Les liens du sang
#1

Une ombre. Elle glissait lentement sur les pavés de la ruelle. Aucun bruit ne l'accompagnait. Aucun son ne provenait des alentours déserts. Le silence complet, total. L'ombre continuait de se rapprocher, petit à petit. Cela paraissait interminable. Au fur et à mesure, on pouvait percevoir un bruit… Quelque chose d'étrange, de désagréable. Un crissement continu. Comme si… Comme si on raclait le sol avec de la ferraille ? Pourtant, il ne semblait n'y avoir que l'ombre informe qui glissait sur les rectangles agencés de l'allée. Le son devenait de plus en plus en forme à mesure qu'elle s'approchait.
Sortant enfin de sa sidération, le jeune homme tourna les talons et détala sans attendre de savoir ce qui pouvait bien faire cette vibration détestable. Il commença à courir dans les rues désertes de Malefosse, puisant dans ses forces pour mettre le plus d'écart possible entre cette ruelle et lui. Personne n'était là pour voir fuir un Di Velija bien nerveux. Aucune âme qui vive aux alentours.

L'ombre le suivait. Elle avait délaissé sa lenteur pour se déplacer bien plus vite. Bien trop vite. Il sentait peu à peu naître en lui la sensation qu'il étouffait. Pourtant, il savait comment contrôler son souffle pour courir sur de longues distances. Il poursuivit cependant sa course. Bien inutilement, puisque l'ombre le rejoignit après quelques instants. Il suffoqua et s'évanouit.


Victor s'éveilla et se redressa brusquement, scrutant les alentours. Sa chambre. Un simple cauchemar. Il soupira et se mit sur le bord de son lit, posant ses pieds sur le parquet frais. Il glissa ses mains sur ses côtes et commença à défaire le bandage qui entourait sa cage thoracique, et qui avait sans doute participé à sa gêne respiratoire. Rares étaient les nuits où il faisait ce genre de rêves. En vérité, rares étaient les nuits où il rêvait. Ou bien il ne s'en souvenait jamais au réveil.

Il essuya la moiteur de ses mains sur le bandage, tout comme les gouttes de sueur qui avaient perlé sur son front. Il jeta le bandage sur une chaise un peu plus loin et prit le broc d'eau posé sur le sol ainsi que le verre sur la table de chevet. Il se servit puis but d'une traite le verre, reposant la carafe du même coup. Il aurait espéré que l'eau serait restée plus fraiche, mais cela convenait tout de même. Gardant son verre en main, il laissa son esprit vagabonder en observant le petit récipient.
Depuis que Cendre était partie à Asteras, la vie ici était un peu plus terne ici. Au sens propre comme au figuré d'ailleurs. Ni sa chevelure rousse ni son tempérament de feu n'étaient là pour donner leur couleur à son quotidien. Bien sûr, leur père était heureux qu'elle soit partie faire ses études à la capitale Elfe. Mais le jeune homme savait que c'était aussi parce qu'elle ne supportait plus de le voir avec sa mère et non la sienne. Compréhensible. Cependant, il avait à présent plus souvent son père derrière son dos, et le poids de la réussite sur les épaules. Le paternel étant un grand guerrier, il devait en être de même pour lui, n'est-ce pas ?

Il passa une main dans ses cheveux histoire d'enlever une mèche de devant ses yeux, et reposa le verre sur le petit meuble. Sur celui-ci se tenait également la statuette d'argile le représentant. Cela faisait peu de temps qu'il s'était vu remplacer la statuette d'enfant par celle d'un homme adulte, mais il était un peu déçu qu'elle ne lui ressemble pas vraiment. Adulte, l'était-il vraiment ? Au regard de la société, à présent, oui. Mais il sentait toujours en lui une part infantile.

Il resta encore quelques instants à l'observer, puis se réinstalla confortablement dans son lit, fermant les yeux. Ses pensées vagabondèrent sur de nombreux sujets. Tout ceux auxquels on peut penser quand on arrive pas à dormir, ou se rendormir. La vie, cette action qui un jour nous a rendu honteux, et dont on croit que tout le monde s'en souvient et s'en moque, ce qu'on pourrait faire de sa vie, ...
Finalement, il sombra dans un sommeil profond, calme et sans rêves.

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