Gario
#17
-Selim, tu m'écoutes ?

La voix de Camilla, empreinte de reproches, rompit le cours de ses pensées. Tressaillant en reprenant brutalement contact avec la réalité, Selim détourna prestement le regard de l'horizon, où la courbe d'une dune s'entremêlait avec celles de Julanr. Clignant plusieurs fois des yeux, comme pour dissiper la rêverie qui l'avait emporté ailleurs, bien loin d'ici, il revient à la situation présente, pour ne pas dire désespérée. Camilla venait d'achever la lecture du message de Cundonya, lecture qui instillait des sentiments mitigés au sein du cercle de l'Invictus. Et comme bien souvent, c'était à lui, en tant que porte-parole de son petit groupe, d'adjoindre des mots aux sentiments. Précédant son propos d'un soupir vaguement désabusé, il prend la parole :

-Râpeuse est la plume maniée par la main qui a brandi l'épée. Dans les déliés de ces mots tracés d'une encre ensanglantée, je lis l'arrogance tyrannique de celui qui se croit être le plus fort, et pense l'avoir d'ores et déjà emporté. Sans compter que l'ensemble est nimbé du fétide relent des fallacieuses justifications de quelqu'un qui n'a manifestement pas la force morale d'assumer les actes qu'il a commis.

Saisissant du bout des doigts le parchemin, il le replie avec circonspection, comme s'il manipulait un objet souillé. Puis il le tend à Radoin, en reprenant avec une ironie encore plus mordante :

-En repassant par Babylios, aie l'obligeance de transmettre ceci à une quelconque autorité, qui saura bien mieux que nous quoi en faire. Après tout, nous ne sommes que d'insignifiants compagnons d'errance, et ne sommes rien comparé à tous ces sages et nobles dirigeants qui nous gouvernent, qui eux sont tant. Loin de nous l'idée de nous immiscer dans les jeux diplomatiques de nos supérieurs !

Il reçut un "Squick !" affirmatif en guise de réponse, puis il poursuivit, en balayant d'un regard équivoque chacun de ceux qui étaient là.

-Ceci étant dit, reste à savoir quoi faire à présent. J'ignore ce qu'il en est pour vous, camarades d'infortune, mais en ce qui me concerne, rien ne m'exalte davantage que la perspective d'aller à une mort certaine en une vaine tentative de jeter à bas de leurs piédestaux tous ces conquérants qui nous toisent depuis l'empyrée, auréolés de leur gloire impavide. Et bien que je me gausse des péjoratives épithètes dont on m'affuble d'ordinaire, je n'aimerais pas pour autant les déposséder de celle d'hypocrites. Aussi, je vous propose une réponse des plus circonstanciées pour ceux qui manient le verbe comme on manie une lame : l'éloquence sincère de l'acier.

Joignant le geste à la parole, il dégaine son cimeterre, avant de désigner de l'index la silhouette trapue de Gario qui ornait l'horizon.
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