Tout n'est que tromperie.
#1
Citation : Le texte en bleu est narré au présent , le texte en orange est un récit du grand père d'Evenisse (également au présent) et la partie en noir est racontée sous forme de retours en arrière.

Pourquoi avoir fait si compliqué ? Parce que je voulais écrire quelques chose de différent et j'espère que ça restera assez clair pour ceux qui souhaiterait lire.

Pour aider à la compréhension, voici un petit rappel au cas où:

Evenisse
Gigon= Grand père d'Evenisse
Eimus= Père d'Evenisse
Meillinne= Mère d'Evenisse
Anao = Amie d'Evenisse
Girko (qui en réalité se prononce [Guirko])= Aubergiste
Namara = femme de l'aubergiste
Uchcap= L'Amoureux

Et merci a Farouk pour la grosse correction Wink
L'hiver commençait à s'installer tout doucement, la verdure avait perdue de sa splendeur et certains endroits de la forêt paraissaient bien plus lugubre que d'autres. D'autant que ce matin, un épais brouillard nappait les sous-bois.

Dans ce silence pesant, un écho se faisait entendre. Celui d'une canne battant le sol d'une allure cyclique. Elle était tenue fermement par un vieil homme fin et élancé mais dont le visage témoignait d'une vie bien remplie.
Ce dernier s'enfonçait dans la brume, le souffle haletant, tandis qu'une ombre semblait épier ses moindres gestes, le suivant à distance bien dissimulée dans le brouillard.


L'homme avait déjà marché un bon moment et s'apprêtait à emprunter un passage en dehors des sentiers battus. C'est à ce moment précis que son poursuivant décida de frapper. La lame affutée, il se précipita silencieusement sur sa cible cherchant à la saisir par l'épaule.
La main calleuse du vieil homme agrippa fermement le poignet de l'individu plantant ses ongles dans sa peau puis fouetta d'un coup sec l'autre bras armé de son assaillant. Sans attendre, il empoigna le cou du bandit par le pommeau de sa canne pour le mettre à terre.


- Fichu larcineur ! rétorqua le vieil homme. Pensais-tu donc que j'étais une proie facile à avoir ?!

L'homme toisait le bandit de son regard perçant, rétractant ses griffes ensanglantées. La forme en amande de ses pupille et le pommeau de sa canne qui ressemblait à une serre d'aigle ne laissa pas de doute : il était évident de deviner son totem. Le détrousseur comprit alors qu'il n'avait jamais agit dans la discrétion.

Après avoir assené un violent coup à l'estomac de la pointe de son bâton, le vieil homme reprit la route jusqu'a ses logements.
Une grande bâtisse qui jadis devait en imposer et qui en imposerait encore si elle avait été entretenue.

Posant son sac de course sur la table, l'homme au regard d'aigle s'abaissa difficilement pour souffler sur les quelques braises qui menaçaient de s'éteindre. Il lança ensuite nonchalamment une buche lorsque ces dernières furent bien rouge. Le bois était très sec et ne pris aucun mal à s'enflammer, éclairant la pièce d'une lumière chaleureuse. Un esprit moqueur dirait même qu'il était aussi sec que le vieillard.

Profitant de cette douce chaleur qui émanait du foyer, l'homme qui répondait au nom de Gigon, claudiqua jusqu'a une bouteille, pris un verre au passage et vint se rassoir. Il englouti le breuvage qu'il venait de se servir d'une traite avant de se resservir à nouveau.
Un carnet finement relié était disposé devant lui. Gigon le regarda fixement, reprit une gorgée puis agrippa de ses doigts arthrosés une plume qu'il trempa dans l'encre.

Caressant de sa main rugueuse la couverture en cuir sur laquelle était écrit en lettre dorées "Evenisse", l'homme commença à feuilleter les premières pages sur lequel il avait déjà commencé à écrire quelques notes
(Cf: description du personnage).


Poussant un long soupir qui, au vu de sa blancheur et de la souffrance qui semblait le ronger, pouvait bien laisser croire que cela puisse être le dernier, Gigon fit courir la plume sur le papier.


