La Maison des Ombres
#56
Au début de l'heure des loups, avec une exactitude caractérisant en toutes choses le Maître de la Maison Bras d'Argent, Anghus claqua dans ses mains plusieurs fois tout en haussant la voix pour attirer l'attention des personnes présentes.

Thain sous la montagne, Seigneurs et Maîtres de Maisons, Conseillers, Guerriers et .... elfes, permettez-moi de vous interrompre dans vos conversations.

Dans quelques instants, il nous sera offert à boire et à manger, nous pourrons nous détendre et nous désaltérer tout en dressant le bilan de notre action.
Tout d'abord, je laisserai la parole à Grundel, qui nous fera un résumé de la situation et des évènements qui nous ont tous conduits ici ce soir, en commençant par quelques révélations le concernant qu'il choisit de rendre publiques en présence du Thain.

Jetant un rapide regard aux elfes, Anghus poursuivit.
Les elfes ici présents ont aidé à atteindre une partie de nos objectifs, en accompagnant les nains de Karad faisant partie de leur guilde.
C'est un évènement sans précédent dans l'histoire de nos deux peuples.
Baram II, le Thain sous la montagne, s'exprimera à ce propos ainsi qu'au sujet de la Maison des Ombres.
Enfin, je vous remettrai, au nom du Thain et au nom de la guilde du pavois, les salaires que vous avez mérités ainsi qu'une prime substantielle fournie par le Thain.
Vous recevrez enfin un présent de la part de la Maison Bras d'Argent, en signe de reconnaissance et d'amitié.

Installez-vous confortablement, vous l'avez compris, nous sommes réunis pour quelques heures...

Grundel, c'est à vous...


Le Conseiller Grundel, avec un dernier regard pour les quelques elfes rassemblés derrière lui, démontrait une retenue attendue, étant donné son manque d'appétit pour les grands discours et autres mondanités politiques.
Avec un sourire contrit, une grande respiration, presque un profond soupir, le doux nain commença son histoire.

Pour moi, tout a commencé il y a bien longtemps, alors que j'étais encore un nanillon.
Mon histoire est extrêment proche de celle de Grendashk.
Je fus recueilli tout jeune par une bande de va nu pieds cherchant quelques mauvaises actions à accomplir dans les environs de Kromgar, où je rôdais, sans connaissance de ma petite enfance si ce n'est quelques souvenirs parcellaires.
Ils me menèrent auprès d'un recruteur de la Maison des Ombres. Je fus aussitôt enrôlé dans leurs rangs.
Oui j'ai fait partie de la Maison des Ombres, dès cet instant et durant les quelques années qui suivirent.

Je vous épargne les détails, mais je fus bientôt amené à rencontrer Grendashk ainsi qu'un arcaniste, Modrag.
Nous étions tous les trois considérés comme de jeunes nains prometteurs.
Et nous l'étions.
A nouveau je passe sur les années qui suivirent durant lesquelles s'installa une ambiance de rivalité entre Grendashk et moi, tandis que Modrag lui, tentait toujours d'arrondir les angles.
Je savais ce qui allait se passer, j'avais appris à connaitre les nains comme Grendashk, forts, courageux, ambitieux et totalement dénués de sens moral.
Dès le début il avait rêvé de devenir le seigneur de la maison et de se servir de ce pouvoir pour se venger des elfes.
Il projetait d'exercer une telle influence à Karad qu'il pourrait manipuler le conseil et forcer le Thain à déclarer la guerre aux Hauts-Elfes.

Alors que la tension entre nous devenait insupportable, je décidais un soir de quitter la maison des ombres pour n'y jamais revenir, comprenant que la seule issue qui s'offrait à moi était la fuite ou l'assassinat de Grendashk, chose à laquelle je répugnais, à l'époque. Je fis bien. Modrag a été tué quelques jours plus tard, nul doute que mon tour serait venu très vite.
Je vécus quelques années en solitaire, rôdant dans les montagnes et les forêts alentours, avant de revenir à Karad, de m'enrôler dans l'armée et d'y suivre le chemin qui m'a mené jusqu'à ce poste de Conseiller que j'occupe aujourd'hui.

A ces mots, Grundel jeta un rapide regard sur Baram II, craignant visiblement que cette fonction ne soit remise en question ce soir.
Puis il poursuivit.

