07-11-2010, 17:27:08
La leçon du chasseur
Après un temps indéfini, à l'agonie et épuisé, Melmoth reprend conscience.
C'est la nuit.
Du sang d'une blessure à la tête a séché dans son cou et il peut à peine bouger.
Dans un effort douloureux, il décroche une fiole à sa ceinture, casse le goulot et la vide d'un trait.
Après quelques minutes, la boisson fait son effet.
Reprenant quelques forces, le rôdeur s'assoit dans les hautes herbes.
Au loin, la citadelle des Nains se découpe, d'un noir d'encre sur la nuit étoilée.
Aucune trace des Gardes de Pierre.
Par sécurité cependant, il s'éloigne péniblement vers les montagnes proches, puisant dans les faibles forces que la potion lui a restituées.
Au pied des montagnes, il s'écroule au sol plus qu'il ne s'assoit.
Par sécurité, il décide de na pas allumer de feu.
Reprenant son souffle, il vérifie d'abord son équipement. Rien ne manque.
Avec de l'eau tirée de son outre, il nettoie sa plaie à la tête et ses vêtements.
Il s'abreuve longuement. Quelques cèpes et une demi-miche de pain achèvent de le restaurer.
Il a déjà repris assez de vie pour reprendre sa mission.
La douleur est sa compagne, il en a l'habitude, elle lui rappelle qu'il est en vie.
Il manque cependant d'énergie, aussi décide-t-il de se reposer avant de reprendre le chemin de la cité Naine.
S'enroulant dans sa cape, adossé contre des buissons au fond d'une légère dépression, à l'abri du vent, le rôdeur s'endort.
Il est en sécurité.
Du moins le croit-il.
Encore une fois, l'elfe est trop sûr de lui. La leçon va être cruelle.
Une effroyable douleur au côté le réveille dans son profond sommeil.
Ecroulé sur le flanc, il porte la main à son côté et constate avec effroi qu'une flèche s'est fichée entre ses côtes.
Elle n'a pas pénétré profondément, ne touchant probablement aucun organe vital, mais il saigne abondamment et la douleur est vive, à la limite du supportable.
Il sait qu'il ne doit pas crier, cela signifierait sa mort.
Il espère juste que la pointe n'est pas empoisonnée, comme le laisse supposer l'empennage triple de la longue flèche, du genre dont se servent les chasseurs.
Mais quel diable a pu le toucher en pleine nuit ? Il ne voit personne à plus de cent pas !
Soudain, un second sifflement lui signale que son calvaire n'est pas fini.
Instinctivement, il approche son sac de voyage pour se protéger du mieux qu'il peut. Il n'a pas de bouclier.
Son réflexe lui sauve la vie.
Le second trait se fiche avec une précision démentielle juste à côté de l'autre.
Heureusement, elle entame à peine les chairs après avoir traversé son sac et s'est fichée elle aussi entre ses côtes.
Il ne peut pourtant pas retenir son cri malgré son entrainement, des larmes de douleur emplissent ses yeux et sa vue se trouble.
Alors il entend les pas lents et réguliers qui approchent.
Melmoth ne peut le voir, trop faible pour bouger.
Le personnage s'arrête à quelques pas.
Il ne dit pas un mot, juste un grognement haineux : un Nain !
Sachant le chasseur talentueux et probablement expérimenté à la justesse de ses deux traits décochés dans la nuit, le rôdeur n'a qu'une solution.
N'ayant pas la haine pure des Nains qu'ont habituellement les Elfes au sang pur, il n'éprouve aucune honte à s'adresser à lui :
"Noble chasseur,
Mon nom est Melmoth, je suis le messager des Ombres.
Je suis aux portes de la mort après que les gardes de votre puissante cité m'aient pourchassé hors de vos murs, me laissant à l'agonie devant vos portes.
Alors que je regagnais péniblement un peu de vie dans la froidure de la nuit, je fus frappé de deux traits de votre arc précis et puissant.
Je suis sûr que les Dieux vous seraient gré de me laisser fuir votre courroux, que je ne me souviens pas d'avoir mérité.
Vous ne gagneriez que peu de renommée à m'affronter ainsi diminué, tandis que votre talent de chasseur pourrait s'en trouver loué si d'aventure vous me laissiez filer...
Il se trouvera probablement d'autres occasions de nous affronter si vous le désirez, d'égal à égal.
Les Ombres se verraient également obligées d'une dette pour cela."
Sans un mot, le Nain fit un signe de tête vers la direction à laquelle il tournait déjà le dos, signifiant ainsi à l'Elfe qu'il pouvait partir.
