Les rêves, il faut s'en souvenir.
#3
Peu après

Le jeune garçon foulait silencieusement l'herbe de la forêt de ses pieds fins, laissant à peine celle-ci couchée après ses pas. Voilà quelques heures qu'il s'était absenté du village pour porter un message à une autre bourgade. La plupart des hommes adultes était parti... Sans revenir. Alors il s'était proposé comme messager.
Près du chemin s'étalaient quelquefois des tapis de fleurs, devant lesquelles Lindo s'arrêtait parfois, pris dans ses pensées. Non, il ne pensait pas aux gentianes étalées face à lui. Il pensait à son père. Même s'il avait pu atténuer son chagrin en peu de temps, il ne pouvait en détacher son esprit. Il n'avait jamais vu sa mère si triste. Elle était inconsolable.

Divaguant toujours sur ses réflexions maussades, l'enfant avait repris sa route. Arrivant en vue du village, il s'arrêta immédiatement. De la fumée noire s'élevait de nombreuses maisons. De loin, on pouvait voir les flammes lécher les habitations. D'abord interloqué et les yeux écarquillés, l'Elfe restait immobile.
Soudain, il se mit à courir aussi vite que possible vers le patelin, se rapprochant des demeures qui se consumaient peu à peu. Il finit par arriver à la limite des habitations, ou du moins ce qu'il en restait. Outre les crépitements du feu, pas un bruit ne perturbait l'atmosphère chargée. Chancelant, l'enfant s'engagea lentement dans la rue, regardant autour de lui. Des corps inertes, cadavres ensanglantés ou brûlés, jonchaient le sol. Sur l'un de ceux-ci avait été laissée à l'abandon une épée, d'origine orque. Dans l'air régnait une odeur... de mort.
Effaré, il avança jusqu'à sa maison, dont les flammes étaient presque éteintes. Trébuchant, il s'étala sur le sol. C'est à cet instant que les larmes jusqu'alors bloquées se mirent à couler abondamment. Restant face contre terre, Lindo pleura toutes les larmes de son corps.
Après un petit moment, hoquetant encore, il se releva lentement et difficilement. Titubant jusqu'à la maison, il y entra lentement. Tout ce qui restait n'indiquait en rien la présence de sa mère au moment où ça s'était passé...
Mais à l'arrière, son corps était là. Pas tant sanglant que ça. Un seul coup de glaive, qui avait transpercé la femme au niveau du ventre. … Mais pour un enfant, voir le corps de sa mère, morte, ça se révèle... Traumatisant, non ?



Lindo rouvrit les yeux. Il ne dormait pas, il ne pouvait pas. Il devait se contenter de se reposer... Affalé contre un mur de la caverne, recouvert de blessures et de bandages, une pensée amenant une autre, il n'avait pu s'empêcher d'y repenser. Il ne souvenait même plus pourquoi.
Ça, il aurait préféré l'oublier, comme toutes ces autres réminiscences effacées de sa mémoire. Oublier est toujours une façon simple de ne plus penser aux souvenirs tels que celui-ci.

Tentant de chasser de son esprit tout cela, le jeune Elfe se releva lentement, grimaçant quelques instants de douleur. Il marcha alors vers un tréant qu'il apercevait plus loin, puis se mit à courir vers lui. Arrivé en face de lui, il s'attacha à entailler l'écorce de la créature, sans lui faire grand chose. Avant qu'il n'ait pu faire d'autres mouvements, le tréant lui donna un violent coup de ce qui lui servait de bras, l'envoyant à plusieurs mètres. Restant au sol, Lindo chercha à déterminer si l'esprit de la forêt détraqué lui avait cassé une ou deux côtés. Il ne put s'empêcher de penser qu'il devait souffrir sans mourir... Comme de nombreuses personnes certainement. Mais la mort devait être sympathique à accueillir. Pas grand chose ne le retenait ici après tout. A part ses amis.
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