Athanor
#1
Citation :Mon exquise Mhara,

Ne vous figurez pas que je vous envoie cette lettre au nom d'un intérêt pour votre personne. Je le constate de jour en jour, celui-ci décline, comme une braise qui s'éteint doucement dans son lit de charbons ardents. Seulement, malgré une existence combien plus aventureuse que la votre, il m'arrive de trouver des moments d'ennui, et je le sais, vous trouvez ces mêmes moments. Seule dans votre couche aux douces soieries, que vous autorisez à caresser votre corps, vous vous morfondez.

Il m'est venu l'envie de vous évoquer une histoire, moi aussi. Après tout, vous seriez bien légitime de vous demander pourquoi, lorsque je vous tenais encore en mon pouvoir, je vous ai fait tisser ce blason à l'emblème de ce que vous aviez alors nommé 'un étrange lézard'. Une salamandre donc. Il s'agit d'un récit de rien, l'histoire d'un garçon, ou encore la petite histoire, qui sera noyée bientôt dans celle du monde tout entier.

Vous serez surprise d'apprendre que j'ai vaincu mon premier dragon alors que je n'avais guère plus de sept ans. Une extraordinaire créature mesurant sincèrement plus que trente centimètres avait soudain envahi l'endroit forestier à l'extérieur d'Yris où, avec ma sœur, nous récoltions de l'eau. Seul, j'étais parvenu à la défaire, et je me faisais une fierté de rapporter le sanglant trophée à notre mère, qui devrait bien reconnaître là l'exploit d'un authentique chevalier, vous en convenez.

Le camouflet que j'essuyais m'indiqua la mesure de son déplaisir. Cependant, vous n'imaginez pas combien cette douleur au visage rassurait le garçon que j'étais alors. Lorsque votre mère fréquente chaque jour et chaque nuit d'étranges hommes, il vous vient des interrogations sur ce que vous devez accomplir pour mériter plus d'attention, sur ce que vous devez faire pour reconquérir la place que ces autres ont su ravir dans son cœur. Cela signifiait que je ne lui étais pas indifférent, et cela me blessait, mais me convenait.

A sa demande, j'avais emporté le cadavre du monstre pour m'en débarrasser. Seulement une autre pensée remplaça celle-ci dans mon esprit, lorsque je me rendis compte que le cœur de la chose palpitait encore malgré les mutilations qu'elle avait subie. Je filais dérober quelques bandages et dans un refuge dehors, j'entrepris de panser les blessures de la salamandre.

Certaines légendes disent que la salamandre n'a rien à craindre d'une fournaise. C'est un mensonge que Selinde avait déjà été en mesure d'établir. Au mieux sa tendance à vivre dans l'humidité la rend un peu plus ardue à enflammer. En revanche, je m'extasiais de sa capacité prodigieuse au fil des jours à régénérer ses membres tranchés.

Vous vous en doutez, je finis par m'attacher à Vae-Vi, comme je l'avais nommée. Vae-Vi, vas et vis, voilà le conseil que je lui avais donné, répété même, mais elle ne partait jamais très loin. Sa stupidité était elle aussi prodigieuse.

Malgré tout, j'ai hérité en quelque sorte par une forme d'évidence de la responsabilité de la surveiller pendant les mois qui suivirent. Elle avait fini par reprendre bonne santé, malgré quelques cicatrices persistantes de notre combat. J'ai même eu le privilège de l'accompagner dans sa maternité, plusieurs fois, et aussi étonnant qu'on peut l'imaginer, j'ai appris à repérer tout les enfants qu'elle avait répandu dans le petit étang de notre rencontre. Cela ne comptait pas pour grand chose, mais j'ai protégé la descendance de Vae-Vi de toutes sortes de désagréments, à commencer par les autres gamins. Voilà comment je suis devenu le Chevalier de la Salamandre.

Rien ne perdure pour toujours, et quelques mois encore plus tard, vint le moment des funérailles de Vae-Vi. Lev, Yan et Selinde, l'Ordre de la Salamandre au complet de son effectif à cette époque, m'assistaient pour honorer le corps de la créature d'une digne fin. Vous trouverez peut être ceci absurde, mais quelque chose dans mon esprit faisait que lorsque je pensais à la salamandre, je me rappelais l'amour de ma mère. Je pouvais me consoler de sa mort, mais pas d'en être séparé. Alors avec l'aide des autres, nous l'avons dépecée et avons organisé un rituel à nous pour finir par la manger et ainsi, voler sa ténacité et son endurance face aux souffrances qu'elle avait traversées dans sa vie, son courage à lutter pour que la génération suivante soit en mesure d'exister.

