Nevermore (Plus jamais)
#49
Le choc fut brutal.

Il entendit avant qu'il ne le sente le son funeste de ses os broyés.

Puis une douleur insupportable le traversa de part et d'autre de son corps. Intense. Intolérable...
Il se sentit soulevé et projeté en l'air aussi rapidement et facilement qu'une poupée de chiffon.

Il vit ses cheveux flotter, comme suspendus dans l'espace, et le ciel défiler devant ses yeux.

L'aube pointait déjà à l'horizon.

Lentement.

Puis ce fut le noir complet.


Il se mit alors à attendre dans les ténèbres impénétrables. Attendre avec crainte et appréhension l'arrivée des habituelles et effroyables visions qui prenaient plaisir à le tourmenter lors de ces phases d'inconscience.

Mais il ne se passa rien.

Il avait juste froid. Très froid.

Il attendit ce qui lui parut de longues et interminables minutes, mais rien ne changeait: toujours restait ce noir opaque et uniforme qui l'enveloppait.

Etait-il mort ?

Pour de bon ?

Si tel était le cas, la mort était loin d'être comme il avait imaginé.

Ce n'était qu'à la fois un vaste et étroit vide.

Il n'y avait rien.

Rien à voir.

Rien à faire.

Juste à attendre.

Eternellement.

L'angoisse le pris à la gorge.

Il tenta de crier, mais sa voix fut comme happée par les ténèbres.

Alors il se mit à attendre.

Longtemps.

Très longtemps.

Soudain, il lui sembla que la noirceur ambiante se mit à trembler, aussi étrange que cela pu paraître.

Puis il se sentit tomber. Tomber.

En dessous de lui, un point blanc et lumineux apparut peu à peu.

Qui grandit. Grandit... Pour finalement l'engloutir entièrement.


Il ouvrit les yeux.

Le ciel lui faisait face.

La nuit fuyait, laissant de plus en plus au soleil qui reprenait ses droits le terrain qu'elle avait gagnaient la vieille.
Et il en était ainsi, éternellement.
L'astre n'était pas encore visible, dissimulé au loin par l'es arbres constituant la forêt de Pelethor. Mais cela ne devrait plus tarder…

Il était allongé.
Il exprimait des difficultés à respirer.
Il tenta de bouger son corps, mais ne parvint pas à esquisser le moindre mouvement, ne serait qu'avec un seul doigt.
Il essaya à plusieurs reprises, mais rien n'y fit.
Son corps ne répondait plus.
Même plus le contact avec le sol, le souffle du vent sur peau, le glissement fluide du sang venant étancher la soif insatiable de la terre.
Il ne sentait plus rien.
Ni la douleur, ni même plus le contact avec le sol, ni le souffle du vent sur peau, ni le glissement fluide du sang venant étancher la soif insatiable de la terre.
Il avait juste froid.
Très froid.

La terreur s'empara de lui.


Il lui sembla qu'une mélancolie funeste et sordide résonnant dans sa tête, le spectre du désespoir et de la défaite l'avalant peu à peu.

Il lui sembla qu'une mélancolie funeste et sordide s'éleva autour de lui, le spectre du désespoir et de la défaite l'avalant peu à peu.
Non.
Non, ce n'est pas possible.
Pas ça. Pas ça...


Le sol se mit à nouveau à trembler.

Une immense masse obstruant la lumière s'avança vers lui, projetant sur lui une ombre de mauvaise augure…
Le troll arrivait.
De sa gueule coulait un filet de bave.
Ses yeux, sauvages et bestiaux, ne réclamaient que de broyer la chair et faire couler le sang.
Un véritable monstre.
Comme lui quelques instants plus tôt.
Mais les rôles avaient changé.

Non.
Non.
Il ne pouvait pas mourir maintenant.
Pas maintenant qu'il avait enfin décidé de lutter contre son destin.
Décider de ne plus fuir et de faire face.
Pourquoi ? Pourquoi les dieux étaient si cruels avec lui ? Pourquoi ?

Affolé il bougea la tête de gauche à droite, la seule chose qu'il pouvait encore bouger, afin de tenter de voir trouver quelque chose qui pourrait l'aider.
Un heureux hasard.
Un miracle…

Son regard tomba sur une forme assise sur un rocher plus mètres plus loin.
Le lynx.
Il le regardait, impassible.
Il paraissait presque sourire.
Enflure…

Il s'était fait avoir.
Il avait eu raison de se méfier et tort d'y avoir cru quand même.
Et maintenant il aller mourir.

Non, je ne peux pas mourir maintenant. Pas maintenant !
Je dois tous les tuer !
Je dois détruire et mettre fin à ce monde cruel !
Pourquoi mourir maintenant alors que je me suis enfin résigné à vivre ?
Je vous déteste.
Vous qui avaient créé ce monde.
Vous qui le contrôlent.
Divinités, dragons ou autre.
Je vous hais.
Vous m'entendez !
Je jure de tous vous exterminer.
TOUS.
VOUS M'ENTENDEZ BANDE D'ENFOIRES ? TOUS !



Il voulut crier sa haine, hurler son désespoir.
Mais juste sorti de sa bouche un gémissement misérable.
Le troll, lentement, leva sa masse au-dessus de sa tête.

Non… Non, souffla-t-il, désespéré.

Un flot ininterrompu d'images défila devant ses yeux.

Il allait mourir.
Maintenant.

Foutu vie.
Foutu destin.
Foutu monde.


La masse s'immobilisa.
Derrière le troll, le soleil était sur le point de paraître.
Même s'il survivait jusque-là, l'imposante créature lui barrait la vision.
On lui refusait même de contempler pour la dernière fois l'astre étincelant pour ses derniers instants.
Ordures…

Malgré l'implacabilité de la mort qui approchait, il tenta de se débattre, de se libérer de ses chaînes, de se battre.

Mais on ne lui accordait même pas cette chance.

Ce monde était pourri.
Jusqu'aux racines.
Et la branche sur laquelle il se trouvait allait se briser d'un instant à l'autre.

En agitant la tête dans tous les sens pour se débattre, quelque chose attira son attention qu'il n'avait pas repérée avant.
A quelques mètres à peine sur sa droite, se trouvait une fleur de mana, d'un bleu éclatant. Frêle. Fragile. Sublime.
Il se rappela de celle qu'il avait offerte à la femme corbeau.
Etait-ce hier ? Il y a plusieurs jours ? Plusieurs semaines ?
Alors que défilait entre les doigts d'Hallista le fil de sa vie, proche de l'extrémité, il n'avait plus aucune conscience du temps.
Mais il se rappela.
Se rappela de la jeune femme accrochant la fleur dans chevelure de jais.
Et les deux yeux du même bleu intense et profond le regarder.
Il voulut tendre une main pour tenter de s'en saisir.
Rien.
Une larme, la première depuis bien longtemps, coula sur sa joue et tomba sur le sol.
Finalement, il avait joué au jeu de la corbeau. Et il avait perdu.
Alors, dans murmure mélancolique et empreint de tristesse, il souffla :

Quoth…

La masse fendit l'air.
L'acier percuta son corps et le sol.
Ses membres furent expulsés, arrachés.
Une pluie de sang se mit à pleuvoir sur la scène.

Ce fut le noir total.

Puis plus rien.
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