Hector Di Scudira
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Victor revient quelques jours plus tard. Depuis qu'il était sorti de cette chambre, il avait l'impression que son cœur s'était resserré sur lui-même.
Après que les effets de l'élixir avaient complètement disparu, il avait été pris d'une brusque colère. Colère contre lui, colère contre tout. Il avait mis en pièces l'un des mannequins du camp d'entraînement, mais personne n'était venu le voir de peur de finir en pièces également.
Il passait ses journées à s'entraîner même si on lui avait dit de se tenir tranquille encore un peu, à aller boire dans des tavernes, et avait même déclenché une bagarre dans l'une de celles-ci.
Non, il n'allait pas très bien.
Il s'était décidé. il avait dit qu'il retournerait la voir, il allait retourner la voir. Même si maintenant il ne voulait pas à nouveau affronter sa potentielle colère.
Arrivé au dispensaire, il salua d'un sourire poli les infirmières, quand bien même il n'avait aucune envie de sourire. Il demanda des nouvelles de Selinde et s'assura qu'elle était là.
Il se dirigea vers sa chambre et s'arrêta devant la porte. Sa gorge se noua une fois de plus et il hésita. Finalement, il toqua, attendit qu'on lui dise d'entrer et ouvrit la porte puis la referma avec soin derrière lui, faisant face à la jeune femme.
"Entrez."
Déjà l'heure de la visite quotidienne du Disciple qui veillait à sa guérison ? Le temps s'était écoulé avec une déconcertante rapidité depuis qu'elle s'était remise à étudier son vieux grimoire. Elle s'étira paresseusement, une plume d'oie encore dans la main et se retourna de son petit bureau pour saluer d'un sourire son médecin habituel.
"Victor."
Ses traits se figèrent dans l'indifférence. Elle ne referait pas la même erreur.
"Que me vaut votre visite ?"
Hector Di Scudira
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Le jeune homme blêmit un peu en voyant son indifférence apparente et l'entendant le vouvoyer. Alors c'était ça ? Elle allait faire comme si de rien n'était ?
Il croisa les bras et reprit contenance, la regardant droit dans les yeux.
« S'il te plait, Selinde. Je sais que c'est de ma faute, que je n'aurais pas dû lire la lettre. Je suis venu m'excuser encore une fois. »
Il se rapprocha un peu.
« Je ne peux pas faire comme s'il ne s'était rien passé. J'ai envie de continuer à passer du temps avec toi tant qu'on le peut.
Ne m'ignore pas. »
Il avait envie de se rapprocher encore et de la prendre dans ses bras, de caresser sa joue et de l'embrasser, mais il ne pouvait pas.
Sa gorge était tellement serrée qu'il avait eu du mal à finir sa phrase. Il cherchait à garder contenance pour ne pas se montrer faible. Et pourtant, il devait bien se rendre à l'évidence... Face à elle, il l'était.
Et dire qu'au départ, il voulait juste s'amuser.
"Je ne vois pas de quoi vous parlez. Et même si c'était le cas, pensez-vous que je vous pardonnerai votre trahison aussi facilement ?"
Elle sembla hésiter un bref instant. Elle s'adossa confortablement à son siège comme s'il n'existait pas et attrapa un parchemin vierge pour y écrire quelques mots.
"Puisque vous êtes là, autant vous rendre utile. Pouvez-vous porter ceci à un coursier pour que son destinataire puisse le recevoir dans les plus brefs délais ?"
Elle le plia soigneusement et lui tendit. Aucun nom n'était inscrit dessus.
Hector Di Scudira
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Il avait envie de se mettre à genoux pour la supplier de le pardonner. Mais il n'était même pas sûr que ça marcherait. Il resserra sa prise sur son épée et prit la lettre de l'autre main en évitant de trembler.
Il contracta la mâchoire et rouvrit la porte.
« Je reviens... »
Il sortit et s'éloigna jusqu'à arriver dans le hall, demandant un messager. On lui en indiqua justement un qui partait et il le rattrapa. Il lui donna la lettre et le paya. Lorsque le garçon demanda pour qui était la lettre, ses lèvres s'étirèrent en un pincement.
Eeeet... Évidemment, elle ne lui avait rien dit. Et il n'allait pas lire la lettre. Mais elle ne lui avait pas tendu un papier où elle n'avait quasiment pas écrit ?
Il ne savait plus, il était mal parce qu'elle était extrêmement froide avec lui, et n'avait pas tant fait attention à ce qu'il se passait.
Après avoir hésité sous l'œil impatient du coursier, il ouvrit la page et eut un instant d'arrêt, puis la replia.
