13-11-2010, 21:27:10
La fuite
L'heure venue, Melmoth rouvre la porte capricieuse qui pivote sans bruit.
Dans la nuit, la cité est toujours aussi calme, pas de lumière, pas de bruit... sauf un ronflement bruyant et très proche.
Scrutant dans la direction ou il a laissé les deux Nains ivres la veille, il ne voit plus que le tonneau et les restes de leur beuverie.
Avançant de quelques pas, le rôdeur trouve la célèbre source sonore et n'en croit pas ses yeux.
Personne sur cette terre ne pourrait croiser le célèbre guerrier au filet qu'est Borïn.
Tout heureux qu'il soit endormi, le ranger avance rapidement vers son but à travers les maisons silencieuses.
Encore une fois, le destin ne lui est pas favorable : un Nain noctambule avance lentement vers lui.
Saisissant deux flèches à bout rond, le rôdeur s'engouffre dans la ruelle adjacente.
Les maisons sont basses et il tente sa chance.
Par-dessus les toits, ses deux traits partent en direction du ciel.
Quelques secondes après, un bruit sourd suivi d'un grognement lui indiquent qu'il a fait mouche.
Le rôdeur n'est pas venu pour tuer et laisse donc le Nain inconnu assommé pour continuer sa mission.
Il a vite repéré son objectif.
Se faufilant tel une ombre, il longe les murs de l'Ecole de Magie et s'engouffre dans le bâtiment par les portes principales.
A l'intérieur, tout respire la Magie et le rôdeur est mal à l'aise.
Le sol est dallé, les murs sont couverts de tapisseries aux signes incompréhensibles au profane.
Aucune lampe ni torche n'est visible, et pourtant une lumière tamisée éclaire toute la pièce uniformément.
Plusieurs Nains sont présents.
Il en reconnaît un pour avoir déjà croisé sa route : Jah'soldier. Il parle tout bas avec un nain en robe couverte de runes, en retrait sur la droite, près d'une bibliothèque couverte de vieux livres et de parchemins.
Un autre Nain très connu nommé Sandolphane lui tourne le dos. Lui aussi converse avec un autre Nain maître en Magie à voix basse.
Aucun n'a semble-t-il remarqué sa présence.
En retrait sur sa gauche, derrière un comptoir de verre, un autre Nain le regarde d'un oeil curieux.
La main levée en signe de paix, Melmoth s'approche doucement pour ne pas attirer l'attention des autres, sa capuche ne laissant pas apparaître ses traits.
Le comptoir est couvert de livres, de pierres, de fioles, tout un tas d'ustensiles magiques dont le rôdeur ne connaît pas l'utilité.
Ne parlant pas un seul mot du dialecte Nain et ne sachant pas si le Nain parle la Langue Commune, il tend au vendeur le billet que le vieil Elfe lui a remis, la tête humblement penchée en avant.
En grommelant, le vendeur s'adresse à lui en Haut Elfe avec un fort accent caverneux mais parfaitement compréhensible, d'une voix très basse :
"Et quel est donc l'Elfe qui souhaite connaître les mystères des runes du grand Kardak Gründd ?"
Et Melmoth de répondre doucement à son tour :
"Maître des Runes, le Nom de l'Elfe ne te sera d'aucune utilité.
Je paie pour le livre et je m'enfuis.
Tu n'est pas sans savoir l'aversion des tiens pour ma race et tu devines aisément que mon chemin jusqu'ici n'a pas été facile.
Tous les Nains n'auront pas ta patience ou celle de certains de vos chasseurs.
Déjà vos Gardes m'ont sévèrement averti, me laissant aux portes de la mort alors que je venais en paix.
Quel est ton prix ?"
L'air pensif, tiraillant sa barbe colorée et savamment travaillée en tresses attachées par des bagues runiques, le Nain met un temps précieux à répondre.
Melmoth scrute prudemment la salle par des coups d'oeil furtifs : rien ne semble distraire les autres Nains affairés, dont la patience et le savoir en commerce sont aussi célèbres que leur addiction pour l'alcool.
"Pour toi, j'enfreindrai la loi des Nains. Le prix sera élevé."
"Pour toi je ne suis qu'un client et tu es un commerçant. Aucune loi contre çà.
Et puis personne ne saura."
"Le prix devient abordable mais il me faut quelque chose en échange, de la bonne matière à travailler.
Et il me faut ton Nom.
Si tu acceptes mes conditions, les écritures sont à toi pour 40 pièces d'or."
Le prix était effectivement élevé pour un livre commun chez les Nains...mais rare chez les Elfes.
"Que demandes-tu en échange ? J'ai quelques pièces de Chêne Eternel dont tu sauras sûrement tirer profit.
Chez moi, les mages en font de puissantes baguettes."
"Ton Nom, rôdeur ?"
Disant cela, le Nain pousse sur le comptoir un rouleau de parchemin couvert d'un étui de cuir rouge couvert de runes.
