La vie sauvage de Scytale
#6
Ce fut ainsi que débuta mon apprentissage de trappeur.

Chaque fois, mon nouveau mentor, me faisait passer de nouveaux tests pour vérifier mon sens de l'observation. Mais maintenant que j'avais cerné ses attentes, je commençais à mieux y répondre.
Puis, quand il fut certain que j'avais acquis un certain niveau dans le domaine, il en revint à des méthodes plus classiques : dans la boue, il me traçait les traces de pas de chaque bête, afin que je les connaisse toutes. Il m'exposa aussi, très sérieusement, toutes les subtilités qui permettent de différencier les excréments de ces animaux.

Régulièrement, nous passions une journée à récurer, comme à notre premier jour. Mais à vrai dire, ces journées me paraissaient moins repoussantes, alors. En effet, avec le sens que j'avais développé, je remarquais certains détails qui me permettaient d'en apprendre plus que je ne l'aurais cru sur le Temple et mes semblables. Parfois ce que je découvrais pouvais s'avérer compromettant ; pourtant je me gardais d'en faire usage.

Quant au reste de mon temps à l'école... je crois que les prêtres furent ravis de la tournure que cela prenait. Je devins, non seulement un bon élève, mais c'est aussi dans ces moments que naquit ma foi. Avant, j'écoutais, complètement désintéressé et incrédule. Mais les moments partagés avec Ohm, me permettaient de faire le lien entre la théorie, et la pratique. Et je crois bien que l'émerveillement que cela suscita envers notre monde et la nature, commença à ouvrir une brèche dans mes convictions athées.

Une autre conséquence de cette formation, fut la certitude que je nourris vis-à-vis de l'analphébisation de mon mentor. J'avais noté des détails, des signes de jalousie, vis-à-vis de ma capacité à lire. Surtout que jamais, il n'avait montré qu'il en fut capable. Son langage souffrait déjà de fortes lacunes, au demeurant... Et il préférait souvent faire un dessin sur le sol, que de s'engager dans de longues phrases.

Selon toutes vraisemblances, donc, mon maître aspirait à vouloir apprendre à lire et écrire. Il n'en formulait aucunement le souhait, mais peut-être la frustration, ou la honte, de ne pas savoir lire, était à l'origine du caractère bourru de l'homme.

Je décidai alors, pendant le temps que nous passions ensemble, d'insister sur le vocabulaire. Je reprenais souvent les choses pour les dires en d'autres termes. Et je notai l'infime temps de réflexion que prenait parfois l'homme, probablement pour mémoriser la chose. Peu à peu, j'observais quelque amélioration dans son élocution. Ce n'était pas grand chose, et probablement personne d'autre que moi ne le remarqua. Loin d'en ressentir une fierté, que j'aurais trouvé par trop vaniteuse, je trouvais simplement agréable de savoir qu'il en fut plus heureux pour lui-même.
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