Pluie, vents et tempêtes
#5
Hagnûr conspuait fiévreusement les livres qui lui tombaient sous la main. Sa recherche d'informations étant d'autant plus complexe qu'il ne savait pas précisément quoi chercher.
La lueur tremblotante d'une chandelle était la seule source de lumière dont il disposait tandis que défilaient sous ses yeux les runes tracées à l'encre sur le vélin jauni.

Les traités de météorologie ne lui donnèrent que peu de satisfaction. Parfois inachevés, souvent incomplets, toujours approximatifs, ils reflétaient bien l'intérêt limité qu'une race habituée à vivre sous la terre pouvait porter aux aléas du climat. Les écrits traitaient la question à coups de poncifs et de banalités, énonçant des évidences telles les chutes hivernales de température ou les fontes des glaces printanières.

Ses recherches dans le domaine de la magie ne furent guère plus concluantes. Les Nains, aussi experts soient-ils dans le domaine des runes, n'entendaient goutte à tout ce qui en sortait. Les ouvrages étaient avant tout descriptifs, et fondés sur l'observation des autres peuples, en particulier des Hauts-Elfes dont tout l'arsenal magique semblait avoir été consigné. Il était évidemment question d'orages magiques, mais Hagnûr avait déjà affronté les Aéromanciens elfiques capables de lancer de tels sorts, et savait pertinemment que la tempête qui dévastait actuellement le continent était sans commune mesure avec ces petites ondées.

L'Histoire enfin, se révéla tout aussi vide d'information. Les récits des témoins de l'invasion des Khörgs étaient certes incohérents, reflets d'une période de panique où nul ne savait vraiment s'il devait croire ce que lui disaient ses sens, mais aucun n'évoquait de tempête. Le seul phénomène marquant de cette époque semblait être la pluie d'étoiles filantes qui, comme tout un chacun le savait, avait apporté sur Ecridel les maléfiques Pierres de Pouvoir (ainsi les appelait-on dans la littérature) qui avaient permis à Gologorosh de prendre pied sur ce plan.
L'invasion des Holdars, quant à elle, avait été précédée de la chute d'une météorite. Incapable de trouver le sommeil, il se souvenait encore l'avoir vu traverser le ciel nocturne à l'époque, ligne de feu au milieu d'un océan de noirceur. Mais là encore, pas d'orage.
Lier des phénomènes célestes exceptionnels à des événements historiques marquants était un raccourci facile qu'il préférait ne pas faire. Après tout, nombreux étaient les événements de l'Histoire que rien n'avait annoncés !

En désespoir de cause, et après plusieurs longues journées de recherches infertiles, il se tourna vers le folklore, en quête d'une quelconque légende, fable ou chanson faisant état d'un orage titanesque. Sans succès, une fois encore. Il ne trouva rien sinon dans un recueil de vieilles chansons grivoises, où l'orage n'était qu'un prétexte à ce qu'une jeune Naine ait besoin "d'être réchauffée" par un groupe de mineurs chez qui elle s'était abritée. Si Hagnûr se surprit à sourire à la lecture de ce chant qu'il ne connaissait pas, il convint bien vite qu'il n'y trouverait rien de plus qu'une chanson à boire.
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