Melmoth reconnaît vaguement sur le cuir quelques signes semblables à ceux du billet remis par le vieil Elfe, mais rien ne l'assure que le Nain n'est pas en train de le doubler.
N'étant pas en position de force, le rôdeur convient que l'accord est honnête.
Tirant de son sac les quelques branches de Chêne Eternel qu'il a trouvées en chemin, posant sa bourse à côté, il met sa main sur le rouleau, prêt à s'en emparer.
Soudain, le Nain pose une main de fer par dessus, le bloquant sans effort.
Regardant en direction de son visage, il demande :
"Rôdeur, tu as du courage d'être venu jusqu'ici pour un parchemin sans valeur à tes yeux.
Je pourrai facilement me dévoiler tes traits, mais il semble que tu tienne à les garder cacher, aussi je respecte ton choix.
Mais donnes-moi ton nom pour que notre accord soit conclu. Sinon..."
Pris au piège, très tendu, le rôdeur est obligé de répondre. "On me nomme Melmoth. Je te prie de garder ce nom pour toi."
Forçant la main du Nain, le rôdeur glisse le rouleau sous sa cape et prend discrètement la direction des portes sans se retourner.
Il entend le Nain soupeser la bourse.
Il a dû voir sur le cuir noir la dague blanche avec la gouttelette rouge à sa pointe.
Il ne connaît pas la valeur que le Vendeur de Magie accorde à sa vie, mais désormais ce dernier sait qu'elle a un prix.
Dehors, la nuit est à peine avancée.
Melmoth s'avance doucement, ne percevant rien de dangereux à sa portée.
Mais il ressent soudain une fatigue irrésistible.
Aurait-il présumé de ses forces ? La tension l'aurait-elle tenu éveillé au-delà de ses forces ?
Il est forcé de mettre un genou à terre en pleine rue.
Affolé, il aperçoit maintenant non loin deux Nains que sa fatigue lui avait dissimulés.
l'un, adossé à un mur à moins de dix pas de lui semble faire un somme tranquille et silencieux.
Ses traits et sa barbe courte le font paraître jeune . Mais pas moins dangereux que les autres.
Le second semble faire de même sur le pas d'une porte un peu plus loin. Ses traits ne lui sont pas visibles.
Sentant ses forces faiblir rapidement, le rôdeur craint de s'endormir... à jamais ?
Sa témérité l'a mis à la merci de ses adversaires.
Sauront-ils qu'il n'est pas venu en ennemi cette nuit ?
Sa vie ne tient qu'à un fil.
L'heure venue, Melmoth rouvre la porte capricieuse qui pivote sans bruit.
Dans la nuit, la cité est toujours aussi calme, pas de lumière, pas de bruit... sauf un ronflement bruyant et très proche.
Scrutant dans la direction ou il a laissé les deux Nains ivres la veille, il ne voit plus que le tonneau et les restes de leur beuverie.
Avançant de quelques pas, le rôdeur trouve la célèbre source sonore et n'en croit pas ses yeux.
Personne sur cette terre ne pourrait croiser le célèbre guerrier au filet qu'est Borïn.
Tout heureux qu'il soit endormi, le ranger avance rapidement vers son but à travers les maisons silencieuses.
Encore une fois, le destin ne lui est pas favorable : un Nain noctambule avance lentement vers lui.
Saisissant deux flèches à bout rond, le rôdeur s'engouffre dans la ruelle adjacente.
Les maisons sont basses et il tente sa chance.
Par-dessus les toits, ses deux traits partent en direction du ciel.
Quelques secondes après, un bruit sourd suivi d'un grognement lui indiquent qu'il a fait mouche.
Le rôdeur n'est pas venu pour tuer et laisse donc le Nain inconnu assommé pour continuer sa mission.
Il a vite repéré son objectif.
Se faufilant tel une ombre, il longe les murs de l'Ecole de Magie et s'engouffre dans le bâtiment par les portes principales.
A l'intérieur, tout respire la Magie et le rôdeur est mal à l'aise.
Le sol est dallé, les murs sont couverts de tapisseries aux signes incompréhensibles au profane.
Aucune lampe ni torche n'est visible, et pourtant une lumière tamisée éclaire toute la pièce uniformément.
Plusieurs Nains sont présents.
Il en reconnaît un pour avoir déjà croisé sa route : Jah'soldier. Il parle tout bas avec un nain en robe couverte de runes, en retrait sur la droite, près d'une bibliothèque couverte de vieux livres et de parchemins.
Un autre Nain très connu nommé Sandolphane lui tourne le dos. Lui aussi converse avec un autre Nain maître en Magie à voix basse.
Aucun n'a semble-t-il remarqué sa présence.
En retrait sur sa gauche, derrière un comptoir de verre, un autre Nain le regarde d'un oeil curieux.
La main levée en signe de paix, Melmoth s'approche doucement pour ne pas attirer l'attention des autres, sa capuche ne laissant pas apparaître ses traits.