Il était convenu que je vous parle de cet hélion, l'homme avec qui tout bascula.

C'était un jour de printemps. Eve travaillait, comme souvent, dans l'Auberge de Girko. C'était un homme de forte corpulence, toujours de bonne humeur, mais gare a celui qui parvenait à l'énerver. Toujours est-il qu'ils s'étaient trouvé ces deux là ! Et je pense qu'Eve y voyait en lui le père qui lui avait tant fait défaut. Il faut dire que son père, Eimus, frappé par la terrible tragédie de la mort de sa compagne Meillinne, n'avait pas vraiment été présent durant son enfance. Il mit beaucoup trop de temps pour s'en remettre. D'ailleurs il ne s'en était jamais vraiment remit. Loin de sa fille, toujours parti pour affaire, il me la confia pour son éducation et je dû...



Le vieil homme s'arrêta d'écrire un instant pour reprendre une gorgée et en profita pour contempler les flammes. Son regard semblait se perdre, comme happé par le feu. Il se repencha de nouveau sur le carnet puis reprit.


... l'envoyer assez tôt dans une école de formation pour y étudier l'art du combat. Elle avait sa propre voie à suivre et je pensais que ça lui ferait du bien de se sentir utile. En outre, c'était également sa volonté. Bien que son père me l'eu beaucoup reproché car cela l'avait éloigné de lui lorsqu'il se fut finalement ressaisit, je n'en regrette pas moins ce choix. Elle était encore jeune et, avant qu'elle ne puisse reprendre les rennes d'une société de commerce, il fallait qu'elle commence au bas de l'échelle et gagne sa vie par elle même. Ce fut le choix qu'elle fit, et ce malgré la vie facile qu'elle aurait pu continuer à vivre. Ce choix, cette décision, personne n'aurait pu s'y opposer. Pas même son père.

C'est en travaillant donc comme serveuse sous la protection de l'imposant Girko, et sous le regard méfiant de sa femme Namara qui n'appréciait pas leur complicité, qu'elle y rencontra l'homme qui la fit chavirer.


Le regard de Gigon se perdit à nouveau dans les flammes. Une quantité de souvenirs qu'il aurait préférer oublier lui revenait sans cesse de manière sporadique au point où écrire devenait un moyen pour lui de confesser ses péchés.

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[Retour en arrière]

Comme souvent la patronne était sur le dos d'Evenisse, se plaignant de la lenteur du service et trouvant toujours à redire. Si ça ne tenait qu'à elle, la serveuse ne serait pas restée bien longtemps, mais le patron ne l'entendait pas ainsi. Il ne faisait même plus attention aux remarques gratuites de son épouse. Une journée somme toute normale de premier abord, mais dans un recoin de la salle un homme encapuchonné semblait la fixer du regard.
Les hommes se montraient parfois déplacés lorsqu'ils n'étaient pas sobres. Evenisse tarda donc à servir cet individu à l'allure louche au point que la patronne agacée se résignaà le faire à sa place, sous le regard amusé du client. Bien évidemment, Namara en profita pour décrier la serveuse aux yeux de son mari, qui n'avait cure de ses critiques mais pas de l'attention que l'individu encapuchonné semblait porter sur son personnel. Girko s'approcha de l'homme prétextant nettoyer la table.

- Ici j'aime bien voir le visage des gens que j'accueille , lança l'homme au totem d'ours qui avait une voix imposante, même lorsqu'il parlait tout bas.

- Serait-ce la crainte d'avoir affaire à des mauvais payeurs qui ne souhaitent pas être reconnu ?! Lui répondit l'individu qui avança une petite bourse contenant une poignée de pièces qui s'entrechoquaient.

Girko, repoussa la besace.

- Il ne s'agit pas de ça. Un commerçant doit pouvoir reconnaître un client.


- Vous n'avez qu'a vous souvenir de ma capuche, ironisa l'individu avant de capituler devant le regard déterminé de Girko.