Sans demander son reste, Melmoth déguerpit aussi rapidement que son triste état le lui permettait, moitié en rampant, moitié se trainant au sol tel un animal blessé par un chasseur.
Toujours silencieux, le Nain cracha par terre, et reprit sa route.
Dans un dernier effort, l'elfe cria dans la nuit en direction du Nain : "Quel est ton nom, noble chasseur ?
Il mérite d'être écrit en lettres d'argent au registre des Ombres. Nous avons une dette envers toi.
Si toutefois la nuit est ton Domaine, nous pourrions être amenés à nous rencontrer de nouveau. Je sais que tu sauras me retrouver.
Que les Ombres protègent tes pas !"
Et il perd connaissance une fois de plus.
Ayant frôlé la mort et ne devant sa survie qu'à la charité assez inhabituelle de ce chasseur à l'adresse exceptionnelle, Melmoth survit cependant à cette aventure.
Pendant plusieurs lunes, comme une bête, il se traine au sol ou somnole à demi conscient, à la merci du moindre prédateur.
Avant longtemps, il n'a même pas la force d'ôter le premier trait qui l'avait transpercé, n'en cassant que la hampe.
Le second était toujours fiché dans son sac.
Par chance, la fiole avalée juste avant sa rencontre avec le chasseur l'a probablement protégé d'une infection, à coup sûr mortelle compte-tenu de son état.
Reprenant progressivement des forces, il est maintenant capable de se déplacer à nouveau normalement.
Bien entendu, il faudra encore du temps pour qu'il retrouve la fluidité de ses gestes et sa propre adresse au tir.
Pendant tout ce temps, il pourra à loisir méditer la leçon du chasseur Nain et chercher à comprendre pourquoi il lui a laissé la vie.
La proie n'était-elle pas à la hauteur de ses talents de chasseur ?
Ne voulait-il affronter l'Elfe que dans un combat loyal, à armes égales ?
Avait-il d'autres ambitions ... peut-être les Ombres ?
Dans tous les cas, Melmoth se devrait de rencontrer à nouveau le chasseur.
Il avait une dette envers lui.
Les Ombres avaient une dette envers lui.
Dès que sa santé le lui permettrait, il partirait en quête du Nain.
Son nom était gravé sur la hampe de ses flèches, dont une des pointes de pierre était toujours dans ses chairs et le marquerait à jamais.
Il devrait se mettre en quête de Baldor Nordhal.
Après un temps indéfini, à l'agonie et épuisé, Melmoth reprend conscience.
C'est la nuit.
Du sang d'une blessure à la tête a séché dans son cou et il peut à peine bouger.
Dans un effort douloureux, il décroche une fiole à sa ceinture, casse le goulot et la vide d'un trait.
Après quelques minutes, la boisson fait son effet.
Reprenant quelques forces, le rôdeur s'assoit dans les hautes herbes.
Au loin, la citadelle des Nains se découpe, d'un noir d'encre sur la nuit étoilée.
Aucune trace des Gardes de Pierre.
Par sécurité cependant, il s'éloigne péniblement vers les montagnes proches, puisant dans les faibles forces que la potion lui a restituées.
Au pied des montagnes, il s'écroule au sol plus qu'il ne s'assoit.
Par sécurité, il décide de na pas allumer de feu.
Reprenant son souffle, il vérifie d'abord son équipement. Rien ne manque.
Avec de l'eau tirée de son outre, il nettoie sa plaie à la tête et ses vêtements.
Il s'abreuve longuement. Quelques cèpes et une demi-miche de pain achèvent de le restaurer.
Il a déjà repris assez de vie pour reprendre sa mission.
La douleur est sa compagne, il en a l'habitude, elle lui rappelle qu'il est en vie.
Il manque cependant d'énergie, aussi décide-t-il de se reposer avant de reprendre le chemin de la cité Naine.
S'enroulant dans sa cape, adossé contre des buissons au fond d'une légère dépression, à l'abri du vent, le rôdeur s'endort.
Il est en sécurité.
Du moins le croit-il.
Encore une fois, l'elfe est trop sûr de lui. La leçon va être cruelle.
Une effroyable douleur au côté le réveille dans son profond sommeil.
Ecroulé sur le flanc, il porte la main à son côté et constate avec effroi qu'une flèche s'est fichée entre ses côtes.
Elle n'a pas pénétré profondément, ne touchant probablement aucun organe vital, mais il saigne abondamment et la douleur est vive, à la limite du supportable.
Il sait qu'il ne doit pas crier, cela signifierait sa mort.
Il espère juste que la pointe n'est pas empoisonnée, comme le laisse supposer l'empennage triple de la longue flèche, du genre dont se servent les chasseurs.