Le comptoir est couvert de livres, de pierres, de fioles, tout un tas d'ustensiles magiques dont le rôdeur ne connaît pas l'utilité.
Ne parlant pas un seul mot du dialecte Nain et ne sachant pas si le Nain parle la Langue Commune, il tend au vendeur le billet que le vieil Elfe lui a remis, la tête humblement penchée en avant.
En grommelant, le vendeur s'adresse à lui en Haut Elfe avec un fort accent caverneux mais parfaitement compréhensible, d'une voix très basse :
"Et quel est donc l'Elfe qui souhaite connaître les mystères des runes du grand Kardak Gründd ?"
Et Melmoth de répondre doucement à son tour :
"Maître des Runes, le Nom de l'Elfe ne te sera d'aucune utilité.
Je paie pour le livre et je m'enfuis.
Tu n'est pas sans savoir l'aversion des tiens pour ma race et tu devines aisément que mon chemin jusqu'ici n'a pas été facile.
Tous les Nains n'auront pas ta patience ou celle de certains de vos chasseurs.
Déjà vos Gardes m'ont sévèrement averti, me laissant aux portes de la mort alors que je venais en paix.
Quel est ton prix ?"
L'air pensif, tiraillant sa barbe colorée et savamment travaillée en tresses attachées par des bagues runiques, le Nain met un temps précieux à répondre.
Melmoth scrute prudemment la salle par des coups d'oeil furtifs : rien ne semble distraire les autres Nains affairés, dont la patience et le savoir en commerce sont aussi célèbres que leur addiction pour l'alcool.
"Pour toi, j'enfreindrai la loi des Nains. Le prix sera élevé."
"Pour toi je ne suis qu'un client et tu es un commerçant. Aucune loi contre çà.
Et puis personne ne saura."
"Le prix devient abordable mais il me faut quelque chose en échange, de la bonne matière à travailler.
Et il me faut ton Nom.
Si tu acceptes mes conditions, les écritures sont à toi pour 40 pièces d'or."
Le prix était effectivement élevé pour un livre commun chez les Nains...mais rare chez les Elfes.
"Que demandes-tu en échange ? J'ai quelques pièces de Chêne Eternel dont tu sauras sûrement tirer profit.
Chez moi, les mages en font de puissantes baguettes."
"Ton Nom, rôdeur ?"
Disant cela, le Nain pousse sur le comptoir un rouleau de parchemin couvert d'un étui de cuir rouge couvert de runes.
Melmoth reconnaît vaguement sur le cuir quelques signes semblables à ceux du billet remis par le vieil Elfe, mais rien ne l'assure que le Nain n'est pas en train de le doubler.
N'étant pas en position de force, le rôdeur convient que l'accord est honnête.
Tirant de son sac les quelques branches de Chêne Eternel qu'il a trouvées en chemin, posant sa bourse à côté, il met sa main sur le rouleau, prêt à s'en emparer.
Soudain, le Nain pose une main de fer par dessus, le bloquant sans effort.
Regardant en direction de son visage, il demande :
"Rôdeur, tu as du courage d'être venu jusqu'ici pour un parchemin sans valeur à tes yeux.
Je pourrai facilement me dévoiler tes traits, mais il semble que tu tienne à les garder cacher, aussi je respecte ton choix.
Mais donnes-moi ton nom pour que notre accord soit conclu. Sinon..."
Pris au piège, très tendu, le rôdeur est obligé de répondre. "On me nomme Melmoth. Je te prie de garder ce nom pour toi."
Forçant la main du Nain, le rôdeur glisse le rouleau sous sa cape et prend discrètement la direction des portes sans se retourner.
Il entend le Nain soupeser la bourse.
Il a dû voir sur le cuir noir la dague blanche avec la gouttelette rouge à sa pointe.
Il ne connaît pas la valeur que le Vendeur de Magie accorde à sa vie, mais désormais ce dernier sait qu'elle a un prix.
Dehors, la nuit est à peine avancée.
Melmoth s'avance doucement, ne percevant rien de dangereux à sa portée.
Mais il ressent soudain une fatigue irrésistible.
Aurait-il présumé de ses forces ? La tension l'aurait-elle tenu éveillé au-delà de ses forces ?
Il est forcé de mettre un genou à terre en pleine rue.
Affolé, il aperçoit maintenant non loin deux Nains que sa fatigue lui avait dissimulés.
l'un, adossé à un mur à moins de dix pas de lui semble faire un somme tranquille et silencieux.
Ses traits et sa barbe courte le font paraître jeune . Mais pas moins dangereux que les autres.
Le second semble faire de même sur le pas d'une porte un peu plus loin. Ses traits ne lui sont pas visibles.
Sentant ses forces faiblir rapidement, le rôdeur craint de s'endormir... à jamais ?
Sa témérité l'a mis à la merci de ses adversaires.
Sauront-ils qu'il n'est pas venu en ennemi cette nuit ?
Sa vie ne tient qu'à un fil.