17-06-2020, 21:41:36
La pyromancienne se massa la tempe du bout du doigt, visiblement soucieuse. Avant de prendre la parole, elle devait se figurer mentalement la situation qui, devait-elle le reconnaître lui avait passablement échappé à l'intérieur de ce laboratoire si éloigné du coeur de l'intrigue. A peine avaient-ils approché des grilles de la citée en ruine qu'ils avaient été assaillis par l'effervescence du groupe hétéroclite que formait les survivants de l'assaut contre Isaroth. De nouvelles données concernant des enfants holdars venaient se greffer à un contexte pour le moins explosif.
Elle écouta chacun avec attention, sans pour autant qu'aucun sentiment ne se matérialise sur son visage diaphane.
"Que l'on m'explique en quoi la fille bénéficierait-elle d'un traitement de faveur en comparaison au père ? Oseriez-vous voir en elle qu'une insignifiante créature dénuée de la moindre volonté et incapable de prendre des décisions par elle-même ? Ne vous y trompez pas, sa langue est celle du vipère, retorse et fourbe, maniant avec talent le mensonge et la duperie. Ce n'est pas Pryd qui a su cajoler les travers de mon prédécesseur à la tête du caldrasir de Balard pour en faire un traite à la couronne. Ce n'est pas lui, non plus, qui a mené l'intendant Grid jusqu'à l'empoisonnement de son souverain en lui faisant miroiter l'objet de son désir. Ce fut Lhuste, aussi, qui mena bien des inquisiteurs dans la gueule béante de Ghultony où ils trouvèrent une mort certaine sans que celle-ci n'en ait eu le moindre scrupule ou remord. Définitivement, si nous devons en exécutant un, la seconde devra suivre le même destin.
Cela étant qu'ont-ils réellement fait de plus que ce que nos dirigeants se plaisent à faire depuis des générations pour assoir et accroitre leur pouvoir ? Nous manipuler, nous conditionner pour obtenir encore et toujours plus et surtout, nous oppresser et nous réduire à du bétail ou à de la chair à canon sous prétexte de notre naissance. La politique est ainsi cruelle. La guerre l'est tout autant. Aucun d'entre nous n'est en mesure d'affirmer, sans mentir de la plus honteuse des façons, que ses mains ne sont entachées d'aucun crime. Pryd et Lhuste se sont simplement servis de ce qui fait la noirceur de nos êtres pour en tirer avantage : ils n'ont fait que nourrir les travers tapis au fond de nos âmes pour nous mener là où ils l'avaient décidé.
En somme, si nos royaumes se sont trouvés déstabiliser par leurs manigances, ce n'est que parce qu'il existait un terreau fertile apte à les voir fleurir. Ils ont encouragé les individus dans ce qu'ils avaient de pire. Ils n'ont rien créé. Ils ont simplement utilisé. Ils s'en sont servis car c'était là, en dormance.
Dans un sens, ils ont permis de déceler en nos institutions les fruits pourris, que ce soit ce Caldras, perdu par son inconstance et son caractère influençable, ou encore cette institution obsolète qu'est la Haute-Inquisition, qui trop occupée à soupçonner des innocents, ne s'est pas vue infiltrée à son sommet. Je ne sais ce qu'il en était auprès des nations nordiques, mais je doute que leurs agissements diffèrent réellement de ce que j'ai pu observer dans le sud.
Cela étant, nous avons tous devant les yeux ce qu'est devenue Isaroth sous la domination des exarques et de ce matériau, cet Angil : un tas de ruine sur le point d'exploser. Tout ceci était une question de survie pour le peuple Holdar. Héros du Nord, auriez-vous hésité à exterminer des elfes et des taliens si la survie de vos royaumes en avait dépendu ? J'en doute, et Tilador s'en souvient pour une poignée de pièces d'or... Guerriers du Concordat, qu'est-ce donc que quelques vies nordiques pour s'assurer de la félicité des nôtres ? Si peu de choses, nous l'avons prouvé à maintes reprises...
Alors, jugez-les si cela vous chante. Leur sort m'indiffère, mais j'ose espérer que vous prendrez conscience de la vanité qui est la vôtre en vous pensant moralement supérieurs à eux.
