Premières années.
#22
Un sourire fin et moqueur, la jeune fille grimaça aussitôt le nom d'Oxalie de Crèvecoeur entendu. Cette femme était aussi burlesque qu'exubérante. Cendre n'avait toujours pas digéré leur sortie à cette fameuse soirée. Elle ne savait d'ailleurs toujours pas qui, de sa mère ou de son père, avait fait un choix aussi stupide que navrant.
Se rendre à cette soirée qui ressemblait davantage à un concours de celle ou celui qui trouverait l'amour de sa vie avait été une expérience assez peu glorieuse. Le premier prétendant avait eu un beau visage c'était vrai, mais une cervelle de moineau. Il n'avait pas fallu longtemps avant que la bizarrerie de la jeune fille, sa beauté naturelle, flamboyante et son héritage ne fassent en venir à la pelle de ces beaux jeunes hommes, pleins de fougue et d'ardeur. Pleins d'illusions.

Israfel aussi était venu, peut-être sans arrières pensées, mais il n'empêche qu'il avait été dans les derniers et qu'elle l'avait sèchement renvoyé à sa place, préférant être seule.
Et c'était toujours le cas.
L'amour et les sentiments étaient des choses que son coeur de glace ne supporterait pas bien longtemps, et elle ne pouvait pas vraiment aimer ni un elfe de peur de mourir trop tôt ni un homme de peur de mourir trop tard. Sa longévité de demi-elfe étant inconnue et sa maladie la rendant sujette à périr au moindre instant, Cendre s'était dit assez tôt dans sa vie fragile et vacillante qu'elle n'aurait aucune descendance, aucun époux, aucune épouse, et que les choses seraient parfaites ainsi.
Elle n'avait pas besoin de problèmes supplémentaires. Son coeur était assez fragile comme ça.

« Pas d'inquiétudes, Israfel » elle se permettait cette impolitesse, par flemme, ou tout simplement car elle ne pensait plus qu'à un bon café chaud maintenant qu'ils étaient devant la porte, « vous n'êtes ni le premier ni le dernier que j'enverrais sur les roses. C'est un sport de tous les jours, sans me vanter. Et je n'en veux à personne d'essayer – on ne devrait jamais en vouloir à quelqu'un d'essayer. »

Son ton en effet ne laissait pas penser qu'elle s'en vantait – au contraire, la jeune fille était lasse et fatiguée de ces jeux de cours.

Elle entra dans le café à la suite de Lenwë, le remercia d'un petit signe de tête alors qu'il lui tenait la porte et trouva une table bien positionnée. Ni trop loin de la vitrine, ni trop proche, ainsi la lumière tamisée éclairait la table sans l'éblouir pour autant.

Cendre s'asseya et reprit, sur un ton plus léger, s'adressant à l'elfe des neiges :

« Enfin, je ne te souhaite pas de rencontrer un jour cette fameuse Oxalie. Une bonne femme hideuse et grasse qui se permet d'être entremetteuse alors même qu'elle a dû étouffé cinq ou six maris en dormant... » Elle grimaça de nouveau, à l'idée même que quelqu'un puisse dormir avec la grosse elfe. « Mais j'imagine que tu n'es pas là pour ça. Trouvez une femme, ce n'est pas vraiment ton ambition première, je me trompe ? »

Le ton était devenu plus sérieux. C'était une question sérieuse mais les yeux de Cendre indiquaient que c'était surtout par curiosité. Rien ne l'obligeait à répondre, pas même la malice dans les yeux de chat de la sorcière.
Répondre


Messages dans ce sujet

Atteindre :