Vous savez, j'entends d'ici les moqueries jaillir de votre bouche insolente. Pourtant, je sais aussi que vous savez en apprécier l'ironie, parce que vous, en tant que ménestrel, avez conscience de combien le ridicule et le sublime s'épousent parfois de façon inattendue.

Quand je regarde au plus profond de moi, je crois que le garçon dont je vous ai parlé n'a pas totalement laissé sa place à l'adulte.

Voilà que les autres se réveillent, et qu'il me faut préparer mes armes pour livrer bataille à la forteresse du Jarl Aaren sur les marches de l'Ingemann.

Autorisez-moi, méprisable haute-elfe, d'imaginer cette nuit que je vous ai rejoint dans votre couche et que mon visage touche votre blanche nuque, et que mes doigts filent dans le plaisant jais de votre chevelure.

Votre éternel chevalier,
Dione
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#2
De bon matin, ou plutôt de bon midi, Mhara s'éveilla sous la douceur des rayons de soleil. Ses yeux papillote, puis elle remonte sa tendre couette jusqu'au coup, sur sa table de chevet, à coté d'un verre d'eau un pli est délicatement posé. Cela éveille son attention et elle décide de sortir de son cocon, les épaules toujours couvertes par une étoffe froissée elle ouvre la lettre. Elle lit la première ligne, les yeux plissé d'effort, elle regarde la taille, une moue désapprobatrice, elle regarde les derniers mots. Après un bâillement, elle quitte son lit et se lance dans sa journée, laissant tombé nonchalamment le papier.

C'était la pire méthode de réveil qu'on m'est faite, je me demande qui en est l'auteur...

Saaallaaaaaaaaaaaade, viens mon bébéé.
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#3
Citation :Mon fringuant Dione,

C'est avec grand plaisir que j'ai découvert (sous mon lit [cocasse, non ?]) et lu votre lettre. Un délice : vos grand airs, votre réserve, votre détachement, tout ce qui m'a ravi au premier abord chez vous. C'est le croquant, puis vient le moelleux, l'anecdote de votre enfance. La déferlante de douceur avec la pose qui vous peint en fragile victime. J'avoue être surprise de vous voir si rapidement changer votre approche. Il faut avouer que jouer les grand gaillard avec votre jolis déliés et la distance c'est plus compliqué.

Un grand merci donc. Je vous laisse m'imaginer comme vous le souhaitez, cela doit être assez différent de la réalité [heureusement] et vous aussi [ça doit l'être aussi]. C'est votre esprit, grand mal me prendrait de le réclamer ou essayer de le diriger. Ne sortant plus (beaucoup[ne vous inquiétez pas pour mes jambes -ni pour ma pointe de vitesse-] ces temps-ci [sauf en douce-dès que j'ai l'occasion]) j'ai pratiqué le tissage. C'est fort ennuyeux(comme le reste [pas vous-quoique- bien sûr]), mais je progresse. L'idée de satisfaire la demande ne m'a jamais apparu impossible (comme le reste [vous aussi]) et je m'approche de mon exigence.

Dans ma grande clairvoyance j'ai aussi investi mon temps dans la recherche de conception de coussin et patron plus sophistiqué. L'idée qui a semée ces graines (géniale [comme moi]) me fait penser à vous régulièrement (mon honnêteté est sans pareil, prenez en de la graine [prenez votre temps -vous ne pouvez faire autrement- il n'est pas bon de se précipiter]) et me permet de changer d'idées parfois. Mon errance et les rencontres qui l'ont accompagnées n'étaient pas que vaines, je vous dois un second merci.

Les divertissements sont plaisant, le reste aussi, ne vous inquiétez donc pas trop (dans la limite du possible [et du politiquement correct] pour moi). Ma progression se situe sur un autre plan, mais si vous y tenez envoyez donc moi un petit paysage de votre position (ça à l'air sympathique [tout autant que rustique -c'est suffisamment poli ?- je regretterai presque mon absence à vos coté -si seulement je partageais vos goûts <simple>-] et exotique). Je me doute que vous attendez le troisième merci, oui c'est celui du paysage, j'ai aussi besoin de poussière de mana fraîche pour une expérience, vous pourrez l'y joindre à cette délicate attention qui ne tardera pas à m'arriver.

Arrivant à la fin du parchemin je vos envoie mes salutation condensées mais complétement sincères. J'attends avec impatience la suite de votre prometteuse histoire, limitez le pathos quand même, j'ai la larme facile (et un maquillage d'intérieur).

L'exquise (bien trouvé je n'osais pas mais puisque ça vous vas) Mhara-Ton.
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