Le visage de l'homme ne dégageait rien de douteux. Au contraire, il en émanait une certaine sérénité.

- Voila qui est mieux ! Lança d'un air débonnaire le tavernier en lui proposant une tournée offerte.

C'est en servant l'homme qu'Eve aperçu l'arc qui reposait le long de la chaise. Etant elle-même une archère en quête de perfectionnement, la conversation s'engagea naturellement.
L'homme revint plusieurs jours de suite, ce qui n'était pas sans déplaire à Eve qui trouvait leur conversation agréable. Puis, un soir alors que la journée avait été mouvementée et qu'Eve prenait la route pour rentrer chez elle, deux clients éméchés, prirent a partie la petite serveuse qui avait fini son travail. Sans doute voulaient-il seulement la titiller, mais leurs gestes déplacés et insistants s'avéraient déplaisants et les deux ivrognes ne semblaient pas vouloir accéder à la requête de la jeune fille aux cheveux de Jade qui leur demandait d'arrêter de l'importuner.
Il fallu une volée de flèches pour finir par les dissuader de continuer, flèches tirées de ce mystérieux individu qui, en réponse pour son identité, donna comme prénom "Uchcap". Un nom très étrange auquel l'homme sembla réfléchir un petit moment avant de le révéler. Quoiqu'il en soit ce fut une chance pour elle qu'il passa par là.
Suite à cette mésaventure, Uchcap avait accepté d'entraîner Evenisse. Il était un archer très habile, capable de se fondre dans le décor et d'être extrêmement silencieux. Tout ce savoir faire il le partagea avec la femme bête qui, au fil de son apprentissage, devint de plus en plus douée.

La complicité s'était installée. Les rires et les taquineries aussi. Mais l'homme se voulait distant quand le rapprochement se faisait trop sentir. Evenisse était un peu perdue mais très attachée à cet homme qui semblait insaisissable. Elle s'en trouvait même perturbée dans son travail lorsqu'il ne venait pas. Elle fit d'énorme progrès au fil des saisons mais ne parvint jamais vraiment à surpasser son "maître".

Puis, un beau jour d'automne alors qu'elle devait poursuivre une compétition que les deux comparses s'étaient lancés, Evy attendit des heures durant dans la clairière sans que ce dernier ne daigne s'y présenter. Il ne se présenta d'ailleurs pas non plus à l'auberge le jour suivant, ni les jours d'après. Les semaines passèrent mais aucune trace de l'homme qui semblait s'être volatilisé.

L'inquiétude qu'il lui soit arrivé quelque chose fit place à la raison. Eve se dit qu'il avait dû été sollicité quelque part, mais la question du "pourquoi n'avait-il rien dit" restait en suspend.
Puis la raison laissa place à la colère lorsqu'elle comprit que "Uchcap" n'était qu'une anagramme de "capuche" quelque peuarrangé. Cet homme avait dissimulé son nom puis l'avait abandonné sans raison. Qui était-il ?! Que voulait-il ? L'ignorance était une douleur tellement intense qu'elle en occupait toute ses pensées.
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La plume continuait de parcourir le papier, s'arrêtant par moment avant de reprendre sa folle course, résumant ainsi la rencontre de sa petite fille avec cet hélion. Le vieillard s'arrêta un long moment pour masser sa jambe meurtrie, le pantalon ainsi relevé laissait entrevoir une profonde crevasse au niveau de la cheville qui semblait remonter tout le long de la jambe, comme si une grande quantité de chair avait disparue. Après une nouvelle gorgée, l'homme reprit sa rédaction.