Mais quel diable a pu le toucher en pleine nuit ? Il ne voit personne à plus de cent pas !
Soudain, un second sifflement lui signale que son calvaire n'est pas fini.
Instinctivement, il approche son sac de voyage pour se protéger du mieux qu'il peut. Il n'a pas de bouclier.
Son réflexe lui sauve la vie.
Le second trait se fiche avec une précision démentielle juste à côté de l'autre.
Heureusement, elle entame à peine les chairs après avoir traversé son sac et s'est fichée elle aussi entre ses côtes.
Il ne peut pourtant pas retenir son cri malgré son entrainement, des larmes de douleur emplissent ses yeux et sa vue se trouble.
Alors il entend les pas lents et réguliers qui approchent.
Melmoth ne peut le voir, trop faible pour bouger.
Le personnage s'arrête à quelques pas.
Il ne dit pas un mot, juste un grognement haineux : un Nain !
Sachant le chasseur talentueux et probablement expérimenté à la justesse de ses deux traits décochés dans la nuit, le rôdeur n'a qu'une solution.
N'ayant pas la haine pure des Nains qu'ont habituellement les Elfes au sang pur, il n'éprouve aucune honte à s'adresser à lui :
"Noble chasseur,
Mon nom est Melmoth, je suis le messager des Ombres.
Je suis aux portes de la mort après que les gardes de votre puissante cité m'aient pourchassé hors de vos murs, me laissant à l'agonie devant vos portes.
Alors que je regagnais péniblement un peu de vie dans la froidure de la nuit, je fus frappé de deux traits de votre arc précis et puissant.
Je suis sûr que les Dieux vous seraient gré de me laisser fuir votre courroux, que je ne me souviens pas d'avoir mérité.
Vous ne gagneriez que peu de renommée à m'affronter ainsi diminué, tandis que votre talent de chasseur pourrait s'en trouver loué si d'aventure vous me laissiez filer...
Il se trouvera probablement d'autres occasions de nous affronter si vous le désirez, d'égal à égal.
Les Ombres se verraient également obligées d'une dette pour cela."
Sans un mot, le Nain fit un signe de tête vers la direction à laquelle il tournait déjà le dos, signifiant ainsi à l'Elfe qu'il pouvait partir.
Sans demander son reste, Melmoth déguerpit aussi rapidement que son triste état le lui permettait, moitié en rampant, moitié se trainant au sol tel un animal blessé par un chasseur.
Toujours silencieux, le Nain cracha par terre, et reprit sa route.
Dans un dernier effort, l'elfe cria dans la nuit en direction du Nain : "Quel est ton nom, noble chasseur ?
Il mérite d'être écrit en lettres d'argent au registre des Ombres. Nous avons une dette envers toi.
Si toutefois la nuit est ton Domaine, nous pourrions être amenés à nous rencontrer de nouveau. Je sais que tu sauras me retrouver.
Que les Ombres protègent tes pas !"
Et il perd connaissance une fois de plus.
Ayant frôlé la mort et ne devant sa survie qu'à la charité assez inhabituelle de ce chasseur à l'adresse exceptionnelle, Melmoth survit cependant à cette aventure.
Pendant plusieurs lunes, comme une bête, il se traine au sol ou somnole à demi conscient, à la merci du moindre prédateur.
Avant longtemps, il n'a même pas la force d'ôter le premier trait qui l'avait transpercé, n'en cassant que la hampe.
Le second était toujours fiché dans son sac.
Par chance, la fiole avalée juste avant sa rencontre avec le chasseur l'a probablement protégé d'une infection, à coup sûr mortelle compte-tenu de son état.
Reprenant progressivement des forces, il est maintenant capable de se déplacer à nouveau normalement.
Bien entendu, il faudra encore du temps pour qu'il retrouve la fluidité de ses gestes et sa propre adresse au tir.
Pendant tout ce temps, il pourra à loisir méditer la leçon du chasseur Nain et chercher à comprendre pourquoi il lui a laissé la vie.
La proie n'était-elle pas à la hauteur de ses talents de chasseur ?
Ne voulait-il affronter l'Elfe que dans un combat loyal, à armes égales ?
Avait-il d'autres ambitions ... peut-être les Ombres ?
Dans tous les cas, Melmoth se devrait de rencontrer à nouveau le chasseur.
Il avait une dette envers lui.
Les Ombres avaient une dette envers lui.
Dès que sa santé le lui permettrait, il partirait en quête du Nain.
Son nom était gravé sur la hampe de ses flèches, dont une des pointes de pierre était toujours dans ses chairs et le marquerait à jamais.
Il devrait se mettre en quête de Baldor Nordhal.