Suite à la tentative d'assassinat du Thain, ce dernier, ignorant de ces détails, m'a chargé d'organiser la chasse à l'encontre de Grendashk et de ses hommes, en se basant sur les informations recueillies des assassins que nous avions réussi à garder en vie, après l'attaque de la cérémonie des Fondelame.

Grendashk avait mis au point un système obligeant ses lieutenants de QG à se réunir et à être d'accord avant de mettre en commun les informations qui leur permettraient alors de localiser leur Maître.
Ceci pour garantir sa sécurité et du même coup sa tranquillité.
C'était de son initiative qu'il prenait des nouvelles des différents groupes et qu'il leur donnait les éventuels ordres d'action.
Nous devions donc localiser précisément ces groupes et les attaquer en les empêchant de communiquer entre eux afin de pouvoir recueillir les 4 parchemins nous permettant de trouver Grendashk.

Les Compagnons d'Ecridel, ici présents, ont reçu comme mission de se rendre à l'ouest d'Asteras, où ils ont déniché une des 4 cellules dans les tunnels d'un marais, puis de se rendre à l'étang de l'ours pour y déloger une seconde cellule.
Un groupe de guerriers nains, sous ma guidance, s'est rendu à Kromgar dans les anciennes mines, où nous avons combattu non seulement des ombres mais aussi des gobelins et des rats monstrueux.
Un autre groupe de guerriers se rendait lui dans une maison de Karad afin d'y combattre la dernière des cellules.
Nous avons ensuite mis nos informations en commun, ce qui nous a permis de découvrir la maison de Grundashk et de l'y acculer.

Au cours des différentes attaques, nous avons appris que l'ex-Seigneur des Ombres gardait prisonnière une de ses anciennes concubines, elle-même membre éminent des ombres, qui a profité de notre assaut pour s'échapper.
Je n'ai pas eu de nouvelles depuis son passage éclair durant le combat contre Grendashk.

Ce dernier s'est suicidé en se plantant une dague dans le cœur, sans que je comprenne véritablement pourquoi.
A croire qu'il était devenu un peu fou, un peu mégalomane, qu'il voulait une fin digne de lui ou quelque chose dans ce style.
Mais au fond, je l'ignore.

Voilà, c'était le résumé des évènements.
Voici aussi le journal de Grendashk, confirmant certains de mes dires et décrivant son histoire en parallèle, ainsi que celle de la Maison des Ombres durant le temps de sa primauté.
Nous avons trouvé ce journal dans la chambre du chef des ombres, dans un coffre.


Citation :L'histoire de Grendashk et de la Maison des Ombres.

Les origines de Grendashk sont floues. Une rumeur court le concernant disant que, tout nanillon, ses parents auraient été tués par un groupe d'elfes en maraude, qu'il aurait grandi entre chiens et loups, au cœur des terres de Kromgar.
Il a rejoint les Ombres très jeune, comme de nombreux autres membres.

Mais Grendashk y a progressé très vite. Essentiellement grâce à ses compétences de combat et à son absence totale de sens moral.
On dit qu'il a tué ou fait tuer ceux qu'il ne pouvait corrompre, dominer ou séduire.
Il a été remarqué et un arcaniste l'a pris sous son aile, lui ainsi que deux autres jeunes nains prometteurs, un ranger déjà doué et un arcaniste à peine révélé.
Il leur a appris à lire, à écrire. Puis ce fut l'histoire du peuple nain, ses coutumes, ses nombreux rituels et codes sociaux. Il leur a appris le savoir-vivre, la notion de nuance dans les mots et le texte, la stratégie du langage, la maitrise de l'humeur et celle de la rumeur.
A ce stade Grendashk n'en pouvait plus. Très au fait de ces choses maintenant, il les maitrisait sans les apprécier, son plaisir n'était pas là.
Assidu d'un des maîtres d'armes de la Maison, il entretenait sa rage et sa haine, sans s'en rendre compte, auprès du vieux guerrier, maître-lame manchot et grand pédagogue.
Ainsi Grendashk devint le redoutable combattant doublé du fin stratège qui, en quelques années, a réussit l'exploit de remonter la hiérarchie de la maison jusqu'à en prendre la tête, au sens figuré et au sens littéral, 2 ans avant le siège.

