Errance
#1
Tard le soir, dans les rues poussiéreuses de Babylios... Les seuls passants gardaient leur visage dans l'ombre, marchaient d'un pas pressé ou épiaient les passants, une main dissimulée dans l'ampleur de la tunique.

Masklinn était de ceux là. Il n'avait rien d'un héros, ce type. Plutôt grand, mais marchant voûté, maigre, à la barbe mal taillée et aux yeux méfiants. Il avait plutôt l'air d'un brigand -ce qu'il était, en quelque sorte : un assassin.

Un assassin, oui, mais attention ! Pas un banal assassin froid comme la mort mais pétri de principes ou quoi... Non messieurs-dames, non merci ! Meurtrier de bas-étage, coupe-jarret, tranche-bourse, adepte des coups bas et des coups de pied dans les valseuses. Un type qui vous vendrait pour se payer un repas chaud à l'auberge bon marché du coin.

Personne ou presque ne connaissait son nom ici. Lui, il venait des ruelles crasseuses, là où la fange et les pavés ne font qu'un, où naissent et meurent à tout instant les anonymes comme lui. Ah, par contre, vous l'auriez vu, parmi ses camarades de pauvreté... Très tôt il s'était fait remarquer. C'est pas souvent qu'un des gamins des rues en égorge un autre pour lui voler un malheureux quignon de pain dur.

"Bah !" se disait-il souvent. "J'suis pas à plaindre. Y'a pire. J'aurai pu être un d'ces... monstres. Hybrides. Difformes. loin dans le Nord, dans leur cité de barbares. Moi j'ai QUE deux jambes, au moins. Pauvres bêtes. Il faudra leur apporter la lumière du progrès, un jour. Les forêts, c'est tellement... tellement primitif !" soliloquait-il, contemplant non sans ironie la civilisation -voleurs, rebouteux, mendiants, marchands douteux, prostituées- régnant dans les rues appartenant au petit peuple de Babylios.

Il faisait tournoyer un long coutelas entre ses doigts, attendant une victime. Qui ne tarda d'ailleurs pas à se présenter, titubant non loin, visiblement entamée par l'alcool. Promptement, Masklinn se glissa derrière l'ivrogne, examinant la bourse à sa ceinture. D'un geste vif, il plaqua une main sur la bouche de l'infortuné et de l'autre lui plongea sa lame dans le coeur en passant par la clavicule. Le sang jaillit rapidement, mais pas assez pour tacher la tunique déjà sale du meurtrier : il lui avait suffit de quelques secondes pour récupérer la précieuse bourse et partir examiner son contenu dans un recoin plus sombre.

S'attaquer aux faibles et aux blessés, rien de plus simple. Il était comme ça, Masklinn.
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