J'ai négligé la puissance des sentiments, je n'avais pas vu a quel point ma petite fille en souffrait et qu'elle était sur le point d'exploser... Elle en était arrivée au point où le prétendu Uchcap s'était joué d'elle.
Une partie d'elle en était amoureuse et voulait le revoir et se jeter dans ses bras mais une autre partie comptait bien le retrouver pour règler ses compte et lui mettre une bonne paire de claques. Mais là où les deux parties se rejoignaient c'était que toutes deux avaient besoin d'explication pour comprendre.
Encore aujourd'hui je me demande, si les retrouvailles se faisaient, laquelle de ces deux situations se produirait... peut-être les deux qui sait.
En attendant l'esprit déjà malmené de ma petite fille se scinda en deux entités... Et me voila impuissant tentant vainement de dissimuler la vérité aux yeux de mes semblables. Une vérité bien lourde à porter il faut le reconnaître. Mais tel doit être mon destin pour avoir joué les apprentis sorciers.

Elle me déteste, j'en suis sur. Mais a-t-elle seulement souvenir que c'était également sa volonté ?


Gigon s'arrêta sur cette dernière phrase des plus énigmatique, l'homme remplit de nouveau son verre qu'il bu cul sec avant de jeter violement la bouteille qui éclata en milles morceaux dans le foyer, attisant soudainement les flammes. Il fini enfin par s'endormir sur sa chaise.




Le réveil fut douloureux pour Gigon, qui reçu une visite matinale imprévue. Une amie de la famille, s'inquiétant du silence du vieil homme s'était rendu sur place pour s'enquérir du devenir de son ami.
Gigon s'empressa de rendre la pièce présentable, passant un torchon grisâtre à la hâte sur les endroits les plus visibles en psalmodiant dans sa barbe quelques jurons à l'encontre de cette visiteuse.
La dame, d'un âge avancé également, n'attendît point l'invitation d'entrer. Gigon légèrement prit sur le fait mima d'heureuses retrouvailles et l'invita à s'assoir.
Alors que cette dernière s'exécuta, l'homme, surprenant le regard de sa convive se poser sur le petit livre, attrapa celui-ci et le rangea précipitamment dans un tiroir.

Après deux longues heures à échanger souvenirs et devenirs, l'homme réussi à se débarrasser de son invitée surprise. Se remémorer le passé n'était pas chose aisée tellement le mensonge avait gangrené cet homme.
Les gens de son entourage vivaient dans une énorme mystification et plus le temps passait, plus la vérité devenait inavouable.

Sortant lentement le carnet de la commode, l'homme se rassit et continua de faire parler sa plume.



Avais-tu conscience du poids que pouvait avoir cette promesse ?
Avais-tu seulement idée à quel point le mensonge pourrait devenir éprouvant ?!

Je ne le pense pas, tu as fait ce qui te semblait juste et tu n'as tous simplement pas eu l'occasion de réfléchir aux conséquences !



Gigon posa sa plume, prit sa tête entre ses mains et se mit à fondre en larme.



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[Retour en arrière]

La très grande réputation de commerçant avait amené la famille bien au delà des "frontières" de Korri, souvent à négocier avec leurs alliés Hélion, il n'en n'avait pas moins apprit à dépasser leurs haines et leur colère en marchandant aussi avec des ennemis tout en prenant bien soin que les transactions effectuées ne nuisent pas à leur peuple ni à leurs alliés.

Bien qu'il côtoyait énormément de monde, les conditions de vie fit que ce clan familial s'était quelque peu isolé. Leurs déplacements étaient nombreux et nécessitaient une éducation assez stricte. Trop peut-être pour une petite fille de l'âge d'Evenisse.


Elle venait tout juste de fêter son huitième anniversaire et, était-ce l'âge ou la saison, toujours était-il que ce matin elle était rêveuse. Le nez à la fenêtre elle regardait les autres jouer à l'extérieur.

- Laisse-la donc s'amuser Eimus ! L'apprentissage attendra, elle a tout le temps pour ça !

- Je pars ce soir Gigon, j'aimerais profiter de la présence de ma fille encore un peu ne crois tu pas ?

- Alors va jouer avec elle, mais ne gâche pas cette dernière journée avec ton travail !
....

....

-Tu crois qu'elle m'en veut ?