Cela étant, ..."
Ses yeux filèrent et se posèrent inquisiteurs et irascibles face à l'homme bleu, en écho aux propos mercantiles et pragmatiques de Gorbad.
"Comme il est sournois de votre part, Pryd, de nous avoir proposé à Gorbad visiblement et à moi-même, ce poison qu'est l'Angil alors même que vous en connaissiez la nocivité sur les esprits. Rien que ce geste est le gage à mes yeux de vos intentions néfastes et il vous faudra probablement vous en justifier auprès des mes compagnons en liesse de vous imaginer à jamais inerte.
De même qu'il vous faudra nous justifier de votre idéal salvateur, vous qui restez ainsi les bras ballants pendant que votre citée est sur le point d'exploser, alors même que vos gens se battent encore des fidèles des exarques sans que vous ne tentiez de les prévenir. N'est-il pas de la responsabilité d'un monarque avisé que d'évacuer sa population en pareille situation, au delà de toute guerre civile ? Les enfants ne sont pas les seuls survivants d'Isaroth...
Et quant à eux, je ne vois aucune sagesse à les confier à cette holdare, dont les deux seuls arguments en sa faveur sont d'avoir paru stable lors d'une rencontre éphémère et d'avoir un jour mis au monde un être aussi détestable que Lhuste. S'il nous est difficile de juger de sa tempérance à l'heure actuelle, il n'est, au contraire, pas compliqué d'admettre que son éducation ne fut pas une franche réussite eut égard de ce qu'est devenue sa félonne de fille. Et c'est à elle que nous voulons confier ces enfants ?"
Sur ces mots, la jeune femme descendit de sa licorne et devant des yeux incrédules, commença à délaissa sa tunique. Elle se retourna, tout en dévoilant son dos nu. Tous purent alors voir sur peau d'une blancheur éclatante, des longues cicatrices rouges quadrillant son échine.
"Ce n'est pas parce qu'une femme est mère, elle est compétente pour l'être...
Telles sont les marques d'affection dont est capable une mère... Avoir enfanté n'est pas un critère suffisant. Encore faut-il qu'elle ait de l'amour à donner à ces enfants."
Tout en se rhabillant, elle continua sans une once de pudeur.
"En premier lieu, je suis d'avis de les écouter. Après tout, n'est-ce pas avant tout leur propre sort qui est en jeu et que nous essayons de leur imposer sans même chercher à les comprendre ?"
Elle écouta chacun avec attention, sans pour autant qu'aucun sentiment ne se matérialise sur son visage diaphane.
"Que l'on m'explique en quoi la fille bénéficierait-elle d'un traitement de faveur en comparaison au père ? Oseriez-vous voir en elle qu'une insignifiante créature dénuée de la moindre volonté et incapable de prendre des décisions par elle-même ? Ne vous y trompez pas, sa langue est celle du vipère, retorse et fourbe, maniant avec talent le mensonge et la duperie. Ce n'est pas Pryd qui a su cajoler les travers de mon prédécesseur à la tête du caldrasir de Balard pour en faire un traite à la couronne. Ce n'est pas lui, non plus, qui a mené l'intendant Grid jusqu'à l'empoisonnement de son souverain en lui faisant miroiter l'objet de son désir. Ce fut Lhuste, aussi, qui mena bien des inquisiteurs dans la gueule béante de Ghultony où ils trouvèrent une mort certaine sans que celle-ci n'en ait eu le moindre scrupule ou remord. Définitivement, si nous devons en exécutant un, la seconde devra suivre le même destin.
Cela étant qu'ont-ils réellement fait de plus que ce que nos dirigeants se plaisent à faire depuis des générations pour assoir et accroitre leur pouvoir ? Nous manipuler, nous conditionner pour obtenir encore et toujours plus et surtout, nous oppresser et nous réduire à du bétail ou à de la chair à canon sous prétexte de notre naissance. La politique est ainsi cruelle. La guerre l'est tout autant. Aucun d'entre nous n'est en mesure d'affirmer, sans mentir de la plus honteuse des façons, que ses mains ne sont entachées d'aucun crime. Pryd et Lhuste se sont simplement servis de ce qui fait la noirceur de nos êtres pour en tirer avantage : ils n'ont fait que nourrir les travers tapis au fond de nos âmes pour nous mener là où ils l'avaient décidé.
