Devant pareille beauté, je me laissais gagner par d'agréables pensées. Le sommeil lui aussi me gagnait. Tout s'effaça bientôt... pour ne laisser place qu'à l'imagination...
Par-delà les vertes collines, on observait les hautes plaines qui n'avaient été soumises à aucune culture. Jamais une race n'avait pénétré ces terres, n'en avait percé les secrets. Si lointaines, comme un mirage, un azur qu'on ne touche pas, les douces plaines paraissaient d'or et de lumière. Je ne peux pas les atteindre. Il est des mystères qu'on ne résout pas. La nature reprend ses droits, elle interdit aux Taliens, aux Elfes, aux Agars, de même qu'à tous les peuples, certains de ses trésors. Et toujours un peu plus, les plaines brillaient dans leur halo de lumière. Je me remémorai alors les anneaux de bronze des tours immenses d'Asteras. Au coucher du soleil, celles-ci riaient aux éclats et illuminaient le ciel. La Grande Asteras. Asteras, l'arrogante. Je la survolais désormais. Les nuages s'émiettaient pour me permettre de la voir une dernière fois. Sa beauté était sans égal. Chaque bâtiment de la capitale était d'une matière noble, tel l'ivoire ou la pierre pâle. Aussi la Cité recelait-elle de merveilles architecturales. J'appréciais de me trouver au-dessus d'elle. Mais comme si sa puissance était infinie, elle chargea mon ciel avec ses défenses d'ivoire. Les plus hautes tours avaient transpercé les lambeaux de nuages. La nature, presque indolente, se laissait prendre. Se laissait agresser. Agresser par cette arrogance. Agresser par des Hauts-Elfes qui, à la gloire de leur peuple, avaient bâti une Cité incommensurablement belle. Une Cité prétentieuse. Comme ses habitants. Sa silhouette étriquée me déplait. Je rêve de courbes et d'harmonie. Par Fryelund ! Pourquoi les Hauts-Elfes emploient-ils le mot 'harmonie' pour désigner la capitale du royaume. Je trouve que tout y est démesuré. Démesuré. Mesuré. Non, démesuré. Il faut mesurer.. Il faut mesurer l'emprise qu'Asteras a sur le monde. Tu dois mesurer la... la...
Je me réveillai en sursaut. C'était le petit matin. Les buissons s'agitaient à nouveau.
Tu dois mesurer la distance qu'il te reste à parcourir pour atteindre Asteras. N'oublie pas qu'il te faut rentrer, et ce, malgré ta hantise, pour t'acheter quelque équipement. Lirais-tu dans mes pensées, ou mieux, mes rêves? J'ai rêvé cette nuit de contrées inconnues qu'il me tarde de découvrir. Si elles existent... Et mon formidable voyage a été interrompu par maintes images de la capitale. Ces images me hantent jusqu'au plus profond de mon sommeil. Et puis, je crois que mon inconscient a personnifié Asteras ... lui a donné vie, comme il est une vie dans la forêt de Pelethor. D'ailleurs en parlant de vie...
Sans mal, je me levai pour scruter les alentours.
« J'aurais juré que ... »
Des bruissements d'ailes et de branches se firent entendre. Un couple d'oiseaux cendrés s'enfuit de sa cachette. C'était ainsi, la faune jaillissait de nulle part, et au moment où on s'y attendait le moins. Il m'avait même semblé que les arbres s'étaient rapprochés durant la nuit. Ce n'était peut-être que mon imagination. Cependant, un vieux compagnon de quête, du nom de Segahäel, m'avait conté, à ce propos, des légendes étonnantes. Des arbres possédés par des esprits peuplaient nos forêts : on les appelait les Ents. La sève qui en coulait, ce courant de vie, était pareille à un courant de magie. De la même façon, les fruits des Ents emprisonnaient une énergie. Mon camarade druide Segahäel, disait même pouvoir les rencontrer, comme il rencontrait les esprits de la forêt.
Douce solitude
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08-12-2010, 02:53:05
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