- De l'assommer avec tous tes principes et autre méthodologie de négociant alors qu'elle pourrait s'amuser comme les autres ? Oui, ca ne fait pas l'ombre d'un doute ! Gigon tapa amicalement sur l'épaule de son fils, il s'avait exactement de quoi voulais parler Eimus mais avait fait exprès de ne pas le souligner espérant qu'il change de sujet.


- Tu sais très bien de quoi je veux parler. Du fait que je ne sois pas aussi présent qu'un père devrait l'être.

- si tu étais moins accaparé par ton travail aus.....

- Je ne sais pas comment faire ! Meillinne aurait su, elle !

- Ne dis pas ça, tu sais très bien quoi faire, et si tu hésites laisse ta fille te guider. La fracture est encore trop fraîche dans ton esprit. Mais ressaisis toi vite, Fils, car tu perds de précieuses année et ta fille grandit trop vite. Fuir est de loin la pire des solutions.

- JE NE FUIS PAS ! S'énerva Eimus qui détestait avoir le sentiment d'être vu comme un lâche. J'ai des responsabilités, et je ne sais pas quoi faire... je...

Une porte s'ouvrit interrompant ainsi la discussion père/fils. Eimus l'oeil humide, regarda alors sa fille faire irruption. Il s'efforça de feindre un large sourire puis l'embrassa sur le front.

-Tu devrais sortir jouer un peu , lui dit-il en esquissant un clin d'oeil.

Evenisse ne se fit pas prier et s'élança dehors

Bien que les hommes bêtes étaient soudés entre eux, il était difficile à la jeune Evenisse de briser la glace pour faire connaissance. Elle passa donc un bon moment à regarder différents protagonistes jouer et s'amuser entre eux en s'inventant des rôles.

C'est alors qu'une personne lui tira sur la manche. Elle était aussi haute qu'elle et tout aussi jeune, à la différence que sa tignasse ébouriffée à la couleur du blé contrastait avec ceux de la fille aux cheveux de jade. La tenue vestimentaire de l'étrangère laissait elle aussi à désirer.

- Tu viens jouer ? Lui lança la petite fille.


L'enfant Répondait au nom d'Anao, c'était une orpheline recueillie par la communauté des hommes bêtes. Une enfant intenable et casse-cou.
Ce côté extraverti tranchait beaucoup avec le côté introverti d'Evenisse, mais les deux enfants s'entendaient plutôt bien à la grande satisfaction de Gigon qui pouvait souffler un peu.

Le soleil était particulièrement radieux aujourd'hui et les deux gamines s'étaient retrouvées pour passer du temps ensemble. Evenisse avait troqué sa tenue chic mais fragile contre quelque chose de plus spartiate mais robuste. En effet son grand père était fatigué de tous ces accrocs et n'avait de cesse de lui faire promettre de ne pas prendre de risque. Il craignait, quelque peu, que cette blonde turbulente prenne des risques inconsidérés à jouer les aventurières en herbe. Car même si Anao semblait plutôt agile, sa petite fille elle, ne l'était pas, ce qui se traduisait souvent par des petits bobos sans gravités.

Mais aujourd'hui la fille aux cheveux hirsute voulait s'improviser "chasseur" et prouver à son amie qui était sceptique, qu'elle pouvait traquer une proie.
Perchée sur les branches qui s'entremêlaient, Anao scrutait une cible potentielle.

- Ca ne sert à rien, on ne voit rien d'ici ! Se plaignait Evenisse

- Toi peut-être... la fille aux cheveux de paille d'un air moqueur ... Je vois tout ce qui se passe et je crois que j'ai trouvé ma cible !

- Tu me fais march...héééééé.... Mais.....Toi aussi ! s'exclama Eve tout excité Toi aussi ton clan appartient à la famille des rapaces !

En effet, les yeux d'Anao avaient pris la forme de ceux qu'arborent les oiseaux de proie.

- Comment ça "moi aussi ?!", tu veux dire que toi....

Eve baissa la tête d'un air honteux

- Je ne sais pas..... Je n'ai toujours pas développé de signe qui pourrait m'indiquer mon totem !

