Miraak Dal'Vë
Babylios, la perle des sables. Voilà près de quatre siècles, la cité de Babylios se développe au cœur du désert de Salith à l'extrême sud-est du Royaume d'Andoras. La cité, bâtie initialement sur une grande oasis en plein cœur du désert, s'est étendue pour devenir l'une des villes les plus florissantes d'Ecridel.
La capitale du peuple Hélion est reconnaissable entre toutes à son architecture unique. Les bâtiments sont dans leur immense majorité d'une blancheur étincelante, couleur obtenue à l'aide de chaux. Les bâtiments majeurs, au cœur de la ville sont recouverts de dômes, dorés pour la plupart mais d'autres sont colorés de rouges, jaune, bleu ou encore de vert. Cet assemblage de couleur en fait un joyau architectural à part entière et une citée que tous les membres des familles aisées de d'Ecridel se doivent de voir une fois dans leurs vies. Exception faite des ennemis historiques des Hélions évidement.
Toutefois, le peuple Hélion n'est pas connu comme étant un peuple très agressif et n'a pas connu beaucoup de grands affrontements au cours de son histoire. Les plus grands exploits guerriers des Hélions, comptés dans les gestes des bardes, les ont principalement opposés aux centaures pour des raisons religieuses et font pâle figure à côté des récits anciens des guerres opposant Nains, Haut-Elfes, Elfes Sylvains ou même, justement, Centaures.
À la guerre, les Hélions préfèrent des vies passées à étudier les mystères du monde et la philosophie. Et leur peuple en a bien profité. Babylios est aujourd'hui une cité riche, sa grande bibliothèque l'un des centres de concentration des savoirs les plus importants d'Ecridel.
Le cœur de la cité est aussi lumineux que riche, il trouve son origine dans l'installation des premiers Hélion dans le désert de Salith, guidés là par Hélios ou Solaris, selon le nom qu'on lui donne et selon la croyance des Hélions. On trouve au centre de la capitale le palais du Cheikh', le dirigeant puissant et respecté de Babylios, qui fût plusieurs fois étendu de même que ses jardins au prix de la démolition de certains des premiers bâtiments environnants. La grande bibliothèque est voisine du palais et, au nord, se trouve le Grand Temple de Solaris.
Solaris, dieu du soleil, est le dieu principal du culte des Hélions. Mais ils respectent par ailleurs tout le panthéon des dieux humains, qui ont tous leur temple dans l'enceinte de la cité. Bien qu'aucun de ces autres temples ne puisse rivaliser avec le Grand Temple de Solaris que ce soit en taille, en beauté ou en richesse. Le Grand Temple de Solaris à Babylios est le site de vénération du dieu Solaris le plus important de tout Ecridel. Les Hélions qui s'expatrient se doivent de faire des pèlerinages réguliers au Grand Temple au cours de leurs vies.
Autour du cœur de la cité se trouve une autre citée de Babylios. Aux bâtiments de trente pieds de haut recouverts de dômes que l'on découvre dans le centre-ville succèdent des maisons d'un seul étage à toits plats. Toujours recouvertes de chaux initialement, ces modestes habitations perdent bien souvent de leur blancheur en raison des tempêtes de sables qui touchent régulièrement le désert de Salith et la citée elle-même. Le bas peuple, les gens peu favorisés par la naissance, vivent dans ces bas quartiers quand ils ne s'y entassent pas. Parmi les gens du peuple, beaucoup travaillent dans les souks, nombreux entre la ville haute, le cœur de Babylios, et la ville basse, à sa périphérie, où on trouve toutes les marchandises imaginables. Il y a également tous les corps de métiers de l'artisanat auxquels on peut s'attendre. La ville a ainsi bien évidement ses forgerons, avec pour spécialité des lames courbes. Babylios a des armuriers très compétents, qui préfèrent pour la plupart la conception de vêtements légers, le lin étant très recherché à Babylios, et les armuriers les plus riches sont en fait d'avantage des tisserands célèbres que des fabriquant d'armures. Les boutiques de magie ne sont pas rares, les mages Hélions étant assez reconnus pour leurs compétences particulières dans le monde d'Ecridel, manipulant la lumière comme aucuns autres.
A côté de ces commerçants, il arrive souvent que des Hélions partent en exploration dans le désert pour y trouver des richesses à vendre dans les souks qui leur permettront de s'élever dans l'échelle sociale. Mais le désert de Salith est cruel, ou peut-être est-ce Solaris qui met à l'épreuve la bravoure de ses disciples. Toujours est-il que si le désert regorge de richesses telles que des minéraux précieux, rares sont ceux qui parviennent à affronter le soleil de plomb de sa journée et le froid glacial de ses nuits. Et comme si cela ne suffisait pas, de terribles prédateurs n'attendent qu'un instant de faiblesse de la part de ces aventuriers pour leur sauter dessus.