Ce furent deux années mirifiques pour la Maison des Ombres.
Tout réussissait à Grendashk. Certains pourraient en témoigner si la réussite du Seigneur des Ombres n'impliquait pas leur échec personnel et le plus souvent leur propre mort.
Ce fut le cas du jeune Arcaniste, ayant plusieurs fois tenté de pousser son ami à la modération, jusqu'à ce que de violentes querelles les opposent à ce sujet en public.
Un soir, Grendashk ordonna à un de ses hommes de le débarrasser du corps de l'arcaniste baignant dans son sang, au milieu de la salle à manger.
Le ranger, quand à lui, disparut dans la nature, on ignore son nom tout comme on ignore le pourquoi de sa disparition.

A cette époque la Maison des Ombres était puissante, séduisante aussi, à l'image de son Seigneur.
De nombreux nobles, militaires, gardes et gens du peuple, par bêtise, par vantardise, par appât de la vie facile, des jolies naines, du pouvoir de l'argent ou pour toutes autres raisons, se trouvaient en relation avec les Ombres. Et cela à tous les échelons du pouvoir, dans toutes les Maisons et même en dehors des cités.
Les guildes, les Maisons, grandes ou mineures, les marchands et même les militaires et les gardes de la cité freinaient autant que l'honneur et leur crainte du Thain le leur permettaient, devant la colère montante de Baram et sa volonté de mettre un terme à la situation. Ils craignaient que certaines réalités ne soient révélées au grand jour.
Le Seigneur des nains décida de former un groupe d'élite, dont la loyauté ne pouvait être remise en question, des gens fiables à 100%. Il leur confia la tâche difficile de lutter contre l'influence montante de la Maison des Ombres, peu importait les moyens que cela demanderait et les méthodes utilisées.
Ils allaient utiliser les propres méthodes de la Maison des Ombres.
Ils appliquaient pour ce faire les principes de Grungar dans sa perception la plus simpliste, revus et corrigés par les nécessités du moment : "Pour un œil les deux yeux, pour une dent toute la gueule."
Il plaça Anghus Bras d'Argent à la tête de ces nains d'élite. Et cela fonctionna.
Ils nettoyèrent efficacement le Grand Conseil, les Guildes et les Maisons des nains corrompus, des informateurs et autres traîtres.
Certains de ces derniers, ignorants de leur traîtrise, pris dans les rets de quelque piège subtil, furent simplement écartés de leurs fonctions et placés à des postes mineurs.

Quelques mois avant le siège, il y avait donc déjà une guerre qui se déroulait dans les tunnels de Karad Zirkomen ou, la nuit, dans ses rues baignées de la lueur de la lune.
Baram y mit un terme en lançant une partie de son armée à l'assaut du conclave des ombres juste après le repli des elfes.
Personne ne retrouva le corps de Grendashk. Personne ne pensa qu'il avait été tué.
Depuis ce jour la Maison des Ombres est de nouveau à l'image de son nom. Et Grendashk est maintenant de nouveau sur le devant de la scène.
Se tournant vers le Thain, mettant un genoux à terre, Grundel poursuivit :
Mon Thain, je vous présente mes excuses pour avoir tu ce que je ne pouvais me résoudre à avouer.
Je suis prêt à quitter votre service immédiatement ainsi qu'à me soumettre à toute sanction que vous jugerez juste d'appliquer à ma personne.
Y compris la mort, mon Thain, je suis votre dévoué serviteur.


Baram II, négligemment, dédramatisa la situation d'un signe de la main, invitant Grundel à poursuivre.
Continuez, Conseiller, nous verrons cela ensuite.

Grundel, un peu surpris et un peu saoul d'avoir tant parlé, obéit à son Thain.
Et bien à vrai dire je n'ai rien à ajouter.
Peut-être est-ce le moment de laisser les guerriers recrutés par les Bras d'Argent prendre la parole et poser leurs questions, présenter leur version des faits.

Cherchant confirmation auprès d'Anghus, qui la lui donna, Grundel engloba du regard l'ensemble des guerriers présents :
C'est à vous, si vous avez des questions, des remarques, des précisions à apporter, prenez la parole.
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