Anao se mit à rire

- Grande bécasse, tu n'as pas besoin de développer un signe, il suffit de connaître celui de tes parents !

- Justement Mon père est, tout comme mon grand-père, du totem de l'aigle.


- Bah alors pourq....

- Celui de ma mère c'est le loup ! S'empressa-t-elle d'ajouter.

- Ah oui, effectivement c'est moins facile à deviner... Peut-être es-tu des deux, un loup volant, ça serait génial ! Dit-elle en appuyant sa phrase d'un coup de coude. Sans même attendre de réponse l'enfant se mit en mouvement ... Allez viens, suis moi !

Après avoir changé d'angle de vue en étant passé sur l'arbre voisin Anao réfléchit un moment.

- Dorénavant pour nos chasses je t'appellerais.... "Jade"... comme tes cheveux. Dit-elle avec un sourire rayonnant.

- D'accord, et moi je t'appellerais "paille"... Euhhh non... "Miele", "Or",... "Blé".... Evenisse continuait d'énoncer des mots à haute voie n'arrivant pas à trouver un qui lui plaisait, ce qui semblait amuser son amie ... "Ambre" ! finit-elle enfin par dire d'une voix forte !

- Mince regarde ce que tu as fait ! La cible s'enfuie ! râla Anoa avant de reprendre ... Va pour "Ambre" j'adore !

"Jade" et "Ambre" se lançaient donc tant bien que mal dans une poursuite avec un lapin. Ce dernier leur mena la vie dure en s'enfonçant de plus en plus profondément dans la forêt.

- Ambre, s'inquiéta Evenisse, mieux d'abandonner, l'endroit n'est pas sûr !

- Une enfant de Korri n'abandonne jamais ! Lança son amie pleine de témérité ...T'inquiète pas "Jade" on va l'avoir. Il fatigue !


Un craquement sourd se fit entendre et Evenisse disparue avec la branche qui avait cédé sous son poids. Par chance le buisson sur lequel elle était tombée avait amorti sa chute. Eve allait bien, plus de peur que de mal comme on dit souvent !

Anao, s'était empressée de descendre de son perchoir, mais alors qu'il ne lui restait plus que quelques hauteurs, elle remarqua une sombre silhouette qui rôdait.

Une panthère, sûrement attirée par le bruit, s'apprêtait à fondre sur sa proie. Arrachant quelques pommes de pain de l'arbre, "Ambre" les lança sur le museau de l'animal afin d'attirer l'attention sur elle. Malheureusement cette technique eu peu de succès.

La fille aux cheveux de paille s'élança alors au secours d'Eve, attrapa la queue de la bête et la croqua de toute ses force. On dit qu'il n'y a rien de plus puissant chez un aigle que son bec, et il faut croire que ça ne devais pas être que des rumeurs car la panthère rugit de douleur et s'élança a la suite d'Anao qui se sauva à toutes jambes.

- Eve, cours vite chez toi ! Je la sème et je te rejoins !


Evenisse regarda son amie trébucher quelques peu sur les racines proéminantes tandis que la panthère svelte et agile se déplaçait avec aisance. Tout le monde savait qu'un aigle au sol n'avait aucune chance s'il ne prenait pas son envol.
Il est évident que la situation n'était pas à l'avantage de l'aigle qui peinait à distancer son poursuivant... pire, la bête n'eut aucun mal à rattraper le maigre retard qu'elle avait, empêchant Anoa de prendre de la hauteur. Et ce fut encore une racine qui vint lui faire un croc-en-jambe la clouant au sol.
Cette petite course avait mis en appétit la panthère qui semblait savourer sa victoire avant de passer au repas.
Alors qu'Anao était persuadée qu'elle vivait ses derniers instants une autre fourrure noire s'interposa entre le fauve et le rapace prenant la morsure à la place de l'enfant.