Aujourd'hui, dans cette belle citée de Babylios, c'est jour de fête : la Fête du soleil bat son plein. Pour la fin de l'année, et comme chaque année, les Hélions fêtent le départ du soleil. Et pour le convaincre de revenir un an de plus, la fête se doit d'être fantastique. Des délégations de toutes les races d'Ecridel sont conviées, et présentes cette année là encore. Excepté les centaures qui déclinent l'invitation tous les ans, quand ils ne répondent pas par une provocation au nom de leur déesse de la lune. Même quelques ambassadeurs des Elfes Sylvains, des Tural'Cäl comme ils se désignaient eux même, avaient fait le voyage cette année, ce qui n'est pas toujours le cas. La nuit était déjà tombée depuis plusieurs heures, les jours étant très courts en cette toute fin d'année, et deux jeunes Hélions marchent au cœur des ruelles éclairées par mille lanternes.
« Dis donc, t'es impressionnant avec ces disques de jets. Ce vieux forain avait un de ces regards noirs, t'aurais vu ça ! Tu as littéralement dévalisé son stand ! Ah, ah, ah !
- Bah, j'espère bien qu'avec tout l'entrainement que m'a imposé mon père je peux toucher quelques poteries à neuf ou douze pieds !
- Et puis le faire sous le regard de Sylla ne gâche rien hein ? »
Yal Ben'al rougit un peu. Avec ses yeux bleu et ses cheveux blonds, le jeune homme possède un teins pâle pour un Hélion qui fait bien ressortir le rose sur ses joues. Il porte une tenue de lin assez moulante destinée aux grandes occasions, bleu sombre bordée de dorures et agrémentée de quelques grenats, gemmes assez bon marché qui n'enlèvent rien à la valeur importante de cette tenue d'Hélion noble. Elancé, un pas élégant, il représente l'archétype de la riche noblesse de Babylios.
Son compagnon, qui avait tout comme lui fêté ses seize ans peu de temps auparavant, est un peu plus petit que Yal. Tout comme lui il est nue tête, mais porte ses cheveux longs et attachés en queue de cheval. Fait distinctif, plus rares encore que le blond de Yal, cet Hélion possède une tignasse d'un roux flamboyant. C'est d'ailleurs leurs couleurs de cheveux rares qui les avaient rapprochés, dans leur jeunesse, pendant les cours assommants à la bibliothèque de Babylios. Ce jeune Hélion porte une tunique peu serrée de soie dorée, agrémentée de motifs rouges serpentant sur tout le torse. La soie est une étoffe rare qui n'est pas fabriquée par les artisans de Babylios mais seulement importée et donc réservée à l'élite sociale de la ville.
« Dis donc, t'es de sacré bonne humeur Miraak ! Dit Yal pour changer de sujet en vitesse. Qu'est ce qui te fait sourire comme ça ?
- C'est à la fête du soleil que mes parents se sont rencontrés, il y a vingt ans exactement. On s'est bien amusés toute la journée, mais à la maison c'est un festin qui m'attend ! Même si maman ne sera pas là, le festin, lui…
- Ah oui, c'est vrai. Ta mère est originaire du nord d'Ecridel. D'où la couleur de cheveux d'écureuil dont tu as hérité ! Miraak rit.
- Comme si tu avais déjà vu un écureuil tient !
- Mais oui figure toi ! Mon père en a amené un de ses voyages à travers le royaume d'Andoras quand j'avais huit ans. Et il avait pile la même couleur que tes cheveux !
- Mouais… Tu vas chez Maître Bylorio ? Tu as décidé quelle arme tu vas acheter avec la bourse reçue pour ton anniversaire ?
- Oui j'y vais dès qu'on est passé chez toi. Je vais me prendre un cimeterre béni finalement. Les armes de jet ce n'est vraiment pas marrant, je préfère le contact. Tu sais, ces cimeterres qu'on a vus l'autre jour, qui sont envoyés au temple dès qu'ils sont forgés pour que les prêtres de Solaris bénissent leurs lames ?
- Oui, je vois. Bonne idée de changer de type d'arme, comme ça je pourrai te mettre ta pâtée à l'entrainement !
- Tu vas voir… Tient, on prend le raccourcis par le petit souk ouest ? »
Les deux amis quittèrent la grande voie pavée qui lie directement la porte ouest de Babylios au palais du Cheikh' pour s'engager dans un des souks entourant la ville haute et les séparant de la demeure ancestrale de la famille Dal'Vë.