En somme, si nos royaumes se sont trouvés déstabiliser par leurs manigances, ce n'est que parce qu'il existait un terreau fertile apte à les voir fleurir. Ils ont encouragé les individus dans ce qu'ils avaient de pire. Ils n'ont rien créé. Ils ont simplement utilisé. Ils s'en sont servis car c'était là, en dormance.
Dans un sens, ils ont permis de déceler en nos institutions les fruits pourris, que ce soit ce Caldras, perdu par son inconstance et son caractère influençable, ou encore cette institution obsolète qu'est la Haute-Inquisition, qui trop occupée à soupçonner des innocents, ne s'est pas vue infiltrée à son sommet. Je ne sais ce qu'il en était auprès des nations nordiques, mais je doute que leurs agissements diffèrent réellement de ce que j'ai pu observer dans le sud.
Cela étant, nous avons tous devant les yeux ce qu'est devenue Isaroth sous la domination des exarques et de ce matériau, cet Angil : un tas de ruine sur le point d'exploser. Tout ceci était une question de survie pour le peuple Holdar. Héros du Nord, auriez-vous hésité à exterminer des elfes et des taliens si la survie de vos royaumes en avait dépendu ? J'en doute, et Tilador s'en souvient pour une poignée de pièces d'or... Guerriers du Concordat, qu'est-ce donc que quelques vies nordiques pour s'assurer de la félicité des nôtres ? Si peu de choses, nous l'avons prouvé à maintes reprises...
Alors, jugez-les si cela vous chante. Leur sort m'indiffère, mais j'ose espérer que vous prendrez conscience de la vanité qui est la vôtre en vous pensant moralement supérieurs à eux.
Cela étant, ..."
Ses yeux filèrent et se posèrent inquisiteurs et irascibles face à l'homme bleu, en écho aux propos mercantiles et pragmatiques de Gorbad.
"Comme il est sournois de votre part, Pryd, de nous avoir proposé à Gorbad visiblement et à moi-même, ce poison qu'est l'Angil alors même que vous en connaissiez la nocivité sur les esprits. Rien que ce geste est le gage à mes yeux de vos intentions néfastes et il vous faudra probablement vous en justifier auprès des mes compagnons en liesse de vous imaginer à jamais inerte.
De même qu'il vous faudra nous justifier de votre idéal salvateur, vous qui restez ainsi les bras ballants pendant que votre citée est sur le point d'exploser, alors même que vos gens se battent encore des fidèles des exarques sans que vous ne tentiez de les prévenir. N'est-il pas de la responsabilité d'un monarque avisé que d'évacuer sa population en pareille situation, au delà de toute guerre civile ? Les enfants ne sont pas les seuls survivants d'Isaroth...
Et quant à eux, je ne vois aucune sagesse à les confier à cette holdare, dont les deux seuls arguments en sa faveur sont d'avoir paru stable lors d'une rencontre éphémère et d'avoir un jour mis au monde un être aussi détestable que Lhuste. S'il nous est difficile de juger de sa tempérance à l'heure actuelle, il n'est, au contraire, pas compliqué d'admettre que son éducation ne fut pas une franche réussite eut égard de ce qu'est devenue sa félonne de fille. Et c'est à elle que nous voulons confier ces enfants ?"
Sur ces mots, la jeune femme descendit de sa licorne et devant des yeux incrédules, commença à délaissa sa tunique. Elle se retourna, tout en dévoilant son dos nu. Tous purent alors voir sur peau d'une blancheur éclatante, des longues cicatrices rouges quadrillant son échine.
"Ce n'est pas parce qu'une femme est mère, elle est compétente pour l'être...
Telles sont les marques d'affection dont est capable une mère... Avoir enfanté n'est pas un critère suffisant. Encore faut-il qu'elle ait de l'amour à donner à ces enfants."
Tout en se rhabillant, elle continua sans une once de pudeur.
"En premier lieu, je suis d'avis de les écouter. Après tout, n'est-ce pas avant tout leur propre sort qui est en jeu et que nous essayons de leur imposer sans même chercher à les comprendre ?"