Un combat de crocs et de griffes impressionnant se déroulait sous le regard pétrifié d'Anao. Un loup sombre était venu perturber le repas de la panthère ce qui l'avait rendu encore plus hargneuse. Le Loup avait subit un grand nombre de morsures et de griffure et, bien qu'il en avait assené plusieurs en retour, il peinait à lutter contre cette panthère qui avait nettement le dessus sur lui.
Devant la puissance de cette dernière, le canidé dû se résigner à prendre la fuite, mais le félin ne comptait pas le laisser s'en tirer à si bon compte et le prit en chasse, abandonnant sa proie de départ. Elle n'eut pas de mal à rattraper le loup et bondit de nouveau sur lui. Le combat continua donc quelques mètres plus loin et Anao en profita pour se mettre à l'abri dans les arbres, remerciant cette aide providentielle. Elle ne pu regarder qu'avec tristesse la lourde sanction qu'infligeait le prédateur à ce jeune loup trop impudent. Dominé nettement, il tenta désespérément de sauver sa vie en opposant ses mâchoire à celle de son ennemi, et ce fut presque inespéré qu'il parvint à perforer le museau de la panthère lui créant une douleur qui la désorienta et qui la fit fuir.

Le Loup quand à lui pu enfin souffler, mais ses nombreuses blessures étaient trop grave et il s'effondra, se vidant progressivement de son sang.

La nature n'était pas forcément juste. Elle n'avait pas de règles et ce jeune canidé en avait fait les frais en s'interposant entre le chasseur et sa proie. Anao eut de la peine pour ce loup, mais elle le soupçonnait d'être intervenu parce que lui aussi convoitait le même repas. Dans la nature, la chance joue un rôle primordial dans la survie, mais dorénavant "Ambre" se promit d'être plus méfiante et d'écouter d'avantage Evenisse. Cette dernière semblait d'ailleurs avoir disparue, probablement rentrée chez son grand père, pensa l'enfant.
Anao réfléchissait déjà à ce qu'elle pourrait lui raconter car il était certain qu'Evenisse serait pendue à ses lèvres quand elle livrera son récit sur le combat contre la bête noire. Et il est évident qu'elle comptait enjoliver l'histoire.

Toujours dans ses pensées Anao fut interpelé par des morceaux de tissus laissé à l'endroit de la chute de "Jade". En regardant de plus près elle se rendit compte qu'il s'agissait des vêtements déchirés d'Evenisse. Prise de panique elle pensa dans un premier temps à une attaque d'une autre bête. Au sol il y avait des traces de pieds puis de pattes mais c'est en voyant des touffes de poils noirs dans ces étoffes que l'enfant comprit ce qui venait de se passer.

Les larmes aux yeux Anoa fit demi-tour et couru à en perdre haleine. Elle se retrouva de nouveau à l'endroit où elle avait assistée au combat des deux fauves.
Le loup inerte ne donnait presque plus signe de vie. S'approchant de lui, incertaine, Anao lança timidement:

- Jade...?! C'est toi ?!

Devant l'absence de réaction elle insista:

- Eve ! Je t'en pris...pas ça !

Le loup traina la tête sur le sol dans sa direction avant de la rabaisser en signe d'acquiescement. Anao se précipita alors, agrippant le pelage poisseux d'un vert très sombre, proche du noir.

- Allez lève toi, on retourne chez ton grand père, on va te soigner tu verras.

La louve ne pouvait plus bouger et Anao dû la porter et entreprendre un long et fastidieux trajet

- Finalement tu sais maintenant quel est ton Totem... Anao essayait de dédramatiser mais surtout d'occuper l'esprit de son amie pour ne pas qu'elle sombre. Elle lui parla ainsi tout le long du chemin. Arrivée devant les portes de chez Evenisse, à bout de force, elle hurla à l'aide.





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Gigon ne cessait d'écrire, ne s'arrêtant que pour sécher ses larmes et se moucher il avait relaté la plupart de l'histoire sur le carnet mais comptais bien terminer aujourd'hui.

