Elle avait tracé à travers bois, sans réellement connaître sa destination, sans vraiment être sûr d'être réveillée. Son esprit n'était plus aux aguets, totalement absent. Il lui paraissait s'être effrité, comme une lame émoussée qui ne savait plus bien distinguer l'illusion du réel. Le moindre esprit de la forêt qui passait à sa portée était capté avec une acuité mordante, frôlait ses défenses mentales au point que c'en était douloureux.
Par quel miracle les avait-elle retrouvés ? Elle n'en avait pas la moindre idée. Mais la voilà qui se présentait dans ce petit bosquet, dans cette bulle de tranquillité. Son regard vide, presque aveugle. Ils ne le savaient pas, mais pourtant, elle les observait. Simplement pas de la même façon.
Devant ses yeux, le même voile persistait. Carmin.
Elle se revoyait dans cette chorégraphie macabre, à danser devant les lames, bondir face aux sorts. Trébucher, tomber, se briser. Dépassée par le nombre. Elle se souvenait avoir réalisé cette même chorégraphie, de nombreuses années en arrière. C'était un autre temps, une autre histoire. S'était-elle crue réellement capable de ne garder que le souvenir de sa renaissance, en occultant son agonie ? Elle n'avait pas toujours été ce milan flamboyant qui déployait ses ailes au-dessus de Pelethor, par la grâce d'Halista.
Elle ouvrit et fermât ses mains avec lenteur. Un salut très sec fut rendu aux Hérauts, alors que son regard restait rivé vers l'Ouest. Elle espérait, du plus profond de son être, ne pas avoir perdu la paix d'Halista.
« Je suis revenue, Hérauts du Renouveau. Le chant d'Halista m'a guidé jusqu'à vous. Nous allons devoir redoubler d'efforts pour La préserver. Ses ennemis se font nombreux à Sa porte … Et savent habilement en pénétrer les défenses. »
S'ils savaient.
Son ton sonnait faux. Elle déglutit avec lenteur et cessa de parler. Ouvrant ses bras encore couverts de bandage, elle fredonna ce qui pouvait s'apparenter à un chant, mais pour les oreilles attentives, étaient très certainement une incantation. Les arbres vénérables qui les entouraient semblèrent un instant se mouvoir, sans qu'il ne soit possible de le remarquer en les fixant longuement… Cela ressemblait davantage à une manipulation subtile dont on ne pouvait que surprendre l'avancée après coup. Les branches se refermèrent autour d'eux, s'entrelaçant avec lenteur et clôturant leur abri qui était alors définitivement imperméable aux intrusions.
« Mais ce soir, nous aurons tous besoin de repos, après avoir autant œuvrés. »
Pelethor, le repos des Hérauts.
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06-08-2012, 22:32:34
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