La famille Dal'Vë est l'un des plus anciennes familles nobles de Babylios. Riche, naturellement, elle a donné au peuple Hélion bon nombre de ses plus grands noms. Il y eu des politiciens comme Kalek Dal'Vë, qui fût grand conseiller du grand père de Thufir Jabbar le Cheikh' actuel. Mais on trouve aussi dans son arbre généalogique des érudits comme Malinar Dal'Vë qui a rédigé un grand nombre des ouvrages peuplant les étagères de l'école de magie de Babylios.
Miraak Dal'Vë est le fils cadet des deux enfants de Galan Dal'Vë et Mira Jolan Dal'Vë. Mira est une Talienne travaillant comme ambassadrice des siens lorsqu'elle a rencontré par Galan, l'héritier de la famille Dal'Vë, lors d'une précédente fête du soleil. Tombés immédiatement amoureux, ils se sont mariés créant un petit scandale à l'époque dans la société assez fermée des riches Hélions. De leur union sont nés Sélène Dal'Vë, nouvelle héritière de la famille, puis Miraak.
Cadet d'une famille riche, Miraak a été éduqué dès son plus jeune âge par les érudits de la grande bibliothèque de Babylios. Sa sœur devant reprendre les affaires familiales, son père le destine à une carrière politicienne en dépit du fait que Miraak se soit vite révélé un peu trop rêveur et idéaliste pour ce type de carrière, ce qui lui créait bien souvent des ennuis.
Les deux jeunes amis traversèrent les étalages de fruits et légumes, déserts évidemment alors que la fête battait son plein et que toutes les victuailles avaient été réquisitionnées pour celle-ci. Le souk ouest était très sombre, presque effrayant en comparaison à l'éclairage qui laissait croire que l'on était en plein jour dans le reste de la ville. Mais les souks n'étant pas vraiment les bâtiments les plus beaux de la ville, les autorités veillaient à les éclairer le moins possible pendant ces évènements. Ce manque d'éclairage ne gênait pas les deux amis, qui connaissaient les lieux comme leur poche. Yal sortit une bourse de l'une des poches de sa tenue et la fit rebondir dans ses mains.
« Au moins cinq cents pièces d'or là-dedans ! Quand mon père me dit de choisir l'arme de mon choix, il ne le fait pas à moitié !
- Tu devrais peut-être parler plus fort ? Remarqua Miraak soudain moins guilleret. Je suis sûr qu'un ou deux des mendiants qui se cachent par-là n'ont pas entendu. Fais un peu attention Yal…
- Bah, qui oserait voler un noble ? Le bas peuple sait ce que sa vie vaut face à des accusations de vol de la part de la noblesse. Allez dépêche-toi un peu peureux ! »
Yal partit d'un coup en courant, riant et sautant par-dessus plusieurs étals. Miraak se lança vite à sa poursuite, mais étant moins agile que son ami il le perdit de vu un instant. S'arrêtant au milieu d'un nouvel étal de matériels agricoles, il s'écria :
« Hé Yal, espèce de gobelin baveux où tu te caches encore ?!
- Ici… Répondit une voix étouffée à quelques pas de lui. Miraak baissa le regard pour trouver Yal affaissé contre un des murs de la maison voisine.
- Qu'est-ce que…
- Attention ! »
Avant que Miraak n'ait pu faire un mouvement, Yal fit voler une étoile de lancer juste à côté de son oreille. Miraak préparait déjà une réplique cinglante envers les mauvaises blagues de son ami, quand il entendit une plainte sourde derrière lui en réponse au lancer et se retourna juste à temps… Pour éviter qu'une dague ne se plante dans son dos. Un homme portant une tenue noire comme la nuit et un turban cachant son visage se tenait là. À la faible lueur des étoiles, Miraak vit que l'étoile de jet de Yal s'était fichée dans son œil droit.
L'agresseur se reprit immédiatement après l'esquive involontaire du jeune homme et retourna sa dague contre lui, mais Miraak parvint à agripper son bras et, en forçant et aidé sans aucun doute par la douleur ressentie par son ennemi suite à sa blessure, lui retourna le bras dans le dos. Miraak vit apparaitre un tatouage représentant une hyène sur le bras de leur agresseur, mais il eut aussitôt le souffle coupé par le coup de coude que ce dernier lui retourna en plein ventre. Le jeune homme relâcha le bras de son adversaire et recula de quelques pas en reprenant son souffle. Son vis-à-vis, lui, fit mine d'hésiter un instant puis se retourna et s'enfuit. Miraak aperçu la bourse de Yal dans sa main gauche, mais préféra se tourner vers son ami plutôt que d'essayer de le poursuivre.
Lorsqu'il se baissa vers lui, Miraak trouva les yeux de Yal fixés sur lui, immobiles. Du sang s'écoulait encore de sa poitrine.