu'il n'en est rien!
Fînn et moi vivons une formidable idylle, et il n'y a eu dispute d'aucune sorte avant cela. Alors pourquoi j'accuse ainsi les Elfes des Neiges?
Tout d'abord, je rappelle que ces créatures ont la réputation de commettre ce genre de méfaits, particulièrement chez les enfants.
Mais surtout: quand je me suis ruée vers la porte, j'ai constaté qu'il n'y avait aucune trace de pas. Pas la moindre. Alors, expliquez-moi donc: comment Fînn aurait-il pu s'enfuir ainsi sans laisser de trace?
Si cela ce n'est pas la signature des Elfes des Neiges, je veux bien recevoir dix coups de fouet!

L'Agarim méditait le sujet, en silence.

[Jozz]

La patience... Jozz n'avait même pas conscience de cette qualité qui était en elle.
Pour elle, il était tout simplement inconcevable d'abandonner Fînn.
Elle avait obtenu quelques précieuses informations de la part de son contact le rôdeur; mais personne pour l'accompagner.

Avec le temps elle s'était résignée à rejoindre une guilde, en se disant qu'elle pourrait peut-être arriver à les convaincre de l'aider, mais après plus plusieurs printemps au sein de l'Egide de Myrinn, l'heure du bilan était arrivée.
Si Jozz avait pleinement intégré les rangs, se forgeant une solide réputation à l'issue de trépidantes aventures avec ses compagnons; elle n'avait pourtant pas réussi à les entraîner sur les chemins menant à Cyrijäl.

Elle avait donc été très occupée, et on aurait pu croire que cela aurait pu faire office de distraction. Ce serait bien mal la connaître: Jozz ne perdait pas de vue son objectif, il fallait délivrer Fînn coûte que coûte!

Fînn, tiens bon, je t'en prie!
Tant pis: mieux vaut être seule que mal accompagnée!

Elle prit la direction des portes de la ville, mais chemin faisant, un messager l'intercepta.

Quoi encore!! grogna-t-elle.
L'homme resta coi.
Puis elle ajouta, d'un ton railleur:
Restez-donc un moment, je vais leur faire connaître ma réponse...

[Jozz]

Jozz observait les abords de la cité elfique.
Cette fois, on y est. songea-t-elle.

Elle se remit en route, se remémorant les indications qui lui avaient été données.
Elle décela la présence d'un elfe, ainsi que de multiples cerfs.

Instinctivement elle sonda le ciel, et n'y trouva pas de lune.
"Par une nuit sans lune, avec une gemme de vie en poche, il se dit que les créatures qui sont sous le pouvoir des elfes des neiges, ne pourront vous voir."
Il était temps de vérifier cette information.

Les cerfs sentirent sa présence, et commencèrent à se diriger vers elle. Ils l'entouraient maintenant, mais aucun ne l'attaquaient; ils continuaient de renifler.
Elle les contourna et se dirigea vers le Castel d'Alcascyr, et y pénétra.
Elle ne s'attarda pas sur les magnifiques portraits accrochés aux mûrs: vu le danger, il était préférable de trouver les geôles au plus vite.

La jeune naine poursuivit donc ses recherches, mais le Castel semblait constitué d'un hall d'entrée et d'une unique grande salle. Un astrolabe arborait la pièce.

Qu'est-ce que c'est que ce truc?
On dirait des cartes, mais pourquoi les avoir représentées sur une balle?
Est-ce que ça ne servirait pas de levier pour activer un passage secret, par hasard?

Elle posa ses mains dessus... et c'est alors qu'une forte lueur émana du globe et qu'une déflagration s'ensuivit.

Pour la discrétion, on repassera! se dit-elle.

[Jozz]

A peine sortie du Castel qu'elle fit face à un groupe de ce qui semblait être des dignitaires:

Entendu Reine Mélyriëlle
*fronce légèrement les sourcils*
Où... Où allez-vous ?

Ce dernier s'adressait à l'une des deux elfes qui semblait se concentrer pour faire affluer leur magie et ouvrir une faille


A côté, un étrange personnage lança:
Maintenant!

Face à eux, Jozz rassembla tout son courage et s'écria d'un coup:
Relâchez Fînn immédiatement!

[Jozz]

Jozz craignant que la faille ne serve à fuir, ou à invoquer des renforts, lança un sort de Sables mouvants, qui ralentirait le petit groupe touché.
Les réactions chez les elfes semblaient diverses.
Mais ce fut la reine qui parla la première, intimant forcément le silence aux autres:

J'admire ton courage: venir nous interrompre... Vois-tu où nous sommes et qui tu affrontes?

Je devrais ordonner ton exécution, mais... à bien y réfléchir...

Je crois que tu cherches Fînn, n'est-ce pas?
Il se pourrait fort bien que te révéler la vérité à son sujet, soit un châtiment bien pire pour toi.

La reine Mélyriëlle, écarta les mains à la verticale et aussitôt un flash vint éblouir et perturber les sens de la naine.

[Jozz]

Jozz eu encore le tournis quelques instants après que sa vision fut rétablie.
Elle remarqua un personnage s'affairant dans une maison...
...
Sa maison, en fait!
Et le personnage c'était elle.
C'était comme si elle se voyait depuis le toit de sa maison, mais la Jozz observatrice n'avait pas de forme: il s'agissait d'une pure vision.

Elle se concentra sur la scène
Elle se vit lavant son linge, quand soudain elle fut prise de spasmes et tomba à terre.
La Jozz "d'en-bas" continua à se congestionner ainsi pendant plusieurs dizaines de secondes.
Des grognements sortaient de sa bouche, ainsi qu'une épaisse bave toute pleine de bulles.

Au bout de quelques minutes, elle se vit se redresser, essuyer sa bouche d'un revers de sa manche, marcher vers la porte, l'ouvrir, puis revenir, ramasser une bûche destinée à la cheminée puis revenir près du bac à linge pour se donner un énorme coup de bûche derrière la tête.

Elle perdit alors connaissance sur les deux plans.