En voyant son état, j'ai comprit de suite qu'on ne pouvait rien faire pour elle. Je ne pouvais faire que de lui mentir, de la rassurer, de lui faire croire que tout irait bien.
Elle voulait me dire quelques mots, et j'ai approché mon oreille de son museau....

"Donne-lui ma vie"

...ce sont les derniers mots qu'elle ait dite, avant de rendre son dernier souffle.

Je l'ai contemplé pendant plusieurs heures, c'est incroyable ce qu'elle pouvait ressembler a sa mère sous cette forme, Meillinne était d'un noir de jais, et jamais j'aurais imaginé que les cheveux de jade d'Eve puisse de rapprocher à se point de l'ébène une fois en loup.

Je savais ce qu'elle voulait dire par "donne lui ma vie", Evy m'avait expliqué a quelle point Anao pouvait se sentir seule et qu'elle enviait ma petite fille d'avoir une famille. J'acquiesçai donc à sa requête et je fis de Anao ma nouvelle petite fille mais c'était trop compliquer pour elle de ressembler à ma petite Evy. Leurs comportements si différents et leurs couleurs de cheveux. Alors en accord avec elle, nous avons joué aux apprentis sorciers... se servant du réseau de commerce pour faire appel à des personnes capables de modifier l'esprit d'Anao mais aussi une partie de son physique, notamment la chevelure. Je devais brider l'esprit d'Anao pour y faire ressortir celui d'Evenisse mais ma petite Evy me manquait et au lieu de brider l'esprit de cette fille aux cheveux de paille, je l'ai pratiquement effacé pour qu'elle soit le plus ressemblant possible à celui de ma petite fille.

Si j'ai poussé celle qui désormais s'appelait Evenisse à suivre un entrainement militaire c'est pour l'éloigner du reste de la famille, ainsi, même si tous on vu un gros changement, tous le monde à pensé que c'était du à la croissance.

Mais... Est-ce pour protéger la volonté d'Eve que je cherche cacher sa double personnalité ou est-ce pour ne pas être traité de monstre par les miens....
Je vis reclus, loin de tous car depuis cette histoire je n'arrive pas à me sentir digne d'être parmi les miens. Suis-je si différent des holdars, n'avons nous pas subit suffisamment d'expérience! Mais ceci dit, est-ce si mal d'avoir voulu offrir une autre vie a quelqu'un, même si elle était d'accord ce n'était qu'une enfant, je pense m'être laissé aveuglé par la culpabilité et le vide que laissait l'absence d'Evenisse. Je voulais tant la revoir que j'ai menti a tous le monde, moi y comprit. Il ne s'agit pas la du mensonge de toute une vie mais bien d'une vie construite dans le mensonge.


Quand à cette panthère me direz-vous....La ou elle est elle ne fera plus de mal a personne.


Machinalement Gigon se massa sa jambe meurtrie, selon les rumeurs il l'aurait pratiquement perdu lors d'un affrontement avec une panthère, nul doute qu'il s'agissait de cette fameuse panthère qui lui vola la vie de sa petite fille.

La nuit commençais à tomber, Gigon ralluma un feu dans le foyer, puis resta un bon moment à contempler les flammes le carnet à la main, puis il se leva prit sa cane et son manteau et avant de sortir jeta le carnet au feu!
Ce dernier expliquait les raisons de la fracture de l'esprit "d'Evenisse". La vrai propriétaire du corps étant en réalité celle qui se fait appeler "Ambre", et si seulement elle ne s'était pas entichée de cet hélion la cassure n'aurait pas eu lieu. Mais en y réfléchissant, ce carnet trahissait le dernier veux d'Eve car si cela venait à se savoir, "Ambre" serait surement rejeter de sa nouvelle famille.

Gigon marcha quelques peu à l'arrière de sa maison, puis s'effondra sur le sol à coté de la sépulture de sa fille Meillinne il serra une poignée de terre entre ses griffes avant de pousser un long soupire qui se voulait être le dernier.

On pouvait lire sur la tombe sur laquelle il gisait "Anao"
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