Citation :Embrasse-moi Victor.
« Laissez tomber. »
Il fit volte-face, laissant la commission au garçon qui ne comprenait plus grand chose, et se précipita vers la chambre. Mais avant d'y entrer, il s'arrêta finalement en souriant. Après réflexion...
Il entra dans la chambre sans sourire et s'approcha de nouveau de Selinde.
« Il faudrait peut-être qu'il y ait un destinataire pour que je puisse donner ceci à un coursier... »
Il avait un air complètement neutre et la fixait.
"Parce que vous vous souciez du destinataire avant de lire un courrier à présent ?"
Son ton avait été terriblement sarcastique, mais elle avait un petit sourire qui se dessinait discrètement à la commissure de ses lèvres. Bien sûr, elle n'avait aucune certitude sur ce qu'il en avait fait en extérieur. Dans le fond, cela n'avait pas d'importance.
D'un haussement d'épaule se voulant désabusé, elle retournera à son grimoire comme si de rien n'était.
"Vous n'avez qu'à l'ouvrir."
Hector Di Scudira
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Il souriait intérieurement et n'avait qu'une envie, c'était lui obéir et joindre leurs lèvres... Mais elle voulait jouer, alors il jouait.
Il ne sembla pas être atteint par la pique de la jeune femme et se contenta de se rapprocher un peu plus en soupirant.
« Écoute, j'ai bien compris que je ne devais plus lire tes courriers. Je te le promets, je ne lirai plus tes lettres. »
Mais pourtant il avait lu celle-là. Ceci dit, c'était vrai, il tiendrait sa promesse. Il savait depuis longtemps que lire la correspondance d'autrui était mal, mais il n'avait pas pu s'en empêcher. Mais il l'avait lu avant de promettre qu'il ne le ferait plus.
Il esquissa un faible sourire.
« J'ai retenu la leçon. Maintenant dis-moi pour qui est-ce s'il te plait, le coursier attend... »
Il essayait de ne pas sourire et de se retenir. Il pourrait l'embrasser bientôt, dès qu'ils auraient fini de jouer la comédie.
Elle fit mine de réfléchir, et tendit la main en sa direction, toujours très froidement.
"Rendez-la moi."
Ce qu'il fit sans se faire prier d'avantage. Elle eut un demi-sourire amusé en observant les pliures qui n'étaient plus aussi nettes qu'à l'origine. Elle garderait pour elle la connaissance de son méfait.
Essuyant le surplus d'encre de sa plume sur les rebords de son encrier avec bien trop attention pour être honnête, elle finit par inscrire le nom du destinataire dans une extrême lenteur. Il savait après tout... Alors elle prenait ce malin plaisir à maintenir cette tension illusoire entre eux.
Citation :Victor Di Velija
Elle lui tendit à nouveau.
"Maintenant, tu peux l'ouvrir."
Hector Di Scudira
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Victor lui tendit le papier en se mettant près d'elle, l'observant écrire son nom avec un petit sourire. Elle s'amusait à le faire patienter un peu plus apparemment.
Il prit finalement le papier et le rouvrit en relisant les mots écrits avec un grand sourire, s'assurant qu'il n'avait pas rêvé.
Il se baissa vers elle pour l'embrasser avec passion, lâchant le mot sur le petit bureau et prenant avec douceur son visage dans ses mains.
Son cœur battait plus vite que d'habitude. Enfin. Il avait eu l'impression d'être un fantôme depuis qu'il était sorti de cette chambre il y a quelques jours, mais il revivait enfin.
Sa peau, ses lèvres, son odeur, sa voix...
A peine l'avait-elle revu que ses sens l'avaient violemment assailli pour qu'elle abandonne ses sinistres résolutions à son égard. Les battements de son coeur s'étaient accélérés soudainement à l'instant même où ses magnifiques yeux bleus s'étaient, à nouveau, posés sur elle. Il exerçait chez elle une attirance qui lui était étrangère, nouvelle, mais pas désagréable pour autant.
Durant ses derniers jours, elle avait ressenti un affreux sentiment de manque, qu'elle avait mis en premier lieu sur l'absence de ses frères. Mais ce n'était ni le visage de Dione, ni celui de Yan qu'elle voyait en fermant les yeux avant de s'endormir. Alors elle avait froidement œuvré à ses ambitions et à sa Salamandre, dans l'espoir de bâtir les remparts nécessaires à la protéger de l'exil, dans l'espoir d'oublier ces instants avec Victor aussi.
A présent, Selinde l'embrassait à en perdre la tête, simplement heureuse d'être avec lui.
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